CHRONIQUE DE MAREME
« L’amour c’est ni raisonnable ni raisonné. C’est une évidence, une intuition», Anne Bernard
Marianne Cissé : le retour
J’avais tellement hâte de le voir que je ne suis pas passé par la maison pour me changer. Trois mois que j’ai voyagé et ce con ne m’a même pas rappelé. C’est vrai qu’on s’est grandement disputé la dernière fois qu’on s’est vu mais comme à chaque fois, je croyais qu’il allait faire le premier pas. Maintenant que je l’ai surpris avec cette fille, je comprends le pourquoi de ce silence. Assis sur ce fauteuil en face de la fille, il avait le même regard de désir qu’il me faisait autrefois. J’essaye de contenir ma colère au maximum en attendant que cette souillon sorte du bureau. Malick essaye de la suivre et je décale d’un pas pour le retenir en lui faisant un œil vert de rage. Il me connait assez bien pour savoir le scandale que je vais lui faire s’il tente ne serait – ce qu’un pas vers elle. Affolé, il lève juste la main et crie à peine son nom. Quand cette fameuse Aicha ferma la porte, Malick se tourna vers moi.
- C’est quoi ce cinéma que tu viens de me jouer là ?
- Qui est cette fille ?
- Personne et à l’avenir frappe avant d’entrer et surtout ne me fait plus de bise. Nous ne sommes plus ensemble, d’accord ? Cria-t-il. Ses yeux lançaient des éclairs et une veine venait de danser sur sa mâchoire.
- C’est à cause de cette poubelle que tu ne veux plus de moi ? C’est la meilleure, est-ce que tu m’as vu ?
- Oh que oui et si tu crois que c’est la beauté qui m’attire chez une femme, tu te trompes lourdement.
- Pas ça avec moi, c’est cette beauté qui t’a charmé jusqu’à te faire baver il y a un an. Toi et moi, on se ressemble, nous sommes beaux, riches, doués dans notre métier et nous savons tirer profit de nos charmes. Toi comme moi, personne ne nous résiste c’est pourquoi c’est si torride et volcanique entre nous deux.
- Plus maintenant Yanne, tout ça c’est fini depuis longtemps. Au début c’était bien de jouer au chat et à la sourie mais maintenant ça ne m’amuse plus.
- On en reparlera ce soir car je t’ai apporté une belle surprise. Je m’approche de lui et enlace mes bras autour de son cou. Une once de désir traverse ses yeux.
- Désolé, je ne suis plus intéressé.
- Je te connais mieux que personne bébé, je sais ce qui te fait vibrer et comment t’envoyer au septième ciel alors arrête de jouer aux durs. Je t’attends chez moi. Il ouvre la bouche, je mets mon doigt dessus. Chut, j’ai envie de rattraper les mois perdus alors arrête tes enfantillages, je t’attends à la maison à 18h. Je tourne les talons en lui lançant, n’oublie pas d’amener le diner. Je referme la porte tellement énervée que j’ai dû me contenir pour ne pas crier. Qui est cette fille ? Elle est mignonne mais nous ne boxons pas dans la même catégorie. Avec son habillement ringard et bon marché, elle ne doit pas être riche. Elle ne m’arrive pas à la cheville et maintenant que je suis là, je vais vite l’effacer de la carte. Au moment où j’appuie sur le bouton de l’ascenseur, les portes s’ouvrent…
- Marianne, depuis quand tu es de retour ?
- Bonjour Suzanne, je viens à peine d’arriver et j’ai constaté un laissé aller à mon absence. Elle me regarde malicieusement avant d’éclater de rire.
- Ah bon ? J’espère que ce n’est pas de mon côté car….
- Qui est cette minette Suzanne et depuis combien de temps dure cette relation ?
- Ce n’est pas à moi de te répondre ma chère alors ne te fatigue pas.
- Je sais que tu ne m’as jamais aimé et c’est réciproque alors qui que ce soit dit lui qu’il serait de son intérêt de ne pas se mettre au travers de mon chemin. J’entre dans l’ascenseur avec un grand chipatou et appuie sur le bouton. Avant que les portes ne se referment, je vois son sourire moqueur. Je déteste cette femme chime.
Je quitte l’immeuble plus remontée que jamais. Ma sœur m’a toujours dit que je finirais par perdre Malick si je continuais mes caprices. Il y a un an, il m’avait demandée en mariage, à cette période il était fou de moi. Nous venions de boucler nos deux mois de relations intenses. J’ai accepté à condition qu’il quitte sa femme. Car pour moi, il était hors de question de partager mon homme. Croyant que Malick, comme tous les autres hommes, étaient fous de moi, prêts à tout, j’ai vite déchanté. Du jour au lendemain, il a arrêté de m’appeler et de venir chez moi. Je l’ai snobé pendant plus de deux mois pensant qu’il allait revenir vers moi en rampant. Au contraire je me suis retrouvée en train de courir derrière lui. Il faut dire que Malick n’est pas comme les hommes faibles que j’ai connus. Même s’il en bavait pour moi, il était hors de question pour lui de me supplier. Notre relation est devenue complexe, tantôt on se quittait, tantôt on se réconciliait. Finalement, avant que je ne parte à l’étranger, nous avons décidé d’un commun accord de nous séparer. Mais durant ce temps loin de lui, j’ai compris que je l’aimais plus que tout au monde et que j’étais même prête à devenir sa seconde épouse. Maintenant voilà que je le retrouve dans son bureau avec cette pimbêche. Plus vite il sera là et plus vite il l’oubliera jusqu’à son nom.
