A en croire les communicateurs des deux camps, rien ne devrait filtrer de la rencontre de Bruxelles. Il faudrait pourtant la photo d’une poignée de main ou d’une étreinte entre les deux anciens présidents de la Côte d’Ivoire pour persuader les plus sceptiques que leur rencontre, plusieurs fois annoncée puis reportée, aura bien lieu ce lundi 29 juillet dans l’après-midi.
Rencontre familiale à haute teneur politique
Arrivé dimanche dans la capitale belge en compagnie de son épouse, Henri Konan Bédié va rencontrer Laurent Gbagbo dansla résidence où il vit depuis janvier dernier après sa libération du pénitencier de Scheveningen à La Haye, aux Pays-Bas. Des proches parents de Laurent Gbgabo et d’Henri Konan Bédié devraient prendre part aux retrouvailles qui seront loin d’être familiales.
Dans une configuration où la famille biologique se confond souvent avec la famille politique, l’entrevue sera aussi celle des «numéros 2» de chaque camp politique, lui conférant une haute teneur politicienne. Dans la délégation du président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), Maurice Kakou Guikahué, la sentinelle qui seconde Henri Konan Bédié, mais aussi Noël Akossi Bendjo, exilé à Paris et très actif sur les dossiers concernant son mentor.
En face, Laurent Gbagbo aura à ses côtés l’inévitable Assoa Adou, secrétaire général du Front populaire ivoirien (FPI, branche Gbagbo) et Emmanuel Acka, fidèle zélé de Gbagbo, un temps proche de Simone Gbagbo, puis de Nady Bamba (seconde épouse de Laurent Gbagbo). L’absent le plus présent de cette rencontre sera sans doute Guillaume Soro. Plusieurs rumeurs le donnaient comme témoin de la rencontre de Bruxelles. L’ancien chef rebelle ne sera pas de la partie. De quoi va-t-on discuter à cette rencontre tant attendue?
Laurent Gbagbo, une des clés de la présidentielle de 2020
«D’échanges de civilités et de questions d’avenir pour la Côte d’Ivoire», résume un élu PDCI contacté par La Tribune Afrique avant de citer pêle-mêle, la «réconciliation nationale, le retour de la paix et le développement» du pays. Sa réponse est le signe d’une communication que l’on veut volontairement vague et verrouillée autour d’une rencontre qui tisonne toutes les curiosités. Mais l’on peut aisément deviner que cette rencontre jette les prémices d’une alliance politique en vue de la présidentielle de 2020.
En l’absence d’intentions clairement exprimées par Alassane Ouattara pour se représenter, son camp devrait présenter Amadou Gon Coulibaly, son Premier ministre à qui on a taillé le costume du dauphin putatif. La machine politique du RHDP, le parti unifié voulu par le président sortant, a même accéléré la mise en place de ses instances. Pour la contrer, Henri Konan Bédié qui a consommé la rupture de son alliance avec Alassane Ouattara en n’adhérant pas au parti unifié, a tenté plusieurs rapprochements.
Un temps, l’idée d’une coalition entre le «Sphinx de Daoukro» et Guillaume Soro avait fait son chemin à la faveur d’une navette de rencontres entre les deux hommes. Avant la libération de Laurent Gbagbo, le président du PDCI avait été courtisé par Pascal Affi Nguessan, adoubé par la justice comme le chef de file officiel du FPI. Aujourd’hui, les visées de l’ancien chef de l’Etat se posent sur Laurent Gbagbo. Libéré des chaînes de la détention, ce dernier n’attend plus que d’être fixé sur un possible recours de Fatou Bensouda devant la CPI pour en finir définitivement avec le feuilleton judiciaire dont il est sorti blanchi. Sa rencontre avec Henri Konan Bédié prouve, s’il fallait encore en faire la preuve, qu’il détient une des clés du scrutin à venir.
La Tribune