Le jeudi 29 juillet 2016, la Chambre Africaine Extraordinaire d’Assises a terminé ses activités par la lecture de la décision sur les intérêts civils. Emboîtant le pas à la chambre d’instruction dont les carences et manquements ont choqué l’opinion par la posture de juges d’instruction violant leur serment d’une enquête à charge et à décharge par leur complicité avec les autorités politiques tchadiennes qui les ont discrédités dans l’affaire des double per diem gracieusement offerts par l’Etat Tchadien et rageusement réclamés par le même État lors du rejet de sa constitution de partie civile.
Les juges de la Chambre d’Assises se sont, eux aussi, rendus tristement célèbres et les affaires n’ont pas manqué. De la conduite des audiences exclusivement à charge, à la posture partisane du Président Kam accompagnant, défendant les plaignants, et ouvrant grossièrement un boulevard pour que ceux qui ont été coachés par Reed Brody insultent l’accusé. Sans compter sa partition cynique et vulgaire dans le montage de l’affaire du viol et ses multiples violations des règles de procédure du Code de Procédure Pénale du Sénégal.
Seul Maître d’un bateau ivre, le Président Kam Gberdoa pouvait changer de cap comme il l’entendait. C’est ainsi qu’il tanguait entre le Code de Procédure Pénale du Sénégal et les “régles des juridictions internationales ” sans les citer, ni expliquer, pourquoi les lois pénales sénégalaises étaient systématiquement écartées dès que lui-même et ses co-juges les trouvaient favorables à l’accusé. Pour masquer le refus d’appliquer ces lois, il abusa en recourant à de ” mystérieuses règles des juridictions internationales”: ce fut le joker de Gustave Kam Gberdoa pendant le procès.
L’hérésie ne pouvait que s’accentuer dans cette ambiance surréaliste où un résumé d’une décision est lue à la place du texte du jugement non encore écrit et inexistant par définition au moment de la lecture du résumé.
Tout leur était permis, même de poursuivre l’incroyable en ce jour, 29 juillet 2016 où le Président Kam, nous a appris que le résumé du jugement condamnant le Président Habré à perpétuité publié le 31 mai, n’est plus valable,” le vrai jugement”, nous dit-on, sera prêt d’ici demain.
Qui l’eût cru ? Ils n’ont toujours pas fini de le rédiger depuis le 11 février 2016.
Ainsi donc, les juges des CAE peuvent retirer leur arrêt, le corriger, le modifier et lui substituer un autre, deux mois plus tard!!!
En démarrant ses activités, la Cour s’est signalée par la désignation d’avocats d’office pour assurer une défense au Président Habré. Mais les a-t-elle placés dans des conditions légales pour le faire? Non, constat a été fait qu’elle refusa d’accéder à toutes leurs demandes de vision de preuves audiovisuelles, de maintenir à Dakar un agent de la DDS pour une confrontation avec une plaignante, de juger des recours en nullité déposés régulièrement; et enfin la Chambre d’Assises a rejeté leur mémoire en défense sur les intérêts civils. Ceci pour dire qu’aucune défense n’a pu être développée devant des juges qui avaient une mission à accomplir exactement comme des militaires en opération et jamais comme des magistrats s’essayant à une œuvre de justice.
Aucun motif, ni raisonnement juridique n’a été produit pour justifier cette décision comme on pouvait s’attendre de la part d’un tribunal.
Soulignons que la décision sur les intérêts civils est, elle aussi, entachée par la présence irrégulière du faux juge Amady Diouf en violation du statut et au mépris des règles de procédure.
La Cour a, aussi, fait fi du caractère suspensif de l’appel qui devait entraîner la suspension de la procédure sur les intérêts civils jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’appel relatif au rejet du sursis à statuer, piétinant ce faisant les lois sénégalaises. Encore une fois les “règles des juridictions internationales” ont été appelées en renfort ? Lesquelles? Celles mises en place pour le Rwanda, la Yougoslavie, le Cambodge, la Sierra Leone ? Personne ne le sait !
Dans cette décision lue le 29 juillet et non encore disponible contrairement à la pratique judiciaire, plusieurs autres violations de principes et règles juridiques ont été relevées.
Ainsi, a-t-on assisté à une double réparation. En effet, les prétendues parties civiles qui ont été dédommagées au Tchad ont bénéficié d’une seconde réparation à Dakar. Deux réparations pour un seul et même préjudice!
Les juges des CAE ont fait sursauté plus d’un juriste en inventant une méthode de réparation du préjudice qui est déterminée, non pas, par rapport au préjudicie allégué des parties civiles, mais, définie curieusement par la nature de l’infraction. Viol tant, torture tant etc.. Une énième hérésie !
Le Président Kam et ses assesseurs, au terme de ce procès, ont estimé que le Président Hissein Habré est responsable de tout et lui seul. Pouvait-il en être autrement, quand pour lui seul, une juridiction a été mise en place et des milliards offerts à la ronde?
Ils ont fait pire que la Chambre criminelle du Tchad qui avait déclaré l’Etat Tchadien civilement responsable mais ici à Dakar, le faux juge Amady Diouf et ses collègues ont estimé que l’Etat tchadien qui les a tellement gâtés avec des salaires mirobolants, avec des double per diem, et de multiples cadeaux, ne pouvait pas être mécontenté! Idriss Deby, à la tête de cet État, n’est-il pas en fin de compte le véritable Maître de cette magouille judiciaire ignoble?
Le statut des CAE violé par ceux là même qui l’ont écrit.
Les modalités d’indemnisation ont été définies par le statut qui les a encadrées autour d’un fonds d’indemnisation prévu dans l’article 27; ce fonds devait être alimenté par les membres du Comité de Pilotage. Cette norme statutaire a été écartée, de manière irrégulière, par la Chambre d’Assises pour lui substituer la saisie des biens de l’accusé.
Tout au long de cette affaire, pouvons-nous oublier la pesante et grossière présence occidentale tenant les rennes de ce procès dans tous ses compartiments: médiatiques par le Consortium, juridiques par le staff des juristes pour les décisions et audiences, politiques par le positionnement du corps diplomatique recevant, organisant voyages et réception pour les magistrats de la Chambre d’Assises, sans oublier le manager omnipotent et omniprésent de HRW claquant des milliards depuis 16 années dans cette folle traque. Sans pareille au monde. Que dire, aussi, du rôle confié à l’élite africaine, qu’elle soit dans la magistrature, dans les médias ou dans la sphère politique ? Elle s’est fourvoyée dans des deals politiciens et financiers, troquant les valeurs essentielles des peuples, manipulant le Droit, les Institutions selon ses intérêts bien compris, et obéissant à la Francafrique. S’il est vrai que l’affaire Hissein Habré a occupé le paysage politique sénégalais des années durant avec beaucoup de bruit médiatique, elle est avant tout une affaire de silence, de lourd silence sur le sort d’un homme. Et surtout, l’histoire interpelle gravement le Sénégal !
LES AVOCATS.