Suzanne : le calmant
Mon cœur a fait un bon quand l’ascenseur s’est ouvert. Marianne en chair et en os, bonjour les problèmes. Je n’ai jamais aimé cette femme avec sa beauté dévastatrice. Elle est métisse puisque sa mère était un mannequin français. Quant – à elle, elle a repris les flambeaux de la société de son père depuis presque deux ans. Malick a toujours était l’avocat de ce dernier et c’est comme ça qu’ils se sont connus. Ce jour-là, Marianne était accompagnée de son père qui voulait la présenter en personne et l’imprégner des affaires qu’il avait en cours avec le cabinet. C’est la plus grande société textile de toute l’Afrique et leurs tissus se vendaient dans tous les pays du monde. Dès qu’elle est arrivée, elle a jeté son dévolu sur Malick qui a essayé tant bien que mal de lui résister. Mais cette femme est tellement belle que même les filles se retournent sur son passage alors le pauvre n’a pas tenu très longtemps. En plus elle est hyper intelligente et douée dans ce qu’elle fait donc c’est très facile de tomber sous son charme. Mais je ne l’ai jamais portée au fond de mon cœur car mis à part le fait qu’elle soit très effrontée, c’est une femme fatale. Le genre de femme qui adore manipuler et charmer les hommes. Idrisse et Malick lui plaisaient et qu’importe qu’ils soient collègues ou pas. Je voyais nettement comment elle jouait sur les deux tableaux. Et c’est à cause d’elle qu’Idrisse déteste tant Malick parce qu’il était fou de Yanne. Je suis sure à 100 % qu’elle est sortie avec Idrisse et quand Malick est tombé sous son charme, elle a rejeté le premier. Ils sont sortis ensemble deux mois et quand Malick a voulu finaliser leur relation elle lui a imposé le divorce. C’est à partir de là que Malick a commencé à découvrir le vrai visage de cette femme et que les problèmes ont commencé. Même s’il est retombé une ou deux fois dans ses filets, il m’a dit il y a trois mois que s’était définitivement fini et je le crois.
Quand je quittais Malick, il était en train de dresser une table pour lui et Aicha. Je me demande ce qui s’est passé ? Ce que j’ai vu ce matin va au-delà de la simple attirance. Il y a des regards qui ne trompent pas et cette alchimie est si forte entre ces deux qu’on avait l’impression qu’ils étaient seuls au monde dans ce couloir. J’espère seulement que le retour de la diva ne va pas les empêcher de vivre leur amour naissant. Aicha aura dû résister un mois encore comme ça j’aurai mon 4X4. A vrai dire c’est ce qui m’a énervé ce matin, lol.
En dépassant le bureau d’Aicha, j’entends la voix de Malick. La porte est entre-ouverte alors je m’approche doucement.
- Je te jure Aicha qu’il n y’a rien entre cette femme et moi. Cette dernière lève les yeux de son ordinateur et même moi je frissonne sous son regard de braise. Malgré son jeune âge, elle a un fort caractère et un tempérament de feu.
- Tu n’as pas d’explication à me donner, c’est ta vie alors…
- Si je n’ai pas réagi à sa bise c’est parce que j’étais trop surpris mais….
- Encore une fois ta vie privée ne me regarde pas alors sors d’ici s’il te plaît dit – elle d’une voix calme, trop calme.
- Ne laisse pas ce petit malentendu nous séparer encore, je…
- Sort de mon bureau cria-t-elle avec hargne jusqu’à me faire sursauter. Malick la fixe un moment avant de tourner les talons. Nos regards se croisent et je me retourne en courant.
- Maintenant tu écoutes aux portes dit-il au moment où j’atteignais mon bureau.
- Je crois que ce n’est pas la peine que je demande si ça c’est bien passé.
- Piff, pire que la poisse ? Les épaules affaissées, les yeux tristes, la démarche lente, il se dirigea vers son bureau en maugréant. Je le suis en fermant le bureau. Il s’assoit sur son fauteuil avec découragement.
- Elle vient à peine de s’ouvrir à moi et voilà qu’apparait Yanne. Elle va penser que je suis un tombeur.
- J’imagine, mais ne t’inquiète pas, dès demain sa colère va s’apaiser et tu pourras lui parler calmement. Il se relève de son fauteuil et reprend les cents pas
- Durant cinq ans Suzanne, je me suis créé une fausse image d’elle pour supporter sa perte. Aujourd’hui que je connais la vérité, mes sentiments se sont quadruplés, c’est comme s’ils ont toujours été là et qu’ils se cachaient, attendant qu’on les ravive.
- Si je t’entends bien, elle t’a parlé de son passé.
- En partie oui et tu ne peux imaginer à quel point je m’en veux d’avoir été si injuste envers elle. Je ne lui ai jamais laissé le bénéfice du doute au contraire je l’ai jugée, rejetée et insultée. J’ai faussé sur toute la ligne Suzanne.
- Ce n’est pas pour rien que l’on dit que l’amour rend aveugle. Quand une personne te plait, toutes tes émotions positives et négatives se multiplient par 10. On n’arrive plus ni à réfléchir ni à se contrôler, alors faire des erreurs devient facile.
