Les étudiants suspendent la grève illimitée dans la division. Si le mot d’ordre est levé à Dakar où les cours reprennent ce mercredi 30 mai, tel n’est pas au niveau des universités de Thiès, Bambey, Ziguinchor et Saint-Louis.
C’est la division dans les rangs des étudiants. L’audience accordée par le chef de l’Etat, Macky Sall, aux étudiants n’a pas seulement cassé le bloc qu’avaient constitué ces derniers, à la suite de la mort de leur camarade Mohamed Fallou Séne. Mais aussi les amicales de l’Université cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar qui étaient d’accord sur tous les points revendicatifs. Il aura fallu que le président de la République promette d’augmenter les bourses et de baisser le prix du ticket de restauration pour occasionner l’éclatement de ce groupe. Ce qui a conduit les pensionnaires de l’Ucad à se constituer en deux groupes. D’un côté, ceux qui se qualifient de légaux et qui déplorent l’attitude des autres qui se disent être porteurs de la parole des étudiants. «Après notre rencontre avec le président de la République, une assemblée générale a été tenue et nous avons jugé opportun de suspendre le mot d’ordre. Ce, en décrétant 24 heures non renouvelables. On va reprendre les cours dès ce mercredi, parce que l’assemblée a jugé satisfaisantes les réponses que le président de la République a apportées à nos différentes revendications», a laissé entendre, hier Franck Daddy Diatta, porte-parole du Collectif des étudiants de l’Ucad regroupant les facultés de Lettres, Sciences, Droit et la Faseg.
En ce qui concerne le limogeage des ministres que ces derniers accusent d’être à l’origine de la mort de leur camarade et par ailleurs le point nodal des revendications, les promesses du Président les ont masquées. A ce titre, le porte-parole souligne qu’il y a des prérogatives à respecter. «Le Président nous a dit qu’il a reçu notre message et qu’il nous a entendus, mais qu’il y va de ses prérogatives de démettre ou de nommer qui il veut. Il nous a demandés de donner le temps à la Justice pour faire son travail», rapporte Diatta. Qui fustige l’attitude de ses camarades de l’Ugb, de la Faculté de médecine et des écoles et instituts qui ont boycotté la rencontre.
La Fac’ Médecine tient un autre discours
Malgré qu’elles aient levé leur mot d’ordre de grève, l’Amicale de la Faculté de médecine et pharmacie d’Odontologie (Fmpo) et la Coordination des écoles et instituts de l’Ucad, qui n’ont pas répondu à l’appel de Macky Sall, déplorent le comportement de leurs camarades des quatre autres amicales. Pour les leaders des deux amicales, seules la Faculté de médecine et les écoles et instituts disposent d’amicales légalement reconnues par la communauté universitaire. Sur ce, les autres amicales ne peuvent pas représenter l’Ucad parce qu’elles évoluent sur la base de listes constituées. «En 2014, quand on a tué Bassirou Faye, j’étais de la délégation qui est partie rencontrer le chef de l’Etat. Il avait fait la promesse de régler définitivement le problème des bourses. Quatre ans plus tard, un autre camarade perd la vie. Il est temps que cela cesse et que Justice soit faite», fustige Aïda Thiaw, présidente de l’Amicale des étudiants de la Fac’ de médecine. Qui s’offusque des «représentants qui profitent de la situation pour exposer leurs propres doléances au chef de l’Etat».
Parce que, soutient-elle, seules la coordination des écoles et instituts de l’université de Dakar et la Faculté de médecine ont des représentants valablement élus. «Le reste n’étant que des présidents de listes en campagne», a-t-elle ajouté. Dans la même veine, la Coordination des écoles et instituts de l’Ucad brandit son communiqué. Dans ce document, leur président Diène Ngom procède à la levée du mot d’ordre, tout en remettant en cause le leadership du syndicat étudiant à l’Ucad. Il a tenu à préciser que son Amicale n’a participé à aucune rencontre avec le président de la République. Ce qui lui fait dire que leur revendication n’a été autre que le limogeage du ministre de leur tutelle et que justice soit faite pour Fallou Sène, tué par un gendarme le 15 mai dernier à l’Ugb.
Thiès, Bambey, Ziguinchor et Saint-Louis campent sur leur position
Dans les autres universités comme celle de Thiès, c’est la concertation avec la base qui est de mise, avant toute prononciation sur la levée du mot d’ordre de grève. Sur ce, la Coordination des étudiants de ladite université a convoqué une réunion «afin de discuter avec la base pour savoir quelles mesures seront prises pour la suite», selon Mounirou Thioune, président de ladite coordination. Par ailleurs, à Ziguinchor, des étudiants approuvent les mesures mais déplorent que le gouvernement réagisse après qu’il y ait mort d’homme. Les étudiants de l’Université Alioune Diop de Bambey refusent de lever leur mot d’ordre. Ils estiment que les mesures prises par le chef de l’État, à savoir, la baisse du prix des tickets de restauration et l’augmentation des bourses, n’ont rien à voir avec leur plateforme revendicative. Pour eux, il s’agit du limogeage des ministres Mary Teuw Niane, (Enseignement supérieur), Amadou Bâ (Economie, Finances et Plan) et Aly Ngouille Ndiaye (Intérieur et Sécurité publique). «Cet accord-là n’a rien à voir avec nos réclamations. Nous exigeons le départ de ces ministres. Nous réclamons aussi qu’on rende hommage de façon vraiment honorable au défunt (Mohamed Fallou Sène)», assène Harona Diédhiou, étudiant en Licence 3 Web.
Salif KA