CHRONIQUE POLITIQUE
Ousmane Tanor Dieng devait, sans nul doute, se sentir dans ses petits souliers le dimanche 4 septembre au soir, à la tombée des résultats provisoires des élections du Haut conseil des collectivités territoriales (Hcct). Voir ainsi ses poulains Alioune Ndoye et autres dissidents de la coalition And Taxawu Dakar se faire battre à plate couture par Khalifa Sall, a dû lui donner envie de se faire tout petit. D’autant qu’il avait fait peser son leadership à la tête du Parti socialiste de tout son poids dans la bataille de Dakar, en donnant notamment aux conseillers municipaux et départementaux socialistes de la capitale, la consigne de voter pour la liste de Benno Bokk Yaakaar. Il ne s’attendait certainement pas à ce que les Doudou Issa Niass, Alioune Ndoye et autres se fassent ratiboiser par Khalifa Sall et ses lieutenants d’autant qu’ils ont bénéficié de l’apport important de l’Alliance pour la République (Apr) et de l’Alliance des forces de progrès (Afp) de Moustapha Niasse. Or, comme en 2014, tout Benno Bokk Yaakaar réuni autour de ces dissidents de Taxawu Dakar n’a rien pu faire face aux Bamba Fall (Médina), Barthélémy Dias (Mermoz-Sacré Cœur), Palla Samb (Point E), Cheikh Guèye (Dieuppeul-Derklé) et autres Moussa Sy (Parcelles Assainies). Ni les enveloppes ayant changé de main entre deux réunions-meetings, encore moins les moutons distribués aux conseillers en veux-tu en voilà n’ont permis de faire pencher la balance de leur côté.
Depuis lors, on n’entend presque pas le camp des vaincus socialistes. Ce sont plutôt les responsables de l’Apr qui tiennent le crachoir. Et c’est pour se chercher des lots de consolation. Qu’ils s’appellent Seydou Guèye, Zahra Iyane Thiam ou Thérèse Faye, ils l’ont tous ouvert rien que pour se consoler que la coalition And Taxawu Dakar ait perdu des voix parmi ses grands électeurs. En laissant sous-entendre que c’est une partie importante de son électorat de 2014 qui lui a tourné le dos à travers ses conseillers ayant voté pour la liste de Benno. Il s’agit là d’une confusion délibérément entretenue qui ne tient pas la route. Parce qu’autant il est facile de corrompre des conseillers municipaux et départementaux qui sont nombreux à n’avoir d’autre métier que la politique, autant le corps électoral est imprévisible. Vous aurez beau leur distribuer des millions, une fois dans l’isoloir, nombre d’entre ces électeurs vous sanctionneront négativement. Demandez aux responsables libéraux qui l’ont vérifié à leurs dépens en 2012. C’est dire que les «apéristes» de Dakar s’apprêtent à vivre des déconvenues aux législatives de 2017 s’ils croient que Khalifa Sall a perdu une partie importante de son électorat. Parce que perdre des centaines de conseilleurs municipaux et départementaux n’induit pas la perte de centaines de milliers de voix d’électeurs.
L’autre enseignement à tirer subséquemment de ces élections au Haut conseil des collectivités territoriales, c’est que Khalifa Sall est resté très fort à Dakar. Sinon il n’aurait pas pu résister, avec ses amis de And Taxawu Dakar, à cette vaste campagne de débauchage de ses alliés des élections locales. Face aux promesses mirobolantes et aux valises pleines d’argent convoyées ici et là par des tenants du régime, ils sont restés dignes à faire pleurer de rage des responsables «apéristes», parce que loyaux envers leurs électeurs. Le maire de Dakar est si fort qu’il est devenu indéboulonnable pour Ousmane Tanor Dieng et ses affidés. Ils sont désormais condamnés à composer avec lui. D’autant que, si l’on croit Bamba Fall, dans un entretien au Populaire (paru hier, mercredi), il n’envisage pas de quitter le Parti socialiste ni aujourd’hui ni demain.
Pourtant, des points de rupture ne vont pas manquer. En particulier si la direction du Parti socialiste décide d’aller aux élections législatives de 2017 sous la bannière de Benno Bokk Yaakaar. Parce que, comme le laisse supposer Bamba Fall, dans un tel cas de figure, Khalifa Sall irait sur sa propre liste à ces compétitions. A n’en point douter, Ousmane Tanor Dieng et ses francs tireurs ne laisseront pas passer un tel affront.
Par Abdourahmane CAMARA
Directeur de publication de Wal Fadjri Quotidien
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