- Le pire est que je me suis laissé berner par ce salaud. Il me raconte ce que le maire avait fait jusqu’à arriver à la marier de force. Je n’ose pas imaginer l’enfer qu’elle a dû vivre avec cet homme continue-t-il en couvrant son visage de ses mains. Malick n’a pas l’habitude de perdre autant son sang-froid, le voir dans cet état me montre à quel point il tient à cette fille.
- Attend, je vais aller tâter le terrain pour voir et je te reviens. Quand je sors Daouda vient d’arriver de sa pause, je le dépasse sans dire un mot. Il lève un cil interrogateur mais je ne lui réponds même pas. L’heure de la plaisanterie est révolue. Dès que j’entre dans son bureau, Aicha attaque.
- Vous aviez raison ce matin, cet homme est un vrai coureur de jupons, shim.
- Il n’y a plus rien entre lui et Marianne et ça depuis trois mois.
- Vous êtes dans quel camp vous ? Faudrait vous décider, tantôt vous me conseillez de faire attention, tantôt vous le défendez.
- Les donnes ont changé, d’ailleurs, ça change tout le temps entre vous deux. Malick ignorait tout de ton passé et il a fait la bêtise d’écouter un rival. Alors ne fait pas les mêmes erreurs que lui, l’apparence est souvent trompeuse et Marianne est pire que ton défunt mari.
- Vous êtes quoi pour lui ? Sa secrétaire, son amie, quoi ? Vu qu’il vient de vous rapporter ce que je lui ai dit, il va falloir que je fasse attention à ce que je dis.
- Notre relation va au-delà du simple employé/patron, il m’a sauvé la vie quand j’étais au plus mal en point. Alors oui, c’est mon ami mais je sais faire la part des choses. Jusqu’à hier, je pensais sincèrement qu’il n’avait pas de sentiment pour toi mais là où je te parle ma vision est tout autre. Elle secoue la tête avant de me répondre.
- En regardant cette femme lui faire la bise, je me suis sentie tellement mal que je me suis mise à la place de celle avec qui il est marié. Mon père me dit souvent, il ne faut jamais faire à autrui ce que tu ne veux pas qu’on te fasse. Avant de revoir Malick, j’en avais fini avec les hommes et je ne m’en portais que mieux.
- Il tient à toi Aicha, beaucoup plus que tu ne le penses. Hier c’était lui, aujourd’hui c’est toi car tous les deux vous avez eu peur de ce sentiment si fort que vous ressentez quand vous êtes ensemble. Je l’a vois essuyer rageusement une larme qui venait de tomber.
- Mon passé est trop lourd et je ne sais pas si je suis prête à supporter un homme à femmes.
- Je ne vais pas insister mais je voudrais que tu me répondes sincèrement. Est-ce que durant ces cinq années loin de lui, tu l’as oublié ? Elle se tait une minute avant d’oser me répondre
- Non, il m’est arrivé souvent de penser à lui mais là n’est pas le problème, je…
- Un auteur appelé Foozine disait : « Le vrai amour est tellement difficile à trouver, si facile à perdre et presqu’impossible à complétement oublier ». Vous ne vous êtes jamais assez approché l’un à l’autre pour mieux vous connaitre car à chaque fois, pour une raison ou pour une autre, vous vous êtes éloignés.
- J’ai si peur de souffrir.
- Le bonheur se trouve dans la souffrance, accepte que ton passé soit une épreuve et non un handicap pour ton avenir. Aicha, je connais Malick mieux que personne et je te jure que c’est homme sensible, honnête et extrêmement généreux. Il ne ferait jamais quelque chose qui pourrait te nuire, je t’en donne ma parole d’honneur alors essaye juste un mois et tu ne le regretteras pas.
- Tu crois, demande-t-elle avec une voix pleine d’espoir.
- Je ne crois pas, j’en suis sûre Aicha. Deux grosses larmes tombent encore et elle s’empresse de les essuyer comme la première fois.
- Je ne sais même pas pourquoi je suis si émue.
- Tu es dans cet état parce que tu essayes de refouler quelque chose qui vit déjà en toi.
- Quoi ?
- L’amour Aicha, l’amour répétais-je. Elle fait une grimace avant de me sourire.
- Comment je peux aimer un homme que je connais à peine. C’est impossible.
- Si ça peut te réconforter, il est dans le même état que toi. Depuis dix ans, c’est la première fois qu’une femme le bouleverse autant. Vous vous êtes aimé dès le premier regard ; on ne choisit pas d’aimer, c’est un sentiment qui vous tombe dessus sans crier gare et quand on essaye de le repousser, il vous anéantit. La seule solution c’est de le vivre sans réfléchir, juste le vivre.
- Quand on vous écoute c’est tellement simple.
- Peut-être que c’est parce que il m’est arrivé la même chose avec mon mari et aujourd’hui je ne regrette pas d’avoir ouvert une deuxième fois mon cœur. Dépasser ses peurs et prendre le risque d’aimer peut s’avérer être la plus belle chose qui nous soit jamais arrivé. Alors n’hésite plus et saute le pas. Avec mon premier amour ce n’était pas le bon, mais avec le second oui, c’est ça l’amour, une porte fermée dont on ne sait ce qu’on va trouver derrière, une aventure aveugle.
- D’accord Cupidon, dit-elle en souriant encore de plus belle. J’applaudis et me lève.
