Le Sénégal occupe la 13e place des pays producteurs d’or en Afrique. Mais, paradoxalement, les nationaux ne voient pas le métal précieux. Car, l’essentiel de la production est exportée. Ainsi en 2013, 9 tonnes d’or à l’état brut sont sorties du pays. Du coup, les Sénégalais ne voient ni l’or, ni l’argent de l’or.
La société Sabadola Gold Opération (Sgo), qui exploite l’or au Sénégal, vient de publier son rapport sur sa Responsabilité sociétale d’entreprise (Rse). En 2016, la production de Sgo a battu un record, de l’aveu même de son directeur général. «On avait un objectif de produire entre 200 et 230 mille onces en 2015. En 2014, on avait produit 212 mille onces», affirme Abdou Aziz Sy. Ainsi, le Sénégal est un grand pays producteur d’or. Notre pays occupe aujourd’hui la 13e place de producteur d’or en Afrique, selon Sidy Diop. Ce dernier qui présentait, en avril 2015, une étude sur les mines, lors de l’ouverture d’un colloque international sur Les enjeux du secteur minier au Sénégal, ajoute que notre pays, qui a commencé à exploiter son or en 2009, figure, aujourd’hui, parmi les principaux pays producteurs d’or en Afrique de l’Ouest. Mais on se demande souvent où va la production nationale, car les acteurs économiques sénégalais, les bijoutiers principalement, sont unanimes. Ils affirment qu’ils ne voient toujours pas le métal précieux.
Et pour cause, la quasi-totalité de la production est exportée. «En 2013, neuf tonnes d’or à l’état brut ont été exportées. La quasi-totalité de la production», notait Sidy Diop.
Pourtant, le président de la République avait donné des «instructions fermes» pour qu’une partie de la production soit vendue dans le marché local.
Ces instructions du chef de l’Etat, le directeur des Mines et de la Géologie, Ousmane Cissé, qui est revenu, avant-hier, sur l’accord entre le gouvernement, la société et les bijoutiers, les a rappelées. Mais ces «instructions fermes» laissent de marbre Sgo qui exporte l’essentiel de la production nationale. Les entreprises sénégalaises évoluant dans l’informel ne voient pas le lingot. Un tour au marché Tilène de Dakar permet de faire le constat. A l’arrière de chaque comptoir, il y a un siège fourni. Les marchands et bijoutiers sont à l’aise. Il y a une tablette, un boitier dans lequel il y a la «pierre de la foudre» et un flacon qui contient un liquide. Le bijoutier Pape Kassé explique que la pierre permet de savoir s’il s’agit d’or authentique. Il suffit de frotter la pièce d’or ou d’argent sur la pierre jaunie et violâtre, puis d’appliquer une goutte sur la pierre.
Mais à l’instar de ses collègues, Kassé ne voit pas l’or de Sabadola. Ainsi, il recycle les bijoux des clients qui décident de les revendre. Ce qui est risqué pour lui, car il peut acheter ce qui a été volé.
C’est pourquoi, les marchands veulent un comptoir pour faciliter l’achat de l’or. Ils ne voient pas l’or de Sabadola. A les en croire, les hommes d’affaires sénégalais qui achètent l’or de Sabadola l’exportent dans des pays où la pierre précieuse se vend bien. Les bijoutiers sentent une baisse de leurs chiffres d’affaires. M. Kassé révèle qu’il faisait trois à quatre millions de francs Cfa par jour.
Lors de la présentation du rapport de Sabadola Gold opération, le député Abdourahmane Mbodj, membre du réseau parlementaire pour la bonne gouvernance des mines avait plaidé pour que les bijoutiers aient une partie de cet or produit au Sénégal. Mais le Dg de Sgo, Abdoul Aziz Sy, évoque des contraintes fiscales. A l’en croire, ils pourront accéder à l’or si l’Etat décide d’exonérer la taxe. Selon lui, Sgo est prête à approvisionner le marché local si elle bénéficie de plus d’exonérations fiscales. «L’or qui sera vendu sur le plan local tiendra compte de la Tva, même si la société fait 5 % de décompte», dit-il.
A en croire le directeur des Mines, il faut des discussions pour revoir l’exonération de la taxe au profit des sociétés et des bijoutiers sénégalais. Mais, en attendant, les Sénégalais sont obligés de se rabattre sur le produit importé de la Chine, de Dubaï, de la Guinée, du Togo, de la France.
Emile DASYLVA (WALF Quotidien)