Depuis le jeudi 21 janvier 2016, le Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne et son gouvernement n’ont pas mis les pieds à l’Assemblée nationale. Alors que le chef du gouvernement avait prévu de s’y rendre tous les quinze jours. Mais depuis dix mois, M. Dionne snobe les députés. Il a déserté l’Assemblée nationale. Et tout d’un coup, Mahammed Boun Abdallah Dionne est subitement pris d’une envie de répondre aux questions d’actualité ce qu’il n’a pas fait depuis belle lurette. Il va à la représentation nationale au moment où le président Macky Sall et son frère sont pris dans la tourmente du pétrole et du gaz récemment découverts au Sénégal et plus particulièrement dans ce qu’il est convenu d’appeler le scandale Pétro-Tim.
Ils sont acculés par l’opposition et la société civile qui exigent des explications sur l’attribution des permis de recherche et d’exploitation d’hydrocarbures liquides et gazeux à la société Petro-Tim Ltd qui n’a pas les ressources financières et techniques et qui a cédé des parts à Kosmos, un géant américain. En effet, l’article 8 de la Loi 98-05 du 8 janvier 1998 portant Code pétrolier stipule: «Nul ne peut être titulaire d’un titre minier d’hydrocarbures ou d’un contrat de services s’il ne justifie pas des capacités techniques et financières nécessaires pour mener à bien les opérations pétrolières».
Abdoul Mbaye demande au président de la République s’il connaissait la relation «particulière» existante entre son frère Aliou Sall et la société Petro-Tim avant la signature des décrets qui portent approbation du Contrat de recherche et de partage de production d’hydrocarbures conclu entre l’Etat du Sénégal, Petrosen, Petro-Tim Limited pour les blocs de Saint-Louis Offshore Profond et Cayar Offshore Profond. Mamadou Lamine Diallo, le leader du mouvement Tekki, exige de Macky Sall en personne la lumière sur l’attribution de licences d’exploitation à des sociétés jugées proches de son frère. «M. le président, dites-nous qui sont les vrais actionnaires de Petro-tim et Timis Corporation qui détient à ce jour 30 % sur les 450 milliards de gaz naturel au Sénégal», dit-il. Ousmane Sonko, le leader de Pastef, accuse le frère du président de la République de fraude fiscale dans cette affaire.
En exécutant fidèle, prêt à défendre celui qui l’a sorti de l’anonymat, le Premier ministre est monté au créneau le mardi 20 septembre dernier pour apporter des réponses à ces accusations. Mais de l’avis de beaucoup d’observateurs, Mahammed Boun Abdallah Dionne n’a pas convaincu les Sénégalais. D’ailleurs, l’opposition a manifesté le 14 octobre dernier pour «exiger une bonne gestion» des ressources naturelles. «Il a cherché à laver à grande eau Aliou Sall», accuse le leader de Pastef.
C’est dire que le Premier ministre a, à travers son retour au Parlement, une nouvelle tribune pour faire sa seconde opération de lavage d’Aliou Sall. En effet, les questions des députés ont été soigneusement sélectionnées par le bureau de l’Assemblée nationale. Et celles jugées embarrassantes par le pouvoir sont écartées. (Voir par ailleurs)
Car les Sénégalais n’ont retenu de son discours que les menaces faites aux opposants. Il a menacé d’envoyer en prison Abdoul Mbaye, Ousmane Sonko, Birahim Seck du Forum civil, bref tous ceux qui fouinent dans le pétrole et le gaz. Des menaces que Frank Timis veut mettre en pratique. Il a commis un avocat et a décidé de porter plainte contre des leaders de l’opposition.
Charles Gaïky DIENE