Le mouvement hip hop sénégalais veut laisser des traces dans l’histoire.
Un projet de musée est en train d’être muri au sortir de la célébration des 30 ans du mouvement hip hop sénégalais. Une ambition qui ne va pas sans problèmes dans le milieu du rap.
Les rappeurs s’organisent pour célébrer les 30 ans du rap sénégalais. C’est dans ce cadre qu’ils se sont réunis pour tirer non seulement le bilan trentenaire du mouvement hip-hop, mais aussi se projeter sur l’avenir de leur métier. Tout d’abord, ils entendent laisser à la postérité leur héritage, en passant par la construction d’un musée. «C’est super important d’aller vers l’archivage par la création d’un musée du hip hop sénégalais. C’est important pour la postérité de léguer l’héritage du hip hop en l’archivant. Il ne sera jamais possible de parler de cet héritage sans archiver le hip hop», observe Malal Talla alias «Fou Malade» lors de la conférence de presse, vendredi, pour annoncer la célébration des 30 ans du hip hop sénégalais. Il voit à travers les 30 ans de hip hop sénégalais un patrimoine. «Beaucoup de choses se sont passées politiquement, socialement, économiquement et artistiquement. Des albums ont été réalisés, des présidents ont été vaincus, des jeunes ont été mobilisés, des projets ont été créés, beaucoup de métiers ont été appris, des articles ont été écrits. Le hip hop continue de garder sa dimension politique, sociale et économique», explique-t-il.
Selon les rappeurs, le projet de musée annoncé devra prendre forme au sortir de la célébration des 30 ans du hip hop au cours de l’année 2018. «C’est une manière de s’interroger sur le passé artistique depuis 30 ans…On a 3 000 groupes de rap dans le pays. Soit un groupe de rap pour 4 000 habitants. C’est important de penser à un projet énorme parce que, généralement, on fait de petits projets, concerts…on n’a pas quelque chose d’inclusif qui nous rassemble tous. C’est une occasion unique pour, pas forcément enterrer la hache de guerre, avoir un projet fédérateur, de s’interroger, de s’éduquer et de penser à mettre de nouveaux jalons pour le développement du secteur dans les années à venir», explique Amadou Fall Ba de l’association Africulturban, coordinateur des 30 ans du hip hop au Sénégal.
Au sortir de la célébration du trentenaire du rap sénégalais, prédit Amadou Fall Ba, l’archivage sera fait. En ce qui concerne le financement de l’événement, il avance un montant de 247 millions pour 30 activités. «Avec 20 concerts, une exposition de photos, trois albums qu’on va produire pour soutenir les artistes locaux. 12 panels de conférence, une caravane de graffiti», détaille-t-il, en ajoutant qu’aucun thème n’a été retenu. «On a voulu laisser cela pour que chacun se l’approprie», dit Amadou Fall Ba.
Pour Cheikh Sène, alias Keyti, un des pionniers du mouvement hip hop, «il est important pour un mouvement de marquer des étapes. Il faudra les marquer, les célébrer mais aussi de réfléchir, de discuter, de voir les perspectives. 30 ans de hip hop sénégalais, c’est assez énorme…parce qu’on n’avait pas parié sur la longévité du hip hop». Le rappeur constate que le rap sénégalais a évolué. Malgré tout, le positionnement du hip hop sénégalais jadis troisième mondial, est encore dans la débrouillardise. «Quand vous voulez comparer il faut avoir le baromètre. Le Nigéria est un pays qui fait 150 millions. Au Nigeria, on ne parle plus de hip hop mais de musique urbaine. Les anglophones n’ont pas les mêmes discours que les francophones. Le hip hop sénégalais se débrouille pas mal», ironise Amadou Fall Ba.
Malal Tall appelle les gens à ne pas faire l’amalgame entre les 30 ans du hip-hop et les 300 millions francs Cfa de culture urbaine. Selon lui, cet argent appartient à tous les acteurs du hip hop. Auparavant, les rappeurs veulent encore un soutien de la part de l’Etat.
Emile DASYLVA
& Mamy Aida FAYE
(Stagiaire)