La position du ministère des Affaires étrangères qui contredit l’engagement pris par l’Etat du Sénégal de réhabiliter Karim Wade ne laisse pas indifférente les avocats de Wade-fils. Tout en marquant leur surprise, ils invitent au réexamen du dossier, comme l’a demandé, en octobre 2018, le Comité des droits de l’homme de l’Onu, dans un délai de 180 jours arrivé à expiration depuis avril.
Très attendu sur l’affaire Karim Wade qui fait l’actualité ces derniers temps, les avocats de Wade-fils brisent enfin le silence. Et c’est pour marquer leur surprise, face au communiqué publié le 17 octobre par le ministère des Affaires étrangères qui contredit l’engagement pris par l’Etat du Sénégal de réhabiliter leur client. «Le Collectif des avocats de Karim Wade prend acte de l’engagement pris par l’État du Sénégal à Genève, le 15 octobre 2019, devant le Comité des droits de l’homme de respecter les décisions de cette institution des Nations Unies relatives aux violations des droits fondamentaux de leur client par les autorités politiques et la Justice sénégalaise. Il est donc surpris par le communiqué publié le 17 octobre par le ministère des Affaires étrangères qui contredit cet engagement», indique le communiqué signé par Me Seydou Diagne et ses confrères.
Mercredi 24 octobre 2018, le Comité des droits de l’homme de l’Onu a demandé la révision du procès Karim Wade, sous 180 jours et la publication de la décision. Mais la décision ne sera rendue publique, au Sénégal, que le 24 novembre de la même année. Six mois après l’expiration de ce délai, l’Etat du Sénégal revient sur sa décision et décide de se conformer à cette injonction.
Seulement, la réaction surprenante du ministre sénégalais des Affaires étrangères, Amadou Bâ, fait dire aux conseils de Karim que «l’Etat sénégalais a reconnu que la mesure de grâce ayant permis la libération de Karim Wade avait été exclusivement décidée pour l’application des recommandations du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire, en dehors de tout marchandage politique ou Protocole de Rebeuss comme certains ont pu l’affirmer». Et que le gouvernement de Macky Sall s’est engagé à réformer la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), notamment en ouvrant un droit de recours contre les décisions de cette juridiction d’exception.
Pour les avocats de Karim, l’engagement du régime ne s’est pas limité là car, selon les avocats de Karim Wade, il s’est aussi porté volontaire à permettre un réexamen de la déclaration de culpabilité et de la condamnation frappant leur client.
Autant de faits qui poussent les défenseurs de Karim à relever, en sus, qu’au cours de la réunion du Comité des droits de l’homme des Nations Unis, il a été fait remarquer à la délégation sénégalaise que «la grâce octroyée à M. Wade n’allait pas dans le sens de la constatation du Comité car elle n’annule pas la condamnation».
Au finish, Me Demba Ciré Bathily et Cie invitent l’État du Sénégal à «respecter scrupuleusement les traités internationaux, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantissent le respect de l’État de droit, des libertés publiques et de la démocratie».
Poursuivi pour «enrichissement illicite» au Sénégal, Karim Wade a été condamné par la Crei, en mars 2015, à 6 ans ferme à et à payer 138 milliards d’amende. Il recouvre la liberté en 2016, avant l’expiration de sa peine, par le biais d’une grâce présidentielle. A l’international Wade-fils a remporté toutes les procédures judiciaires engagées contre lui par l’Etat du Sénégal devant 7 juridictions et instances internationales : de la Cour de justice de la Cedeao à la Cour d’appel de Paris en passant par le Tribunal correctionnel de Monaco, le Tribunal de grande instance de Paris, le Tribunal de Monaco, le parquet national financier de Paris, le groupe de travail des Nations Unies contre la détention arbitraire ainsi que le Comité des droits de l’homme de l’Onu.
Pape NDIAYE