Après les mises en garde du ministre de l’Intérieur mauritanien, celui des Affaires étrangères a convoqué les ambassadeurs des pays voisins qu’il accuse d’être les auteurs du soulèvement populaire post-électoral. Les Sénégalais, les Gambiens et les Maliens sont mis à l’index par les autorités mauritaniennes.
(Envoyé spécial) – Des émeutes réprimées par des policiers armés jusqu’aux dents, des centaines d’arrestations notées du côté des négros mauritaniens, des prisons et commissariats de la capitale surpeuplés de manifestants. C’est le spectacle auquel on assiste en Mauritanie, quelques jours après la présidentielle. Des déchirures profondes traversent en ce moment ce pays, depuis l’annonce de la victoire de l’Upr, parti au pouvoir qui s’est retrouvé avec 52% dès le premier tour. Cela, suite aux résultats proclamés par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Des résultats forts contestés par les quatre candidats en lice. Une mascarade selon l’opposition qui regrette qu’avant même la proclamation des résultats par la Ceni, que le candidat au pouvoir avait lui-même anticipé, en s’auto-proclamant vainqueur avec des chiffres qui n’avaient rien à avoir avec la réalité.
Depuis la proclamation de ces résultats qui donnent vainqueur le parti au pouvoir, le pays ne cesse de sombrer dans la violence. Nouakchott est à feu et à sang. Conséquences : des arrestations sont notées partout dans la capitale. Désormais, dans les quartiers où les populations sont en résidence surveillée, personne n’ose plus sortir pour vaquer à ses besoins. Les plus grands marchés jadis connus pour leur ambiance quotidienne et très animés de jour comme de nuit, sont presque déserts.
C’est le ministère de l’Intérieur et de la décentralisation qui est passé par là. Ce dernier, à travers un communiqué officiel, a mis en garde toute manifestation non autorisée. Dans ce communiqué, peut-on lire, que «tout regroupement non autorisé d’atteinte à l’ordre public expose à des sanctions aux fouteurs de trouble, et rend ses organisateurs responsables des conséquences qui découlent en matière des lois et règlements du pays». Surpris par l’ampleur de la violence notée depuis la proclamation des résultats, l’Etat mauritanien est monté au créneau pour nommément citer les ressortissants sénégalais, gambiens et maliens vivant dans leur pays, comme étant les auteurs des actes barbares et odieux perpétrés dans leur pays.
L’ambassadeur du Sénégal à Nouakchott convoqué
Selon Ismaël Cheikh Ould Ahmed ministre des Affaires étrangères, ce dernier qui ne s’est pas gêné de convoquer les ambassadeurs de la Gambie, du Mali et celui du Sénégal, n’a eu aucune honte à tirer à boulets rouges sur nos diplomates. Mieux, ce dernier est allé même jusqu’à menacer nos ambassadeurs en leur disant qu’ils n’accepteront pas que des ressortissants qui sont venus gagner leur vie chez eux, faire ce qu’ils veulent. Selon les autorités mauritaniennes, ce sont ces trois pays voisins cités qui veulent détruire la stabilité de leur Nation.
Car dans les manifestations, seuls les négros mauritaniens se trouvent sur le terrain des hostilités. Et concernant les arrestations, qu’il n’y aurait aucun maure qui a été arrêté. Suffisant pour demander aux différents ambassadeurs de ces pays voisins de prendre toute leur responsabilité, en invitant leurs compatriotes à respecter les lois et règlements du pays d’accueil. Décidé à protéger ces ressortissants et à les accueillir chez eux, pour leur insertion dans le tissu social, mais pas question, en tant qu’étrangers, de vouloir créer le chaos dans leur pays, a-t-il prévenu. «Il ne sera pas question et l’état mauritanien ne l’acceptera pas», fera savoir le chef de la diplomatie mauritanienne à l’endroit des chefs de mission diplomatique de ces trois pays voisins. Une mise en garde qui a obligé les quatre candidats opposants à surseoir à la grande marche qu’ils devraient organiser hier.
Abou KANE