- Attends, je vais lui dire comme…
- Non, laisse-le poiroter au moins jusqu’à demain, dit-elle en ricanant.
- Méchante fille. Je me lève pour prendre congé avant qu’elle ne me lance.
- Au fait, je voudrais prendre l’après-midi pour aller à la banque retirer mon chèque et en profiter pour payer la caution de ma chambre.
- Oui bien sûr ma chérie, vas-y, il y a juste une banque derrière l’immeuble. Je lui indique l’endroit avant de la laisser avec un petit sourire.
- On recommence Mme Ping-pong, me lance Daouda quand je le dépasse. Je lui fais mon shipatou avant de rentrer dans le bureau de Malick qui continuait toujours de faire les cents pas.
- Ouf, sur ce coup j’ai fait du bon travail maintenant la balle est dans le camp monsieur Casanova.
Malick : la réconciliation
Quand Suzanne me rapporte sa conversation avec Aicha, je saute au plafond trop heureux de savoir qu’elle veut bien essayer quelque chose. Seulement, il était hors de question que j’attende jusqu’à demain pour la revoir. Je prends les clés de ma voiture et m’empresse de sortir. Dans l’ascenseur, je prends un grand air car depuis ce matin, c’est comme si l’air se comprimait dans mon cœur et Suzanne a raison de dire qu’il se passe vraiment quelque chose entre nous deux. Je ne saurais dire toutes les sensations qui m’ont traversé le corps et l’esprit entre hier et aujourd’hui. Désir, colère, pitié, tendresse infinie et surtout une envie folle de la protéger, un devoir même. Quand nos regards se sont croisés ce matin, le monde a arrêté de tourner autour de nous, comme autrefois. Suzanne nous a ramenés sur terre en nous lançant une vanne car elle venait de voir cette si forte alchimie entre nous deux ; c’était qu’une question d’heure pour que ça explose. Elle était fâchée de découvrir qu’elle venait de perdre une potentielle voiture 4X4 alors que moi je venais de me rendre compte que je risquais encore plus gros : mon cœur.
En me garant devant la banque, je n’ai plus de doute par rapport à mes sentiments pour elle et je ne veux plus réfléchir ni me chercher des excuses, pas après ce qu’elle m’a raconté. Elle est devenue ma priorité et j’ai envie de reprendre là où on s’était arrêté, il y a cinq ans. Devant l’immeuble qui abrite la banque, je l’attends, le cœur battant à cent à l’heure, la boule au ventre, je me surprends même à trembler légèrement. Je n’ai jamais eu autant de trac pour une femme, car avec elle rien n’est gagné à l’avance. Il va falloir que je mette de côté mon tempérament très macho et effronté avec les femmes pour la conquérir. Avec ce qu’elle a vécu, Aicha n’a pas confiance en la gente masculine donc il faudra que je sois très doux et compréhensif pour qu’elle s’ouvre un peu plus à moi. J’étais dans ces réflexions quand je l’ai vue sortir de la banque dans son petit taille-basse qui dessine bien si ses hanches. Dès qu’elle me voit, elle tressaille et je lui fais mon plus grand sourire en ouvrant la porte de ma voiture. Elle me fusille du regard quelques secondes avant de s’approcher de moi.
- Tu es vraiment têtu toi.
- C’est mon deuxième prénom.
- J’ai des courses à faire Malick, je n’ai pas le temps pour parler.
- Alors laisse-moi devenir ton chauffeur. Elle plisse les yeux avant de monter dans la voiture. Alhamdoulilah dis-je dans ma tête. Je contourne rapidement la voiture avant qu’elle ne change d’avis et me dépêche de démarrer. Quand je me tourne dans sa direction, je vois qu’elle est très crispée et se tient fortement les genoux.
- Détend toi s’il te plaît, je ne suis pas un monstre.
- Ca je n’en suis pas si sûr, tu as vu comme tu me regardes. J’éclate de rire.
- Et toi alors, on dirait que tu veux me manger, pauvre de moi. Elle rit à son tour et l’atmosphère se détend. Alors on va où ?
- Gueule Tapée.
- Donc finalement tu déménages ? Magnifique !
- Ce matin, j’ai fait presque trois heures de temps en route à cause d’un accident de circulation, mon père a raison, c’est trop éprouvant. Par contre ce n’est pas la peine de te réjouir car je ne t’inviterais jamais dans ma chambre Malick.
- Ah bon pourquoi ? Tu n’as pas confiance en moi ?
- Non, pas du tout.
- Ça viendra avec le temps. Je sais me retenir Aicha et jamais je ne te forcerais à faire quoi que ce soit si tu ne le veux pas.
- Quand un homme et une femme sont seuls dans une chambre, Satan devient leur troisième compagnon. La tentation est très forte pour deux personnes qui sont très attirées l’une à l’autre alors mieux vaut ne pas créer des conditions pour ça. La fornication est interdite par Dieu, l’adultère encore plus. J’éclate de rire sans le faire exprès mais quand je la regarde, mon sourire se fige de suite sous son regard courroucé.
- Tu blagues ?
- Est-ce que j’ai l’air de blaguer articule-t-elle entre ses dents. Je ne sais même pas pourquoi je suis entrée dans cette voiture. Tu es un noceur Malick ; alors que moi, je n’ai pas besoin de ce genre d’homme dans ma vie.
- Tu ne me connais pas Aicha alors…
- Ce que j’ai vu au resto il y a un mois et aujourd’hui avec cette femme me suffisent amplement à te cataloguer.
