Le Sénégal, à l’instar des pays musulmans du monde entier, célèbre le Maouloud, commémorant la naissance du prophète Mouhammad (Psl).
Cette fête est, aujourd’hui, bien ancrée dans l’agenda religieux national. Chaque 12 du mois de Rabi Al Awwal, Tivaouane, berceau de la Tidianiya, Thiénaba, Saint-Louis, Mpal, Médina Baye, Touba, Matam et toutes les localités du pays respirent le Maouloud placé sous le slogan de la gloire du Messager de Dieu qui a offert à l’humanité l’exemple d’un homme honnête, juste, clément, compatissant, véridique et brave.
Cette célébration dans une ambiance empreinte de spiritualité et de pure dévotion est aussi un moment opportun qui permet de rappeler les nobles préceptes de l’Islam et d’inviter les fidèles à revigorer leur foi et à s’imprégner des valeurs spirituelles et morales de la religion musulmane. Toutefois, l’institution de cette fête commémorant la nativité du Prophète est source de divergences. Certains oulémas dans le monde arabo-musulman renient cette pratique qu’ils assimilent à une « mauvaise » innovation, prétextant que le prophète ne l’a pas fait et n’a pas ordonné de le faire. D’aucuns estiment même que le fait de célébrer l’anniversaire du prophète Mouhammad (Psl) n’a aucun fondement du point de vue historique. L’Imam Serigne Mouhammedou Abdoulaye Cissé, qui préside depuis 2000 aux destinées de la grande mosquée Ihsaan de Saint-Louis, recadre le contexte dans son sens et sa place au niveau de la Charia et de la Sunnah.
Le guide de la dahira « Moutahabiina fi Laahi » estime que le sens et l’origine du Gamou trouvent ses sources d’abord dans le Coran. Dans le saint livre, explique-t-il, il a été édicté un verset dans lequel le Seigneur prie sur le prophète Mouhammad (Psl) et ordonne aux musulmans croyants de prier sur lui. Ceci, note-t-il, est un signe de commémoration de la grandeur du prophète.
De même, fait-il remarquer, le prophète a lui-même fêté son anniversaire et cela rentre dans le cadre de la Sunnah. Dans un hadith rapporté par imam Mouslim, rappelle-t-il, il est dit que le prophète Mouhammad (Psl) aimait jeuner tous les lundis. « Quand on a demandé au prophète pourquoi il jeunait tous les lundis, il a répondu que le lundi correspondait au jour de sa naissance, mais aussi au jour où il a été choisi pour être envoyé. Les intellectuels et érudits musulmans le cadrent donc sous l’angle de la commémoration de la naissance du prophète en tant que Sunnah ».
Toujours selon Imam Cissé, d’autres hadiths rapportent aussi que le prophète Mouhammad (Psl), au soir de sa vie, a fait immoler 63 chameaux et en a fait un sacrifice pour les nécessiteux et pauvres pour rendre grâce à Dieu de lui avoir donné une vie saine, de noblesse, une chargée de mission qu’il était en train de finir à l’âge de 63 ans.
« Cela était aussi un symbole de reconnaissance, de commémoration de la naissance du prophète par lui-même. De par le Coran et de par la tradition du prophète, on nous recadre dans le sens de la commémoration de la naissance du prophète qui est une question d’ordre de la Charia et de la Sunnah et non d’ordre confrérique comme le prétendent beaucoup d’individus », affirme-t-il.
Contrairement aux pays arabo-musulmans, le Maouloud au Sénégal a été propagé par Seydi Hadji Malick Sy, fervent disciple de la voie Tidiane du vénéré Cheikh Ahmet Tidiane Chérif. Et le saint homme a également instauré les nuits du « Bourde » qui constituent le premier acte de cette commémoration. La lumière du Sceau des prophètes ayant resplendi au mois de Rabi Al Awwal, il y eut beaucoup de controverses autour de la date exacte de sa naissance. « Seydi Hadji Malick Sy, le sage, l’intellectuel, l’unificateur, l’érudit, le savant, le pôle dans le Soufisme, le saint homme, a reçu comme une inspiration divine de commémorer la naissance du prophète pendant les dix nuits où il y a eu des divergences. Comme un pêcheur qui jette son filet, il a demandé aux fidèles de se retrouver les dix nuits dans les mosquées, dans les Zawiyas, sous les tentes, pour commémorer la naissance du prophète à travers la lecture de la « Salatoul ala Nabi » afin de tomber sur la bonne date. La onzième nuit, ils se reposent et le douzième jour, le Gamou est célébré », fait savoir l’imam Serigne Mouhammedou Abdoulaye Cissé.
C’est ainsi que le vénéré El Hadji Malick Sy a instauré, aux dix premiers jours du mois de Rabi Al Awwal, la lecture des chapitres de la « Qacida Al Bourda » (poème du Manteau) du Cheikh Al Boussairi qui fut un savant, un érudit. Atteint d’une hémiplégie pendant une longue période, Al Boussairi avait une paralysie des jambes. Alité, il écrivait des poèmes d’éloges dédiés au prophète. Un soir, il vit l’Envoyé de Dieu en rêve. Ce dernier s’approcha de lui et le couvrit de son manteau. Après ce rêve, Boussairi s’est réveillé et a marché sur ses jambes. Il a alors rassemblé les vers de ce poème d’une incomparable richesse et en fit un recueil qu’il intitula Al Burda (Le manteau). « Ce sont ces vers-là que Seydi Hadji Malick Sy nous a proposés de par la richesse des paroles, la profondeur des contenus, la sincérité des textes et du fait que le prophète a agréé ces textes. Le vénéré Seydi Hadji Malick Sy nous a proposé de lire ces chansons pendant ces dix nuits en guise de prières sur le prophète, parce que ces textes rappellent la « Salatoul ala Nabi » qui présente beaucoup de bienfaits », fait-il savoir. « C’est comme si Seydi Hadji Malick n’a fait que répéter un acte concret du vénéré Cheikh Ahmet Tidiane Chérif en commémorant les nuits du « Bourda », mais aussi en lisant les poèmes agréés de l’imam Al Boussairi ». Depuis toujours, la « Burda » occupe une place de choix dans les manifestations de la ferveur islamique comme la célébration de la nativité du prophète Mouhammad (Psl).
Et cette ode sublime, glorifiant de façon incomparable le prophète, est récitée dans toutes les mosquées et « Zawiyas » et foyers religieux. Le Maouloud n’est donc pas une « mauvaise » innovation comme le prétendent certains. La commémoration de la naissance du prophète Mouhammad (Psl), l’une des fêtes religieuses les plus appréciées, eu égard à sa dimension spirituelle et religieuse, est une bonne pratique ayant une base aussi bien dans la Sunnah que dans la Charia.
C’est donc une affaire qui interpelle tous les musulmans puisqu’il s’agit d’un acte louable permettant d’honorer et de glorifier le prophète Mouhammad (Psl), l’imam des Messagers, le Sceau des envoyés de Dieu, le meilleur guide spirituel, le modèle de vertu par excellence.
Et le prophète Mouhammad (Psl) dont la vie est une invite à l’humilité, à la fraternité, au respect, à la justice et à la paix, mais aussi et surtout, à l’amour mérite bien cette glorification. Il incombe donc à tous les musulmans et au-delà à toutes les créatures de se réjouir de la naissance du prophète Seydina Mouhammad (Psl), porteur du message universel de paix, de justice, d’égalité, de tolérance et de coexistence entre toutes les religions et les cultures.
Le Soleil