«La politique étrangère consiste à ne pas faire des trucs idiots», croit savoir Barack Obama. Le Sénégal suit-il ce conseil du Président américain ? Dakar est-il en train de faire des «trucs idiots» dans sa politique étrangère ? En tout cas, certains choix et prises de position du gouvernement, depuis l’avènement du Président Macky Sall, poussent à se poser de nombreuses questions.
Pourtant, on reconnaît à l’actuel chef de la diplomatie sénégalaise la compétence qui permet de prendre les bonnes décisions au bon moment. Mankeur Ndiaye fait donc ce qu’il peut. Seulement, le ministre des Affaires étrangères ne définit pas la politique étrangère du Sénégal même si on dit de lui qu’il fait partie des hommes les plus écoutés par le chef de l’Etat.
En réalité, il serait difficile de faire des reproches aux autorités actuelles quant à la conduite de la politique étrangère qui rentre plus dans une continuité qu’elle n’opère de ruptures. Dakar s’est toujours montré, aux côtés de l’Arabie Saoudite, ou de la France par exemple. Toutefois, on peut bien se demander si le Sénégal a bien raison de prendre position en faveur de l’Arabie Saoudite dans le conflit qui l’oppose à l’Iran surtout dans un contexte où Téhéran revient en force dans le concert des nations. Une position de neutralité n’aurait-elle pas été la meilleure pour un pays qui a toujours joué les premiers rôles dans le monde musulman ? La même question se pose avec la décision du Sénégal d’entrer dans une coalition de pays musulmans pour combattre l’organisation terroriste Daesh. Car, il faut le reconnaître, de telles prises de positions contribuent à faire du Sénégal une cible. Il est vrai qu’aucun pays ne peut se boucher les oreilles face aux dégâts que cause le terrorisme. Et le Président Macky Sall sait mieux que quiconque que ceux-là qui sèment la mort pour imposer leur vision exclusive de la religion n’hésiteront jamais à frapper le Sénégal si on leur offre une fenêtre de tir. Toujours est-il que toute la communication faite autour de l’arrestation de présumés terroristes et les sorties des autorités sur cette question ne font qu’attirer l’attention sur un pays dont les services de sécurité abattent au quotidien un travail énorme et dans la plus grande discrétion. Le chef de l’Etat a-t-il besoin de se montrer en chef de guerre face à un ennemi invisible ?
Il s’y ajoute que le Sénégal sous Macky Sall a traversé plusieurs brouilles avec ses voisins immédiats, notamment la Gambie de Yahya Jammeh et la Guinée d’Alpha Condé. Des malentendus nés, non pas d’une politique étrangère de Dakar qui négligerait ses voisins, mais surtout des sorties maladroites du premier des Sénégalais. C’est que Macky Sall adore réagir sous le poids de la colère. Pourtant, tous les spécialistes des relations internationales le disent : «En diplomatie, la réaction épidermique n’est jamais bonne.» Or, ce sont ces réactions épidermiques qui ont poussé Macky Sall à menacer Banjul de ses foudres après que Jammeh, dans une crise de folie, a coupé la tête à deux ressortissants sénégalais. C’était également le cas quand, devant tous les médias, le chef de l’Etat menaça d’envoyer en prison ce jeune Guinéen en détresse qui était entré sur le territoire sénégalais avec le virus Ebola. Alors un peu plus de sérénité du chef de l’Etat ne ferait que du bien à sa politique étrangère.