- Tu es en train de faire la même erreur que moi il y a cinq ans. On devrait arrêter de nous juger à tour de rôle et apprendre à se connaitre. Alors pour ta gouverne, je suis une personne qui respecte toujours le bon vouloir de son partenaire. Si pour des raisons d’éthique et de religion, tu ne veux pas coucher avec moi alors je n’essayerais même pas. Je lui prends la main et lui fais une bise. Je me contenterais des préliminaires.
- Tu n’auras pas une bise, aucune caresse ni un câlin. Le feu venait de virer au rouge, j’en profite pour me tourner vers elle et la regarder intensément.
- Tu peux toujours courir ma chère et c’est toi-même qui va me le réclamer lui répondis-je en caressant du bout de mon indexe sa lèvre inférieur.
- Tu… heu…. crois, elle n’arrive plus à parler parce que je descendais tout doucement mon petit doigt sur son cou, son bras…Klaxon. Je redémarre et nous restons ainsi dans le silence jusqu’à notre arrivée à la Gueule Tapée. Elle appelle ensuite une personne qui nous guide jusqu’à un immeuble de trois étages. On nous fit visiter trois chambres avec douche à 40 mille francs. Je les ai trouvés très petites et je ne pus m’empêcher de demander s’il y avait au moins des studios dans l’immeuble.
- Je n’ai pas besoin de studio Malick, la chambre me convient amplement.
- Tu as un bon salaire Aicha. Pourquoi vivre dans une si minuscule chambre. Je me tourne vers le gars qui nous faisait le guide. Est- ce qu’on peut voir ce que vous avez. Le gars me sourit avant de nous faire signe de le suivre. Aicha qui jusque-là évite tout contact physique avec moi, s’approche rapidement de moi et me tire le bras vers l’arrière en lançant au gars.
- Excusez-nous un instant. Le gars fait oui de la tête et à mon grand bonheur ferme la porte.
- Oui bébé dis-je en entourant mes mains autour de sa taille. Peut-être que c’est trop tôt pour elle mais je ne peux pas m’empêcher de la toucher, elle est comme un aimant et moi l’acier. Quand je resserre mon étreinte, elle tressaille et commence à bégayer
- Heu, je ne peux pas me permettre de prendre un appartement ou un studio, alors arrête.
- Pourquoi lui murmurais-je ?
- Ce serait trop pour moi, si je devais payer un appartement car la situation de mes parents est un peu précaire et j’ai promis de les aider. Je la regarde avec admiration et l’enlace encore plus.
- L’argent n’est pas un problème Aicha, tu…
- Chi ne continue pas dit-elle avec empressement. Je lève les mains
- Où est le problème, tu es ma petite amie et…
- Depuis une heure et monsieur veux payer mon loyer et puis quoi encore. Ton argent ne m’intéresse pas et si tu ne veux pas qu’on se fâche, ne me fais plus ce genre de proposition fini-t- elle en tournant les talons. Je reste un moment debout sur place essayant de refouler cette colère qui se pointe. Elle commence sérieusement à m’énerver avec son tempérament de feu. Je n’ai pas l’habitude d’être remis à ma place, seul mon père le faisait du temps de son vivant. En la rejoignant, je la trouve en train de payer la caution.
- Je t’attends à la voiture. Elle me regarde bizarrement et me rejoint rapidement. Je démarre sans dire un mot ni regarder vers sa direction.
- Je t’amène où ?
- Tu es fâché ?
- Non répondis-je d’un trait.
- Alors pourquoi tu ressembles à un zombie. Je pouffe de rire avant de me tourner vers elle et son beau sourire fit dissiper le reste.
- Sacrée fille, on va où maintenant.
- Je voulais aller au marché avec toi, mais avec ta tête de riche là, les vendeurs vont multiplier les prix par dix. Tu sens l’argent à 1 000 lieux d’ici. J’éclate encore de rire.
- C’est quoi la solution alors ?
- Qu’on se dit au revoir jusqu’à lundi et…
- Jamais, il est hors de question de se quitter, il n’est que 16 h Aicha. Tu as demain pour faire tes courses et dimanche, je t’aide pour le déménagement.
- Tu oublies que demain je dois faire visiter à la femme de ton client Emire…
- Je n’ai pas confiance en lui quand il s’agit de femme alors j’ai déjà fait appel à une bon guide. S’il te plait juste un pot, murmurais-je en lui faisant les yeux doux. Elle me sourit en remuant la tête.
- On va où ?
- Il y a un resto tout prêt d’ici et qui est en face de la mer, tu vas adorer. Elle se recroqueville encore sur elle-même et tourne le visage sur la route. Je sentais qu’elle n’a pas vraiment confiance en moi et pour cause.
Aicha est subjuguée par la beauté de l’endroit, elle regarde à gauche et à droite et moi je me délecte de ses faits et gestes qui me procurent un plaisir sublime. Nous nous installons sur la terrasse dans un moelleux fauteuil en cuir blanc et où nous avions une vue panoramique sur la mer. Le caractère enchanteresse de ce lieu a joué son charme et Aicha s’est détendue quelques minutes après. Naturellement nous entamons des sujets sur la vie, elle se blottit contre moi et je m’ouvre à elle. A un moment, son portable sonne, elle décroche. Comme elle était blottit sur moi, j’ai entendu une voix d’homme. Mon cœur fait un bon et j’ouvre encore plus mon ouïe.
