CONTRIBUTION
Depuis la fin de la guerre froide, les budgets de guerre s’étiolaient. La guerre contre le terrorisme islamiste mondial oblige les pays membres de l’Otan à devoir emprunter chaque jour auprès des banques 4 milliards de dollars. Ce qui fait passer leur budget annuel à 1 500 milliards de dollars.
A la chute du mur de Berlin, le 9 novembre 1989, et à la fin de la menace militaire aux frontières de l’Europe, une présence militaire lourde aux portes de l’Europe n’était plus nécessaire. Le démontage des installations et le repli des troupes signifiaient la fin des budgets de guerre. La lutte contre le terrorisme sert avant tout d’alibi à un redéploiement massif de l’armée américaine sur les nouvelles zones de turbulences telles que la Corée du Nord, la Syrie et dans le monde arabo-musulman.
Le choix stratégique a donc été fait de déplacer les forces militaires américaines de l’ancienne zone de turbulence communiste vers une nouvelle : le Proche-Orient et le monde arabo-musulman. Pour éviter toute réaction d’hostilité du monde libre et du Congrès américain face à ces manœuvres militaires de grande envergure, il fallait un motif d’une gravité indiscutable. Les attentats du 11 septembre 2001 ont été ce motif. CNN a été présent sur les lieux du drame quatre minutes après le choc du premier avion. Cela lui a permis de diffuser les images du deuxième avion percutant en direct la deuxième tour. Cette diffusion en boucle sur toutes les chaînes de télévision du monde, de ce qui ne pouvait pas être une erreur de pilotage, permet ainsi aux agressés d’accuser, sans l’ombre d’un doute, leurs agresseurs d’être des barbares. Cette accusation magistrale constitue une arme symbolique majeure. Elle autorise l’Amérique à mener la guerre non pas au titre d’agresseur, mais au titre d’agressé.
La mise à mort d’êtres humains, perceptible au moment où les avions s’écrasent sur les tours du World Trade Center, est si terrible que l’opinion publique tend naturellement à adhérer à la thèse du complot islamiste ! Ceux qui ont commandité et réalisé ces attentats ne peuvent être que des barbares. Le réseau Ben Laden avait suffisamment de motifs pour commettre ces attentats. Il endosse alors parfaitement le costume du coupable. Or, si les mercenaires du réseau Ben Laden ne sont pas les instigateurs en totalité de ces attentats, mais de simples exécutants, au service volontaire ou involontaire d’autres commanditaires, il y a une complicité a posteriori de la part de tous ceux qui refusent de s’interroger. Or, pourquoi les autorités fédérales américaines ne veulent pas rendre publics les rapports d’enquêtes et de police réalisés sur ces attentats et notamment le fameux «Penttbom Major Case 182» ? Rapport consacré au réseau de complicités qui étaient en relation avec les pirates de l’air.
Longtemps, le pétrole a été acheté aux pays producteurs arabes nettement en dessous de sa valeur réelle. Ce moyen a largement contribué à ce que le monde arabe, depuis des années trente, rate le virage du développement industriel. Pourtant, de nombreux mouvements démocratiques et socialistes chercheront à prendre le pouvoir dans les pays producteurs afin de nationaliser les matières premières pour en tirer meilleur profit. A chaque fois, les forces militaires occidentales, bras armés du capitalisme, sont intervenues pour interdire l’accès au pouvoir de tous les gouvernements hostiles aux intérêts des trusts pétroliers et gaziers occidentaux. L’exemple de la sale guerre des pays en conflits en Syrie en dit long de leur stratégie d’anéantir sur le plan économique et politique le monde arabo-musulman.
L’ensemble des économies occidentales se sont donc développées depuis plus de 150 ans autour du pétrole. C’est ce qui explique que l’épuisement des réserves peut entraîner dans les années à venir une gigantesque récession mondiale.
D’expansionniste, le capitalisme peut entrer dans une phase de contraction et de récession. Aujourd’hui, le pétrole constitue pour les trente à quarante ans qui viennent une terrible arme économique.
Depuis le XXe siècle, l’or noir a été l’une des principales causes de distorsions et de guerre entre les Etats. Ces guerres ont souvent eu pour motivation le contrôle sur la production, le raffinage et la distribution.
Un rappel d’histoire : à partir de 1933, les dirigeants saoudiens, désireux de renforcer leur rang dans le monde par un grand développement économique de leur royaume, fondent l’Arabian Oil company qui donne un droit d’exclusivité aux puissances anglo-saxonnes pour exploiter le pétrole. Le capitalisme anglo-saxon dispose ainsi en Arabie Saoudite d’une manne pétrolière. Il faut alors tout pour éviter d’être évincé. Mais, des tensions très importantes dans les milieux arabo-musulmans ont toujours existé visant à chasser les infidèles : ceux qui pompent le pétrole. Des guerres de clans ont toujours existé tant au sein des grandes familles arabes qu’au sein des grandes familles anglo-saxonnes. Les guerres contre l’Afghanistan et l’Irak sont les prolongements d’une guerre nécessaire du capitalisme, pour éviter d’être dépendants des pays producteurs arabes et musulmans ou même d’être chassés de la région.
Depuis février 2011, les syriens demandent le départ de leur dirigeant, Bachar El-Assad. Le régime ne cesse de réprimer les manifestations avec une extrême violence. La défaite de l’Etat Islamique a encore aggravé la situation en Syrie, où les pays impliqués dans le conflit se retrouvent désormais face à face. Avec une attaque aérienne d’envergure contre des cibles syriennes et iraniennes, Israël entre à son tour dans la bataille.
La présence de l’Etat Islamique (EI) en Syrie brouillait les cartes. Elle donnait l’impression d’un semblant d’unité entre les différentes forces luttant contre les djihadistes. La prise de Raqqa, en octobre 2017, a eu pour conséquence de dissiper les illusions et de mettre fin aux zones tampons que l’implantation de Daesh sur le territoire syrien avait créées de facto.
Depuis le 18 février 2018, au moins 1162 civils ont été tués dont 241 enfants et quelque 2000 autres blessés par bombardements des forces gouvernementales syriennes dans la Ghouta orientale. Au Yémen, par exemple, la guerre civile a fait plus de 10.000 morts en 3 ans de conflit.
Le risque fasciste !
C’est toujours la classe au pouvoir, lorsqu’elle craint son effondrement en tant que classe dirigeante, qui porte en elle le fascisme et la guerre ! Ce n’est pas tant la nation qui porte en elle le fascisme et la guerre que la classe dominante ! Avec la crise mondiale, pour éviter de sombrer avec le capitalisme, toute une classe aux affaires peut avoir besoin de la guerre.
La guerre ou une montée en puissance de la lutte contre le terrorisme permettant aux pouvoirs de s’octroyer la totalité des outils pour réprimer, face à la crise sociale montante, les révoltes.
On serait dans le même scénario que dans les années 1930 en Allemagne.
Le pouvoir politique et la grande aristocratie capitaliste auraient recours à la répression de masse pour éviter son effondrement. Le fascisme est une guerre sociale portée par tout ou partie de la classe dirigeante, non pas pour éradiquer un capitalisme devenu parasitaire, mais pour en prendre le contrôle par un Etat totalitaire. Le glissement vers une gouvernance mondiale du capitalisme va tendre inévitablement vers un fascisme de système !
Yahya SIDIBE
Responsable Politique de compagnes et Communication
Bureau Exécutif Amnesty International Sénégal
Formateur aux Droits humains