La Rencontre africaine des droits de l’Homme (Raddho) s’indigne de la façon dont le journaliste et activiste Adama Gaye a été traité par les policiers de la Division des investigations criminelles (DIC) qui sont allés le cueillir à son domicile, à 5 heures du matin.
«J’ai fortement regretté les conditions dont Adama Gaye a été gardé à vue. C’est une violation de ses droits, parce que même si on pense que quelqu’un est fautif, parce que jusqu’à aujourd’hui il est présumé innocent, il y a des choses qu’on ne devrait pas le faire subir. Il paraît qu’il est resté six heures de temps avant d’être interrogé», déclare Senghane Senghor de la Raddho qui s’exprimait, hier, en marge d’une rencontre regroupant les acteurs de la société civile africaine. Qui s’empresse d’ajouter : «Pourquoi aller cueillir quelqu’un à 5 heures du matin pour ne l’entendre qu’à 11 heures, alors que vous savez que si vous le convoquez il peut venir de lui-même. C’est une violation de ses droits, c’est le fatiguer inutilement, parce que derrière cela, il y a un semblant de méchanceté qui ne devrait pas exister dans l’application de nos lois. Cela quand même, il faut le dénoncer». Responsable de la justice internationale au niveau de la Raddho, Senghane Senghor affirme qu’Adama Gaye est un activiste qu’ils connaissent et qu’ils suivent et qui semble être intéressé par la stabilité et la défense des intérêts du Sénégal. «En tout cas, c’est ce que nous lisons et voyons dans ses discours», poursuit-il. Adama Gaye est poursuivi pour le «délit d’offense au chef de l’Etat» et la diffusion d’informations jugées «contraires aux bonnes mœurs» via son compte Facebook.
Ainsi, le journaliste et activiste tombe sous le coup du fameux article 80 du code pénal. Mais pour le défenseur des droits de l’Homme, Adama Gaye ne devrait pas être poursuivi pour le premier délit. Mieux, la Raddho réclame l’abrogation pure et simple de cet article. «Notre position a toujours été la révision de cet article ou tout simplement son retrait pur et simple du code pénal sénégalais. Les autorités ne veulent pas le faire, mais dans beaucoup de pays à travers le monde ce délit n’existe plus. Regardez tout ce qu’on dit sur les présidents français, américains et autres, et pourtant ces pays continuent de fonctionner normalement sans cet article», souligne Senghane Senghor. Qui en profite pour dénoncer l’emprisonnement d’un autre activiste Guy Marius Sagna, arrêté depuis plus de deux semaines pour des propos dont il nie en être l’auteur. «En tant que militant de droits humains, nous ne pouvons que regretter les arrestations de Guy Marius Sagna et Adama Gaye, surtout avec la manière que nous connaissons. Guy Marius Sagna a été victime d’un délit d’opinion. Et ce n’est pas bon pour une démocratie d’arrêter des gens parce qu’ils disent ce qu’ils pensent ou qu’ils refusent de se caser. Le Sénégal doit être gouverné dans sa diversité. En outre, nous disons que ce n’est pas possible de voter des lois pour restreindre ce que la démocratie et la liberté d’opinion permettent aux citoyens, nous le déplorons fortement», conclut Senghane Senghor. Cette rencontre qui se tient sur deux jours à pour but d’outiller les sociétés civiles du continent face à l’impunité.
Charles Gaïky DIENE