- Qu’est – ce que tu veux ? L’homme parle encore. Elle sourit et continue, je te connais, je sais pourquoi tu m’appelles curieux va. Si tu veux savoir, il est juste à côté de moi. Si tu voyais l’endroit de rêve où je suis. Je ne sais pas ce que le gars lui a dit mais elle a éclaté de rire avant d’ajouter. Ne t’inquiète pas, il n’a encore rien tenté, bon je te laisse on se voit tout à l’heure. D’accord, je ferais attention. Elle raccroche et me lance, c’est Menoumbé avec son éternelle jalousie. Ce n’est pas seulement lui qui est jaloux pensais-je.
- Tu vas faire attention par rapport à qui ?
- Devine et nous reprenons là où on s’était arrêté c’est-à-dire ma famille. Elle m’a demandé si j’avais des photos sur moi. Sans réfléchir j’ai sorti mon portable et je lui ai montré tout un album. Elle ne dit rien, sourit des fois, me fait des mimiques et moi, hyper stressé, je regarde ses moindres réactions. Dans certaines photos, il y avait moi et Abi et on semblait si heureux et complices. J’avais peur que cela ne la fasse changer d’avis sur notre nouvelle relation.
- Tu as l’air si heureux avec ta femme. Pourquoi éprouves-tu le besoin d’aller voir ailleurs.
- Abi est une femme merveilleuse, elle m’a donné de beaux enfants, adore ma famille et s’occupe bien de la maison.
- Alors où est le problème ?
- Moi, Aicha, dans toute cette panoplie, tu ne m’y verras pas. Elle est plus mariée à ma famille qu’à moi. A part les enfants, nous ne partageons rien, la seule chose qui l’intéresse c’est de faire plaisir à ma famille particulièrement à ma mère qui exerce une emprise totale sur elle. La plupart du temps elle est dans les fêtes familiales, elle préfère aller à un baptême un dimanche que rester avec moi à la maison. C’est quand j’ai compris qu’elle avait été éduqué ainsi et que jamais je ne pourrais la changer, que j’ai décidé de me trouver une deuxième femme.
- Donc si je te suis bien, tu veux une poupée à toi tout seul pour jouer. Je comprends maintenant pourquoi on t’appelle bébé. J’éclate de rire et la serre encore plus dans mes bras. Je la dévore des yeux, elle n’a pas vraiment changé et ne donne pas son âge car elle semble toujours avec 16 ans. Peut – être parce qu’elle ne se maquille pas ? Juste comme autrefois. Je prends une boucle de ses mèches et la tire pour la taquiner. J’ai l’impression d’être un gamin qui découvre l’amour. Il faut que je lui parle de Yanne parce que je sais qu’elle va essayer dans les jours à venir de la voir.
- Tu sais entre la fille que tu as vue tout à l’heure et moi, il n’y a plus rien même si à un moment j’envisageais sérieusement de l’épouser.
- Qu’est ce qui n’a pas collé.
- C’est une fille à papa, pourrie gâté et qui croit que tout tourne autour d’elle. Bref pas mon genre du tout.
- Parce que moi je le suis ?
- Hum plus que ça ricanais – je en regardant ses lèvres rosies par la boisson. J’avais fait exprès de prendre l’endroit le plus isolé du resto ou j’aurai le loisir de la toucher et qui sais de l’embrasser. Depuis tout à l’heure, je lui fais de petites caresses sur le bras, le cou, le contour des yeux… juste de petites touchées car je sais que les femmes sont hyper sensibles au contact. Malheureusement, j’ai été pris dans mon propre jeu car sa peau est si douce que mon corps a commencé à réagir. Quand elle a regardé mes lèvres, je n’ai plus hésité, je me suis penché et je l’ai embrassée délicieusement. Elle a répondu avec tellement de sensualité que j’ai été transpercé par un courant plus qu’électrique. Moi qui voulais juste lui faire une petite bise, je me suis retrouvé à me frayer un chemin quand sa petite bouche si chaude. Quand ma langue a touché la tienne, je ne me suis plus retenue, je voulais juste avaler cette petite. C’est comme si une lave de fusion venait de nous traverser et le corps et l’esprit ; j’étais en transe et le tremblement de son corps dans mes bras me prouver qu’elle était dans le même état que moi. Mon portable sonne, me ramenant à la réalité. On se détache péniblement tout en nous regardant intensément. J’aurai voulu donné tout l’or du monde pour être seule dans une chambre avec elle. La sonnerie du téléphone insiste et on quitte le monde enchanteur où nous étions pour décrocher.
- Il y a des embouteillages ou quoi ? Tu as vu l’heure ? C’est Yanne. Je regarde ma montre, effectivement, il est 18 heures passé de 30 minutes, elle m’avait donné rendez-vous à 18h.
- Ecoute Yanne, c’est la dernière fois que je te le dis, toi et moi, c’est fini. J’ai tourné ta page alors ne m’appelle plus s’il te plaît. A moins que ça ne soit pour le boulot. Je suis occupé alors je te laisse. Je coupe sans attendre une réponse et j’éteins mon portable. Quand je tourne vers Aicha, elle avait un peu reculé alors je m’approche d’elle mais elle se lève d’un coup comme si j’étais un danger.
- Je n’aime pas que tu m’embrasses en public, mon frère a raison de dire que tu es un toubab.
