Le procès d’Imam Ndao et Cie a repris, ce lundi, au palais de justice de Dakar.
A l’ouverture de l’audience d’hier, les défenseurs d’Imam Ndao ont demandé à ce que le pistolet saisi chez le mis en cause soit présenté à la barre. Me Alioune Cissé de déclarer : « M. Le président, les objets saisis chez imam Ndao ont été photographiés et scellés. Nous avons fait un travail en listant tous les objets qui ont été saisis. Nous aimerions voir le pistolet pour l’examiner e,t au besoin, désigner un expert pour voir s’il fonctionne ou pas ». Sur la requête de la défense, le maître des poursuites a estimé que « la désignation d’un expert n’est pas nécessaire. Le caractère non fonctionnel du pistolet ne fait l’objet d’aucun doute. Mais le pistolet, même non fonctionnel, demeure une arme de même que les munitions. Cependant, pour la présentation des scellés, on peut demander aux greffes de nous présenter les objets qui ont été saisis chez imam Ndao ». Après avoir écouté les deux parties, le Président de la chambre criminelle de Dakar, Samba Kane, a tranché : « pour la présentation des scellés, on avisera demain (aujourd’hui). Pour ce qui concerne la demande d’expertise, elle est inopportune à partir du moment où le caractère non fonctionnel ne fait l’objet d’aucun doute. Le pistolet ne fonctionne pas. Si on prend un expert, c’est pour prouver quoi ?»
« Nous avions besoin de 600 millions pour débuter l’exécution de ce plan »
Après ces observations, le procès a suivi son cours et Imam Ndao a été encore interrogé par le tribunal. Selon lui, il enseigne le djihad en se basant sur des textes tel qu’il est recommandé par le Prophète (Psl). Evoquant l’histoire pour étayer ses propos, Imam Ndao a rappelé que Ndiadiane Ndiaye avait installé un Etat islamique dans son village, et il fallait maitriser le Coran pour prétendre diriger le trône. Me Mamadou Kamibell, un des avocats d’Imam, fond en larmes en rappelant devant le prétoire l’histoire de Bour Sine Coumba Ndoffène et de Maba Diakhou Ba. Interrogé sur le daara, Imam Ndao explique : « mon objectif pour les daaras, c’est de créer un type d’homme capable d’assurer la continuité de l’enseignement sur terre. Et mon plan de développement social était de créer des industries, former des jeunes pour assurer la sécurité, créer un réseau financier, développer le système agro-pastoral. Le plan, je l’avais conçu avant de le partager avec les autres imams. Nous avions besoin de 600 millions pour débuter l’exécution de ce plan. Ce plan devrait être pratiqué à l’échelle régionale. On avait proposé le plan à l’Etat du Sénégal », a-t-il dit. Avant de continuer : « Khamoulou Sa diné Daroul Akham est mon site. Je n’ai jamais eu l’application télégramme. Par ailleurs, si je dirigeais ce pays, je formerais très tôt les jeunes au maniement des armes. C’est ce que recommande la religion musulmane. Les jeunes doivent très tôt apprendre à nager et à tirer ». Sur ce, le procureur s’interroge : « donc, tu penses vraiment à diriger un pays ? ». Cependant l’Imam n’a pas répondu. C’est son avocat, Me Ciss, qui a pris la parole pour dire : « Imam, présentement nous savons que le procureur fait du tâtonnement ».
«Je n’ai jamais cru que le problème du terrorisme pouvait être réglé par la force »
Revenant sur le pistolet, Imam Ndao a déclaré: « le pistolet saisi chez moi n’existe que de nom. Ce n’est pas un pistolet fonctionnel. Même un couteau a plus d’utilité que ce pistolet. Car, les couteaux que j’ai, peuvent couper quelque chose alors que le pistolet ne me sert à rien». Sur une question de savoir est-ce qu’il avait l’intention de renverser l’Etat, Imam Ndao a rétorqué : « si j’avais l’intention de renverser l’Etat, je ne remettrais pas ce plan à la disposition du gouverneur. Ce plan, c’était pour créer une autonomie financière populaire et l’allègement de charges de l’Etat. Si j’étais contre l’Etat, je ne mettrais pas à sa disposition des parcelles pour l’implantation d’une école ». Sur la situation de notre pays, Imam Alioune Ndao a soutenu : « je pense que nous n’avons toujours pas une indépendance monétaire et financière. Il y a également des efforts à faire dans le secteur de l’éducation. Je pense que ce sont les fils du pays qui doivent se battre pour acquérir cette autonomie. Il faut dire qu’après la conception de mon programme de développement social, on m’avait recommandé de le sécuriser. Il y a même des gens qui me demandent si l’Etat ne s’est pas inspiré de ce projet pour créer les ASP ». Il ajoute : « je n’ai jamais cru que le problème du terrorisme pouvait être réglé par la force. J’ai d’autres vidéos beaucoup plus horribles que celles qui ont été projetées ici. J’ai des vidéos dans lesquelles on tue les gens avant de les manger. Mais, cela ne veut pas dire que j’adhère à l’idéologie de ceux qui commettent ces actes. J’ai commencé à faire mes recherches sur tout ce qui touche les musulmans à l’âge de 19 ans ».
