L’autorité a finalement mis à exécution ses menaces, en détruisant des dizaines d’habitations à Ngallèle-Extension, dans la région de Saint-Louis. D’une superficie de 114 hectares, ces maisons détruites sont érigées sur un site qui fait l’objet d’un litige puisque relevant du Domaine national, selon la version officielle. Cette affaire vieille de trois ans refait subitement surface dans un contexte qui semble ne pas s’y prêter.
(Saint-Louis) – A Saint-Louis, les habitants du quartier Ngallèle-Extension sont encore sous la hantise des expulsions forcées. Ces derniers jours, ils ont été réveillés par le bruit des Caterpillar et autres engins destructeurs. L’autorité a, en réalité, mis ses menaces à exécution. Celle-ci qui a ainsi remis au goût du jour un dossier déjà vidé depuis trois ans maintenant, mais qui, brusquement, fait focus sur ce quartier périphérique, pour réveiller les vieux démons de la peur. La société civile qui a prêté main forte aux populations, dès les premières heures de cette vieille rengaine, a invité l’Administration à plus de souplesse et au dialogue, pour permettre aux populations de vivre dans le calme et la sérénité.
Ainsi, en vingt-quatre heures, ce sont des dizaines de maisons qui ont été détruites. En attendant de terminer la sale besogne entamée hier, mardi 08 octobre 2019 et qui va se poursuivre dans les jours à venir. Pour mettre la forme, après avoir cassé les maisons en construction et celles qui ne sont pas encore habitées, le gouverneur de la région (Alioune Aïdara Niang), le ministre-maire de Saint-Louis (Mansour Faye) ainsi que leur délégation ont donné un ultimatum de trois jours aux familles installées depuis belle lurette, pour vider les lieux.
Des centaines de maisons détruites
Pour l’heure, à part un mouvement d’humeur des femmes et des enfants qui ont momentanément barré la route nationale n°2, dans l’après-midi, aucune autre réaction récalcitrante n’a été notée. Déjà, à l’occasion de la dernière crise qui a opposé les habitants de Ngallèle- Extension et l’Agence des aéroports du Sénégal (Ads), il y a trois ans, les responsables du comité de lutte avaient adopté la même posture responsable. Cependant, bon nombre d’observateurs ont pointé le timing et l’empressement des autorités qui semblent pressées d’en finir avec cette ténébreuse affaire des terres de Ngallèle-Extension.
Certes les autorités ont argué d’arguments solides et plausibles qui tournent autour de la construction d’un hôpital, d’une école, d’un marché et tutti quanti. Mais il n’en demeure pas moins que les esprits critiques soupçonnent le maire Mansour Faye et Cie d’avoir savamment ourdi un plan caché. Celui-ci visant à faire main basse sur les hectares restant, en vue d’y construire des complexes immobiliers. Cela, pour capter des pétrodollars, dans la perspective de l’arrivée des hôtes XXL attendus dans le cadre de l’exploitation du gaz et du pétrole.
Ces maisons détruites sont érigées sur un site qui fait l’objet d’un litige puisque relevant du Domaine national. D’une superficie de 114 hectares, le site en question appartient à l’Agence des aéroports du Sénégal (ADS). Pour l’heure, 2 000 familles se trouvent à la rue. Ces populations ont pourtant été averties en 2016, lorsque le préfet avait servi une sommation pour l’arrêt des travaux et la libération des emprises à Bango, Ngallèle, Sinthiane et Khar Yalla. L’autorité préfectorale disait avoir constaté, lors de sa visite du 11 octobre 2016, que ces populations ont effectué, sans titre ni autorisation préalable, des travaux de construction sur une partie de l’assiette du TF No28/BS appartenant à l’Agence des aéroports du Sénégal (ADS). Une sommation qui leur rappelait que les occupants sont passibles des sanctions prévues par la loi no88-05 du 20 juin 1988 portant Code de l’urbanisme.
Arrestations dans les rangs des manifestants
Aux dernières nouvelles, on apprend que des manifestants qui s’opposaient à la démolition ont été arrêtés par les forces de l’ordre qui encadraient l’opération. Parmi les personnes interpellées figurent 8 femmes placées en garde à vue au Commissariat central de Sor. Ces manifestants ne sont personne d’autres que des membres du collectif des populations de Ngallèle Nord Extension et Bango sud qui regroupe près de 2 000 chefs de famille. Lesquels sont impactés par ces opérations de démolitions de leurs maisons.
Gabriel BARBIER