- Ah bon, c’est ce qu’il a dit. Est-ce que je suis allé trop loin tout à l’heure.
- Oui Malick, beaucoup trop loin.
- Ça ne t’a pas plu.
- Si et c’est ça qui m’énerve le plus, je suis toujours faible avec toi, je ne te dis jamais et je me déteste pour ça. Tu vas encore croire que je suis une fille facile qui, au moindre toucher, fond. Je me lève et viens me mettre en face d’elle. je soulève son menton pour qu’elle se regarde et là je vois que ses yeux sont emboués de larmes.
- Mais pas du tout, excuse-moi encore une fois je t’avoir traitée de fille facile au resto. C’est cette une attirance dévastatrice qui va au-delà du désir qui fait que l’on ne peut se résister l’un à l’autre. Ne crois pas que c’est seulement toi qui est faible parce que moi aussi, devant toi, je le suis encore plus. Je n’ai jamais embrassé une femme dans un restaurant mais avec toi j’oublie jusqu’à l’endroit où je suis. Maintenant je suis d’accord avec toi sur une chose.
- Quoi ?
- Je ne resterais jamais seul dans une chambre avec toi. Viens je te dépose, il se fait tard. Elle regarde à son tour sa montre et ouvre grand les yeux ;
- Waw, je n’ai pas vu l’heure passer.
- Moi aussi, c’est ça qui m’a le plus marqué quand on sait rencontrer la première fois.
- A moi aussi. Je l’entraine vers la sortie en lui prenant la main. Je voudrais lui poser une question mais j’ai un peu peur. Comme il y a cinq ans, j’ai l’impression qu’on se connait depuis des années, comme si elle m’était prédestinée. Nous entrons dans la voiture et prenons un grand souffle.
- Aicha, avant que l’on aille plus loin, il faut que je te demande quelque chose qui me tient à cœur.
- Oui dis-moi ?
- Est – ce que tu trouves un inconvénient de devenir une deuxième femme ? Ca y est la bombe est lancée, j’attends sa réponse et elle tarde à venir, mon cœur s’accélère.
- Je ne sais pas Malick. Avant de te revoir, j’avais en horreur les hommes, tu es le seul capable de réveiller mes sens. Mon premier mariage était sous le régime de la polygamie mais je haïssais cet homme. Mais avec toi, mon cœur réagit et ma question est de savoir si je peux te partager. Seulement il est hors de question pour moi de te demander de quitter ta femme. Bref tant de questions et peut – être qu’avec le temps je pourrais te répondre.
- D’accord, alors je te pose une autre question en attendant que tu trouves la réponse à la première. Elle me sourit. Est-ce que tu peux vivre sans moi ? Parce que moi, je sais que je ne peux pas. Pas après cette journée. Ses lèvres s’étirent encore plus.
- Je crois que tu es l’homme de ma vie Malick KANE et ce que je ressens pour toi est si fort que ça me fait peur.
- Surtout pas parce que c’est réciproque. Je démarre la voiture le cœur plus léger parce que je sais au fond de moi qu’elle me dira oui si je le lui demande officiellement.
Menoumbé : mise en garde
Pourquoi lui ai-je dis hier de foncer. Aujourd’hui je me suis souvenu de tout le charme qu’avait cet homme il y a cinq ans. Déjà dans l’hôtel, toutes les femmes lui faisaient les yeux doux et ma sœur, je n’en parle pas. Devant lui, je ne l’a reconnaissait plus. Seulement hier quand elle m’en a parlé, j’étais si content qu’elle s’intéresse enfin à quelqu’un que je l’ai poussé dedans sans réfléchir.
Ça fait une heure que je tourne en rond devant l’arrêt de bus, la boule au ventre. Je l’ai appelée deux fois et la troisième fois je suis tombé sur sa boite vocale. Maintenant, j’ai peur qu’il ait abusé d’elle. J’ai regardé sur Google et j’ai vu que qu’il est très apprécié. Mon Dieu, où est-elle ? C’est à cet instant que je vois un joli 4X4 d’un luxe impressionnant ralentir vers moi avant de se garer. Aicha en sort le sourire aux lèvres, exactement comme il y a cinq ans. Je ne peux m’empêcher d’y répondre et c’est là que je vois Malick. Il sent le luxe à plein nez et franchement j’ai peur pour ma sœur. Chititite, riche, beau et charismatique, Aicha est foutue dé. Je renfrogne mon visage en prenant la main qu’il me tend. Comme ma sœur, il a l’air si heureux et je n’aime pas cette façon qu’ils ont à se regarder …
- Tèle na dé (c’est trop tôt) attaquais-je en me tournant vers ma sœur.
- Qu’est-ce qui est trop tôt demande Aicha innocemment en gloussant, suivi de près par Malick qui vient l’enlacer. Mooo
- Je peux savoir pourquoi ton toubab se moque de moi et bat les pattes toi, lançais-je à Malick, là il éclate carrément de rire jusqu’à se tenir le ventre.
- Je t’ai dit que mon frère est un jaloux ne le provoque pas toi aussi. Ma sœur avait tellement l’air heureuse que ça m’a fait encore plus peur. Cet homme exerce une folle emprise sur elle.
- D’accord bébé dit Malick en levant les mains.