La vérité sur l’argent de Ibrahima Diallo
Sur l’argent qu’il a reçu de la part de Ibrahima Diallo, Imam Ndao se veut clair : « Ibrahima Diallo est venu me voir au daara. Je ne l’avais pas reconnu, et il m’a signifié qu’il a une fois été de passage au daara. Il m’a demandé si tout allait bien et je lui ai rétorqué que comme dans tout daara, les problèmes ne manquent pas. Il m’a demandé quelles étaient nos principales difficultés, je lui ai dit que j’étais à la quête d’une machine à eau pour irriguer nos champs. Je lui ai révélé que ladite machine coutait 800 mille francs Cfa et que je lui ai dit que si je disposais 1 million de francs Cfa. Il m’a remis 3 billets de 500 euros et je lui avais fait une reconnaissance de dette que nous avions tous les deux signée. Au cours de nos discussions, il m’a fait savoir qu’il devait voyager en Gambie et voudrait me confier une somme car ne voulant pas voyager avec. Il m’avait ainsi remis 25 billets de 500 euros ». Prenant la parole, un des avocats de la défense a soutenu : « la gendarmerie a fait comprendre que le groupe s’est organisé à partir de Kaolack, sous la houlette et la direction d’Alioune Ndao. Est-ce qu’il y a un mouvement de terroristes ou d’organisation islamique qui a été organisée à partir de Kaolack, sous la houlette d’Alioune Ndao ? » Il ajoute : « les gendarmes enquêteurs ont écrit que le daara de Imam Ndao est un centre d’endoctrinement des jeunes en partance vers les zones de front (Lybie et Syrie). Est-ce que vos champs et vos daara servent de lieu d’entrainement, d’endoctrinement et d’hébergement d’un quelconque djihadiste ?». Il a répondu : « ces affirmations sont inexactes. Des milliers de jeunes ont étudié à mon daara. Aucun d’entre eux n’a eu l’idée de rejoindre les fronts. Ils sont, aujourd’hui, devenus des chauffeurs, des Oustaz, des agriculteurs, entre autres ».
« J’étais très étonné de voir tous les éléments qui ont été mobilisés pour m’arrêter »
L’avocat de relancer : « selon vous, pourquoi les éléments enquêteurs de la gendarmerie ont jugé nécessaire de mettre toutes ces contrevérités dans le procès-verbal ? ». Imam Ndao de rétorquer : « je ne saurais vous le dire. J’ai été surpris et étonné d’entendre les propos qui me sont prêtés ». L’avocat d’ajouter : « quand les éléments enquêteurs sont venus vous arrêter, vous leur avez savoir que cette façon d’arrêter les gens en leur passant les menottes doit être bannie. Est-ce que vous pouvez revenir sur ces déclarations ? » « Effectivement, j’étais très étonné de voir tous les éléments qui ont été mobilisés pour m’arrêter alors que si on m’avait convoqué par téléphone j’irais répondre. J’ai également dit à ceux qui m’interrogeaient de revoir les informations que les renseignements généraux leur avaient fournies sur moi. Car, tout ce qu’on leur avait dit était en déphasage avec mes actes », a-t-il répondu. Avant d’ajouter : « je ne suis pas de ceux qui pensent que la lutte contre le terrorisme devait se faire par la force. Je ne crois pas à cette méthode. Le Sénégal pouvait lutter contre le terrorisme de façon beaucoup plus sage parce qu’il en a les capacités. J’ai toujours fustigé les actes de terrorisme. Je me sers des Cd sur les terroristes pour décourager les jeunes musulmans à faire de tels actes ». L’avocat poursuit ses questions : « lors de votre arrestation, vous aviez soutenu que l’Etat vous avait sacrifié. Est-ce que vous confirmez toujours que l’Etat vous a sacrifié ?» Imam Ndao de dire : « il faut mettre la déclaration dans son contexte. J’avais déposé une autorisation de port d’arme en vain. Quand les policiers, en civil, sont venus m’arrêter, je les prenais pour des agresseurs. Je me disais que si j’avais l’autorisation de port d’arme, je pourrais me défendre. C’est pourquoi j’avais dit que l’Etat m’avait sacrifié ».
Avec Rewmi