Briller d’entrée sous les couleurs d’un nouveau club, ce n’est pas donné à tout le monde.
Sadio Mané l’a fait en août dernier avec Liverpool. Lors de sa première apparition avec les Reds, il a été éblouissant. L’image de lui, donnant le tournis à Callum Chambers et à Nacho Monreal pour ensuite s’infiltrer dans la surface et inscrire un but sublime, reste encore dans la mémoire de tous les fans de l’équipe de la Mersey.
L’attaquant sénégalais s’est fait remarquer face aux Gunners de la même manière que lors de son premier match avec Southampton il y a de cela deux ans. A l’époque, il venait à peine de débarquer en Angleterre après avoir fait parler de lui du côté de Red Bull Salzbourg. Quel chemin parcouru depuis qu’il a été initié au football, dans son modeste village de Sédhiou au Sénégal. Là, où il a peaufiné sa technique et connu ses premières sensations fortes balle au pied. Pour Goal, Mané a accepté de raconter son joli parcours.
” Quand j’avais 15 ans, j’ai quitté ma petite ville pour rejoindre Dakar avec mon oncle. C’est là qu’il y avait des sélections, se remémore celui qui vient d’être désigné 39e au classement Goal 50 de l’année 2016. Il y avait de jeunes footballeurs qui venaient de tout le pays. C’était bien organisé. Je n’oublierai jamais ce soir-là. Aujourd’hui, j’en ris, mais à ce moment-là, il y avait un vieil homme qui me regardait comme si je n’étais pas au bon endroit. Il m’a demandé : “tu es venu faire des essais avec ces chaussures et ce short ?!”. Je lui ai répondu que c’était les meilleurs habits que j’avais et que tout ce que je voulais c’était jouer et montrer de quoi j’étais capable. Ensuite, je suis entré sur le terrain et j’ai pu voir la stupéfaction dans ses yeux. Il est venu vers moi et m’a dit : “je te prends, tu vas jouer dans mon équipe”. Et c’est là que j’ai été invité à rejoindre l’académie”.
Pour qu’un joueur Sénégalais quitte son pays pour rejoindre l’Europe, il doit passer par de très nombreuses étapes. Il y notamment l’escale au centre Generation Foot, par lequel ont aussi transité Diafra Sakho et Papis Cissé . “Aussi longtemps que je me souvienne, je me rappelle que j’ai toujours eu un ballon dans mes pieds, poursuit Mané . Je le prenais partout où j’allais. J’ai commencé dans les rues. Ensuite, j’ai commencé à aller voir les matches, en particulier lorsque l’équipe nationale jouait. Je voulais voir mes héros et m’imaginer à leur place. Il y avait une énorme excitation au pays en 2002 durant la Coupe du monde quand le Sénégal a atteint les quarts de finale. Et à l’époque, je ne pensais déjà qu’au football”.
“Dans mon village, tout le monde me disait que j’étais le meilleur. Mais, dans ma famille, on n’était pas très foot. La religion occupait une place à part et ils voulaient un destin différent pour moi. J’ai commencé à les convaincre que je pouvais percer dans ce domaine quand je suis parti pour Dakar. Au début, ils ne l’acceptaient pas mais à partir du moment où ils ont pu mesurer ma volonté de réussir, ils m’ont aidé. Mon oncle m’a été notamment d’une très grande aide. Et il n’était pas le seul au début”.
“Quand je suis parti pour Dakar, j’ai vécu avec une famille que je ne connaissais même pas. Ils m’ont accueilli, pris soin de moi et ont tout fait pour que ne pense qu’au football jusqu’à ce que je parte à Metz”.
Avant qu’il ne quitte Salzbourg pour l’Angleterre en 2014, Mané a eu une offre énorme du Spartak Moscou. Il y avait une très belle opération financière à la clé. Mais, l’argent n’était pas son moteur. Soucieux de surtout réaliser une belle carrière sportive, il espérait que le Borussia Dortmund, qui le suivait également, puisse concrétiser l’intérêt qu’il avait à son égard . “J’étais si excité, dévoile-t-il . Je ne pouvais pas y croire. Je pensais pouvoir aider cette équipe, qui était déjà si performante. Je m’étais habitué à les voir chaque fois à la télé”. Au final, il n’y a pas eu d’accord trouvé avec Salzbourg. Mais, la réunion avec Jurgen Klopp n’était que partie remise.
“Ça ne s’est pas fait, c’était frustrant. Mais c’est la vie. Rien n’arrive facilement. Je me suis dit qu’il fallait juste que je continue à travailler. Que quelque chose de grand allait forcément finir par se produire. Et c’est ce que j’ai fais. Je suis allé à Southampton. J’ai continué de bien jouer et Klopp s’est de nouveau intéressé à moi. Aujourd’hui, je suis extrêmement chanceux de jouer sous les ordres d’un des meilleurs entraineurs au monde. Je suis très content de pouvoir apprendre de lui chaque jour au quotidien”.
Lorsqu’il a marqué son but contre Arsenal à l’Emirates Stadium, Mané est allé directement se jeter dans les bras de Klopp. Une scène qui a trahi tout l’attachement que porte le joueur pour son manager. Une recherche d’affection parce qu’il a quitté les siens trop vite ? “J’étais très jeune et ce n’était pas facile de quitter tout ce que j’avais. Ma famille m’a beaucoup manqué, et en particulier ma maman et ma sœur. Mais être footballeur est tout ce que je voulais. Et je savais que ces moments difficiles allaient m’aider à réaliser mon rêve. Il y a beaucoup de gens qui ont grandi avec moi, qui étaient de meilleurs athlètes que moi, mais qui n’ont pas eu la chance de percer. Je savais que les étapes difficiles allaient m’aider à réussir. Aujourd’hui, je suis là, sans regret et je réalise mon rêve”.
À Anfield, Mané a surpris par sa rapidité d”adaptation. Outre sa relation particulière avec Klopp, qu’est-ce qui explique cette intégration réussie ? “L’une des qualités qu’un footballeur peut avoir c’est de ne pas trop réfléchir. Spécialement, quand on arrive dans un club tel que Liverpool. Moi, dans ma tête, je savais que j’arrivais dans un club qui me voulait et que le coach me connaissait très bien. Et je suis venu ici pour travailler dur et aussi aider. C’est sur quoi je me suis concentré. Que les choses se passent bien ou mal, j’aurai fait de mon mieux. Aujourd’hui, je suis très heureux de faire partie d’une équipe aussi talentueuse où chacun travaille pour l’autre. Être entouré de très bons coéquipiers, ça aide”.
En se retournant aujourd’hui, Mané mesure tout le chemin qu’il a accompli depuis ses débuts comme footballeur :“Quand tu es un jeune garçon, tu crois tout savoir du football. Tu veux faire les choses à ta façon. Mais j’ai appris tellement de styles de jeu différents, de tactiques différentes et aussi à comment être un joueur plus complet. Tous les coaches que j’ai eus depuis l’académie m’ont énormément apporté. Je suis quelqu’un qui est toujours à l’écoute et qui aime apprendre. Je suis encore jeune et j’ai toujours envie de m’améliorer. Chaque jour est une nouvelle chance de travailler dur pour se donner de meilleures chances de réussir”.
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