- Bébé diam, mane dé diomi na (comment ça bébé, incroyable). Donc si je comprends bien vous sortez déjà ensemble. Aye Aicha toi aussi, tu ne le laisses même pas galérer un mois. Le gars te drague rék, tu te jettes dans ses bras, toi aussi c’est comme ça que maman t’a éduquée hein ?
- Mo, c’est toi qui m’as dit hier d’ouvrir mon cœur et maintenant que c’est fait, monsieur est fâché.
- Je t’ai dit de lui donner une chance de mieux vous connaitre pas d’être sa petite amie dès aujourd’hui. Soi sûre que tu ne vas pas déménager, attend qu’on arrive à la maison rèk.
- Féhéko (essaye de m’en empêcher). Moo, shiiip
- Yaw raquadioti nga dé (tu t’emballes vite). Va la – bas, il faut que je parle avec ton mec.
- De quoi ?
- Des trucs d’hommes. Aicha plisse ses yeux et avant qu’elle ne réplique Malick lui fait juste une mimique en inclinant la tête. Elle tourne les talons et va plus loin. Thièy mane dé niak na sama sœur (j’ai perdu ma sœur) pensais-je.
- Pipipe, je voudrais connaitre votre secret avec ma sœur, une journée et je ne l’a reconnais plus. Qu’est-ce que vous lui avez fait ? Il éclate encore de rire.
- La question est plutôt qu’est-ce que ta sœur m’a fait par ce que là je suis complétement perdu.
- Pourtant je ne blague pas dé, vous auriez dû la voir avec les autres hommes ?
- Je ne suis pas ces autres hommes Menoumbé, quelle femme peut me résister dis-moi. Je recule d’un pas, ki mo fouye (quel vantard). Cette fois c’est moi qui éclate de rire.
- Waw, laye ilaha ilalah, moyène mane diomiwouma rék (je suis abassourdi).
- Bon, il se fait tard et j’ai une longue route à faire alors je vous écoute.
- D’accord, jouons franc-jeu. Quelles sont vos intentions envers ma sœur.
- L’aimer, de tout mon être en essayant de rattraper ces cinq années sans elle, me répondit-il du tic au tac et droit dans les yeux.
- Chi, je commence vraiment à avoir peur, je ne sais pas entre vous deux qui est le plus accro car….
- Moi sans contexte, écoute Menoumbé, je n’ose pas imaginer ce que ta sœur a vécu auprès de ce monstre alors ce serait ignoble de ma part de profiter encore une fois d’elle. Vous avez ma parole d’honneur que je me comporterai comme il se doit avec elle.
- Vous avez intérêts car elle a vécu l’enfer dans ce mariage. J’hésite un peu mais il faut que je lui dis parce que ce que je viens de voir ne me plais pas et j’ai peur pour elle. Pendant trois mois, ce salaud a abusé d’elle et quand il a commencé à se rassasier, il a essayé de la vendre à un milliardaire. Il sursaute et fronce les cils. Oui Malick, le maire l’a amenée un jour à Dakar dans l’intention de la donner à un certain Wilane. Aicha a réagi en lui tirant dessus. Heureusement pour elle, qu’il s’en est sorti, sinon ma sœur risquait la prison à vie. Cette fois, il recule d’un pas, les yeux grandement ouverts.
- Mon Dieu. Il se prend la bouche de stupeur, j’ajoutais que je croyais que… non. Je crois qu’il est en état de choc mais je dois lui dire toute la vérité car je sais qu’Aicha ne le fera pas. Même si elle n’en parle pas, le choc est toujours là.
- Une semaine après Aicha a eu assez le cran de réagir en dénonçant son mari devant toute sa famille. Ce soir-là, elle a eu la chance d’être soutenue par la première femme du maire. Ce dernier ne l’ayant pas supportée a eu une crise cardiaque devant tout le monde. Je vous épargne le reste mais tout ce que je peux vous dire c’est que ça lui a pris énormément de temps pour se reconstruire en se battant pour être ce qu’elle est aujourd’hui. Je suis tellement fière d’elle, nous le sommes tous. Après sa nuit de noce, quand ma mère l’a ramenée à la maison, elle ne pouvait même pas marcher. Billahi si vous l’aviez vue et le pire c’est qu’on l’a ramenée chez son bourreau et je les ai laissé faire. J’en ai tellement voulu à mes parents que j’ai quitté la maison, pendant des semaines. Nous tous, nous l’avons abandonné à son propre sort et il ne se passe pas un jour sans que je le regrette. Bref je me suis juré de ne plus jamais la laisser seule et de la protéger quoi qu’il m’en coûte. J’aime ma sœur et je vous jure que si vous lui faites mal vous aurez affaire à moi. Voilà, il fallait que je vous prévienne. Le regard vide, il avait les yeux rivés sur ma sœur, comme s’il n’était plus là. Je crois qu’il est en état de choc, ma sœur s’est approchée rapidement voyant cela.
- Qu’est-ce que tu lui as dit Menoumbé et avant que je ne réplique. Malick l’avais prise dans ses bras, l’enlaçant très fort. On aurait dit qu’il tremble. Quand j’ai vu cela, la peur que j’avais depuis tout à l’heure s’est dissipée car j’étais heureux de voir que cet homme tenait à ma sœur, beaucoup plus que je ne l’aurai imaginé. Il a prononcé un seul mot à l’endroit de Aicha : PARDON.
A lire tous les lundis…
Par Madame Ndèye Marème DIOP
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