Depuis plusieurs mois, des initiatives sont prises pour tenter de réunifier le maquis du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC). Seulement, cette initiative se heurte à des obstacles majeurs liés, entre autres, à la profondeur des dissensions entre les différents chefs de guerre du mouvement rebelle.
Le maquis du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) peut-il se retrouver un jour avec une direction unifiée comme dans le temps ? Cette volonté semble de plus en plus habiter les différents responsables de la rébellion casamançaise. Depuis plusieurs mois, en effet, des tentatives d’unification des différents groupes sont menées. Selon nos sources, des émissaires du Mfdc s’activent dans cette opération qui consiste à dissiper les nuages entre les différents chefs de guerre. Car, depuis la disparition du chef historique de la rébellion, abbé Augustin Diamacoune Senghor, et même avant, le maquis du MFDC s’illustre par des problèmes internes, conséquences de la volonté hégémoniste des uns et des autres. Il s’agit aujourd’hui d’amener les différents leaders du maquis en l’occurrence, Salif SADIO, qui continue de revendiquer un statut de chef d’état-major général du maquis, César Attoute Badiatte, commandant du front sud, Ibrahima Kompasse DIATTA, dissident de Kassolole et Assambane, commandant en chef de Diakaye, ex état-major du front nord, à se retrouver. A en croire nos sources, le processus est bien lancé et concerne le groupe de contact du Mfdc, composé de grandes figures de la rébellion comme Louis Tendeng, Youssouf Coly alias «Ajina moto» et Souhaïbou Kamougué DIATTA, fondateur de Diakaye. Depuis plus d’un an, ces ex combattants transformés en colombes tentent de convaincre leurs frères du maquis sur la nécessité de taire leurs divergences et de s’engager dans une dynamique unitaire pour donner plus de chance à la paix en Casamance. Mission difficile mais pas impossible, rassure une source proche du dossier. D’ailleurs, un pas important a été franchi dans les négociations, nous rapporte la même source. En effet, après plusieurs rencontres, César Attoute Badiatte, Assambane et Ibrahima Kompasse Diatta auraient accepté de mettre un terme à leurs hostilités sur le terrain. Concrètement, les trois commandants ont demandé à leurs hommes de ne plus se tirer dessus. Il s’agit là, selon notre interlocuteur, d’une première étape dans la concrétisation de l’unité du maquis. Les discussions se poursuivent donc pour finaliser ce «projet», indispensable pour la crédibilisation de tout accord de paix dans ce conflit qui oppose le MFDC à l’Etat du Sénégal.
L’équation Salif SADIO
Que vaut un maquis unifié sans Salif SADIO? La réponse semble être dans la question. Car, depuis des décennies, Salif SADIO s’est imposé comme le leader de la branche armée du MFDC. Aujourd’hui encore, même affaibli, il semble être incontournable dans le processus d’unification du maquis et même du MFDC. Mais, la réalisation de ce projet semble se heurter à deux obstacles au moins : la question du leadership, mais surtout la haine viscérale qui pourrit les relations entre un homme et ses anciens «lieutenants».
Depuis avril 2006, les rapports entre Salif SADIO et César Attoute Badiatte frisent l’animosité. Avec le soutien de l’armée Bissau-Guinéenne, César et ses hommes lancent une vaste opération contre le quartier général du maquis. Mais, avant la chute de Baraka Manjoka, Salif SADIO et ses troupes plient bagages et rejoignent le front nord. Depuis lors, les deux hommes sont devenus les meilleurs ennemis du monde. Salif pardonnera-t-il un jour cet affront de la part d’un des sujets qui a tout fait pour avoir sa peau ? Rien n’est moins sûr. Les retrouvailles entre le chef d’état-major général du maquis et celui qui se considère aujourd’hui comme le commandant en chef du maquis entrent depuis lors dans le cadre de la fiction…militaire
Aussi, toute tentative d’unification de l’aile militaire du mouvement irrédentiste risque de se heurter à la boulimie du pouvoir de Salif SADIO. Ce dernier acceptera-t-il de sacrifier son égo sur l’autel de l’unité ? Va-t-il se mettre derrière quelqu’un ? Ce sont là les prochains défis qui se dresseront sur le chemin des «facilitateurs».
Mamadou Papo MANE (Correspondant)