En première instance, Khalifa Sall a été condamné à 5 ans ferme et à payer 5 millions d’amende
pour les fausses factures ayant servi à empocher 30 millions par mois entre 2011 et 2015 et qu’il a signées durant la période incriminée. La Justice qui l’avait déclaré coupable d’«escroquerie portant sur des deniers publics» et de «complicité par instigation de faux», avait également ordonné la confiscation du cinquième de ses biens. La même peine avait été infligée à Yaya Bodian et au Directeur administratif et financier (Daf) de la Ville de Dakar, Mbaye Touré. Aucune de ces peines ne leur a permis de recouvrer la liberté car la condamnation n’ayant pas été couverte par la détention avant jugement. Le juge était revenu sur les faits reprochés au Chef de bureau à la division comptable de la mairie de Dakar. «Yaya Bodian s’est rendu coupable d’avoir confectionné 110 fausses factures définitives entre 2011 et 2015. Il a utilisé l’entête du Gie Tabaar alors que ces factures ne correspondant à aucune commande de riz ou de mil. Il a incontestablement commis du faux par contrefaçon», lisait-on dans l’extrait du jugement lu par le juge Lamotte.
Sur l’ensemble de ces 5 délits reprochés aux prévenus, le juge en avait seulement écarté trois, à savoir le détournement de deniers publics, le blanchiment de capitaux et l’association de malfaiteurs. Ayant déjà purgé sa peine de 2 ans dont 6 mois ferme, Fatou Traoré, assistante du Directeur administratif et financier (Daf), Mbaye Touré, a regagné sa famille après un an passé derrière les barreaux. On lui a reproché d’avoir fourni l’entête du Groupement d’intérêt économique (Gie) ayant servi à la confection des fausses factures. «Elle n’a pas participé à la production des fausses factures. Elle a facilité la réalisation du faux et elle n’a manifesté aucune volonté d’empêcher le délit», mentionne son jugement. Le même sort frappe Ibrahima Yatma Diaw, chef de la Division financière et comptable, et Amadou Moctar Diop, Coordonnateur de l’Inspection des services municipaux, condamné chacun à 2 ans dont 1 an ferme. Quant aux deux autres (Diaw et Diop) déclarés coupable de faux dans un document administratif, on leur reproche d’avoir «signé les 110 faux procès-verbaux de réception en leur qualité de membres de la commission de réception de la ville de Dakar».
Pour ce qui est des percepteurs municipaux, Mamadou Oumar Bocoum et Ibrahima Touré, ils ont été innocentés, comme demandé par le procureur de la République lors de son réquisitoire. Même s’ils bénéficient d’une relaxe, il n’en demeure pas moins que le juge leur a signifié leur «manquement à l’obligation de vérification de l’effectivité des dépenses effectuées et à leur obligation de contrôle sur pièce et sur place». «Ils n’ont jeté le moindre regard sur les factures et n’ont pas non plus vérifié l’effectivité. Il s’agit d’une attitude d’omission volontaire», avait commenté le juge Lamotte dans sa décision. Ni l’Etat du Sénégal ni la mairie de Dakar n’ont été autorisés à se constituer partie civile au procès de la Caisse d’avance. Pour l’Etat, le juge a estimé qu’«il n’a pas souffert d’un préjudice personnel» né dans cette affaire. Raison pour laquelle il a été débouté de toutes ses prétentions. Quant à la ville de Dakar, le tribunal a estimé qu’elle peut certes se constituer partie civile, mais que les conditions en la matière ne sont pas réunies, notamment la capacité à agir et le pouvoir de représentation. Ainsi, les avocats de la Ville de Dakar qui espéraient que leurs intérêts allaient être préservés ont vite fait de déchanter. Mais cette décision pourrait être infirmée en appel, comme annoncé par les conseils de l’Etat et de la Ville de Dakar.
Pape NDIAYE