C’est l’ampleur qui préoccupe. Mais, une majorité pour Benno ne fait plus l’objet de doute, même chez les plus pessimistes. Tête de liste de cette coalition, Mahammad Boun Abdallah Dionne voit plusieurs scenarii se dérouler devant lui.
Sur la base de la remontée des résultats publiés par les commissions départementales de recensement de votes, on peut, sans insulter l’avenir, prédire une majorité pour la coalition présidentielle, Benno Bokk Yaakaar. Ce qui est moins sûr, c’est l’ampleur de la victoire. Ce qui est constant, c’est que le président de la République peut espérer une majorité suffisamment confortable pour lui permettre de gouverner sans trop de vagues. Quid de la tête de file de cette campagne victorieuse ? Mahammad Boun Abdallah Dionne voit son avenir sujet à des hypothèses.
Nommé Premier ministre le 6 juillet 2014, alors que personne ne l’avait vu venir, personne n’ose miser un kopeck sur l’avenir exact de ce natif de Gossas, après la proclamation définitive des résultats du scrutin du 30 juillet dernier. Après l’acte protocolaire de démission pour faire place à un nouveau gouvernement qui peut être le même avec quelques retouches, le président de la République voit plusieurs hypothèses se dégager devant lui.
Première hypothèse : Macky Sall décide de reconduire Mahammad Boun Abdallah Dionne au poste de Premier ministre. Dans ce cas de figure, il opte pour un changement dans la continuité avec un Dionne gonflé à bloc par son équipée victorieuse et apte à poursuivre le combat pour mener la mère des batailles, la présidentielle de 2019, avec les réalisations du Pse en bandoulière. Un peu comme ce fut le cas pour les législatives. En somme, un directeur de campagne idéal pour 2019.
Deuxième hypothèse : le président de la République le décharge de la fonction «premier ministérielle» et l’envoie à l’Assemblée nationale. De tels cas de figure, l’histoire politique du Sénégal indépendant en a connus. Ce fut le cas avec Habib Thiam qui, après l’élection de légitimation de Diouf en 1983, prit la direction de la Place Soweto. Seulement, l’ancien Premier ministre de Diouf n’aura qu’une courte «durée de vie» au perchoir (1983-1984), contraint à la démission sous les coups de boutoir du tout puissant faiseur et défaiseur de carrières de l’époque, Jean Colin. C’est, en effet, suite à un projet de réforme du Règlement intérieur qui visait à charcuter son mandat que Thiam rendit le tablier. Ce fut, également, la même chose pour Macky Sall. Ce dernier, après avoir conduit la campagne victorieuse de la Coalition Sopi pour les Législatives de 2007, présidera l’Assemblée de la onzième législature. Un an après, il est obligé de se libérer de tous ses mandats et de quitter le Pds après qu’un projet de loi constitutionnelle le visant a été porté par le député libéral Sada Ndiaye.
Troisième hypothèse, Macky fait fi de tout cela et décide d’innover en créant sa propre jurisprudence. Il se susurre, dans certains cercles bien informés, que Dionne commencerait à accuser une certaine fatigue et aimerait prendre le large. Ainsi, d’une pierre, le «Patron» du Palais pourrait faire deux coups. D’abord, il décharge Dionne et le met en «réserve de la République», le temps pour l’actuel locataire de la Maison militaire, de recharger les batteries pour repartir du bon pied. Dans ce cas, Macky pourra choisir un Premier ministre plus politique, chargé de gérer la transition 2017-2019. Amadou Bâ ou Abdoulaye Daouda Diallo pourraient alors faire l’affaire. Le président de la République qui a juré, urbi et orbi, qu’il ne fera pas plus de deux mandats, pourrait, en cas de victoire en 2019, abattre ses dernières cartes et sortir Dionne de sa «réserve» pour en faire son cheval de Troie pour 2024. On en est bien loin. Mais, comme le dit l’adage, l’avenir n’est qu’un présent qui s’ignore.
Ibrahima ANNE (Walf Quotidien)