CHRONIQUE DE MAREME : WASSANAM
Les vérités de Malick
Je regarde Aicha courir d’une vitesse hallucinante et traverser la route comme un TGV. Choqué, je reste sur place au moins dix secondes sans réagir jusqu’à ce que les ricanements de Sow poulo me fassent revenir sur terre. Je me tourne vers lui qui se tenait le ventre de rire.
- Je peux savoir ce qui vous fait rire ?
Il se relève au plus vite et essaye de reprendre son sérieux. Il a suffi que je monte dans la voiture pour qu’il reprenne de plus belle. J’ai arrêté de me retenir et j’ai éclaté de rire. Non cette fille est complètement maboule. Je n’ai jamais vu ça de ma vie. Courir ! J’éclate encore de rire jusqu’à avoir mal au ventre. Non c’est incroyable et d’ailleurs pourquoi elle a fait ça ? A-t-elle si peur de rester seule avec moi ? Comment je vais m’y prendre avec elle ? Elle est vraiment bizarre cette fille. C’est la première fois de ma vie que je suis confronté à ce genre de situation ; une femme qui me fuit comme si sa vie en dépendait. Thièy on aura tout vu.
C’est dans ces réflexions que je rentrai chez moi. Je devrais en parler à Mohamed, d’ailleurs ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu. Je l’appelle au moment de me garer. Il répond dès la première sonnerie.
- Je m’apprêtais à t’appeler, viens vite à la maison, c’est urgent.
- Qu’est-ce qu’il y a ? Tu me fais peur.
- Je viens d’arriver et j’ai trouvé Ndoumbé en train de faire ses bagages.
- Qu’est-ce que tes sœurs et ta mère lui ont encore fait ?
- Tu connais les femmes, juste que ma sœur avait demandé à ce qu’elle prépare du thiéboudieune et Ndoumbé a fait du mafé …
- Vraiment tu me fais honte quoi. Comment peux-tu laisser tes petites sœurs traiter ta femme comme un moins que rien. Tant pis si elle te quitte et ne compte pas sur moi pour venir l’apaiser encore une fois.
- Je t’en supplie Malick, tu es mon seul espoir.
On aurait dit qu’il pleurait au bout de la ligne. Finalement je capitulais
- Ok j’arrive.
C’est fou mais il y a des hommes à maman. Pourquoi continuer de vivre sous le même toit que sa mère alors qu’il a les moyens d’aller ailleurs. Quand on refuse de voler de ses propres ailes, on finit toujours par s’en mordre les doigts.
Je me gare devant la belle demeure des Diobène qui se trouve à Sacré-Cœur 3 près de chez Suzanne qui habite, elle, à Sacré cœur 2. Dès que j’entre, je sens une tension palpable.
- Salamou aleycoume, dis-je à la mère de Moustapha.
Habillée d’un grand boubou, elle est assisse sur une natte de prière, le chapelet à la main. Quand on regarde cette femme, on croirait que c’est une vraie croyante qui se soucie du bien être de sa famille. Mais au contraire, à 72 ans, elle fait vivre l’enfer à ses fils. Elle répond à ma salutation en levant son chapelet en signe de bonjour. Cette femme ne m’aime pas trop et c’est vice – versa. Alors je me dirige vers l’escalier en appelant Mouha ; ce dernier sort apeuré de sa chambre et me tire de la main.
- Que se passe-t-il ici ?
Ndoumbé était en train de fourrer rageusement ses affaires dans une grande valise ouverte. Je regarde mon ami qui semble complètement désemparé.
- Wa chérie, il parait que tu veux nous abandonner.
Sans me répondre ni regarder dans ma direction, elle continue de faire ses va-et-vient entre l’armoire et sa valise. Je viens me mettre au travers pour qu’elle daigne me répondre. Alors elle me jette un regard noir qui frise la peur en me lançant.
- Cheu Malick, ce n’est même pas la peine d’essayer de me convaincre. Ma décision est irréversible, il est hors de question que je continue de vivre dans cette maison. Je ne veux plus avoir à faire à cet homme, finit-elle avec colère.
- La colère est l’ennemi de l’Homme, s’il te plaît calme toi et viens t’asseoir, on va parler.
- Je ne veux pas parler encore moins négocier. Trop c’est trop, si je reste ici, je risque de mourir jeune à cause du stress. Li seuye diaroukou (le mariage n’en vaut pas la peine). Je n’en peux plus et je n’en veux plus, lance-t-elle en pleurant. Je la prends dans mes bras en regardant méchamment Mouha qui lui aussi avait les yeux emboués de larmes.
- S’il te plaît ne pleure pas, tout va s’arranger…
- Non, tout est fini Malick et je jure que je ne vais pas changer d’avis cette fois. Merci d’avoir été là pour moi et prend soin de ton ami. Que sa mère lui trouve une femme digne de la grande famille ndiobène. Moi je ne suis qu’une guéweule (griot). Elle me contourne et reprend son rangement. A cet instant son portable sonne, elle décroche.
- Papa, tu es là ? Ok je descends.
- Tu as averti ton père, dit Mouha en ouvrant grand les yeux.
Ndoumbé la pousse et sort de la chambre sans regarder derrière elle. Je m’approche de mon ami.
- Si elle a appelé son père c’est parce qu’elle est vraiment décidée à partir. Je savais que ce jour allait tôt ou tard arriver. Quel gâchis, tu es tellement irresponsable et immature.
- Ne rajoute pas de l’huile sur du feu. C’est ma mère Malick, qu’est-ce que tu veux que je fasse. Je ne peux pas l’abandonner alors qu’elle a sacrifié sa vie pour nous. Qu’est-ce qu’elle n’aura pas vu dans son ménage mais elle est restée et a tout supporté pour nous. Cette femme est prête à partir et laisser ses enfants seuls pour de petite histoires de rien du tout.
Des voix commencent à s’élever en bas. Je prends Mohamed par le bras en lui disant
- si tu trouves normal que l’on manque de respect à la mère de tes enfant alors assume et arrête de pleurer. Viens on va descendre avant que cela ne tourne au vinai
En bas, l’atmosphère est plus que tendue avec deux clans assis l’un en face de l’autre. Même si personne ne parle, on se regarde en chien de faïence. D’une part, il y a Ndoumbé, son père et deux autres hommes dont l’un est son frère. D’autre part, il y a maman Safiétou, Mounaz et Awa, les sœurs de Mouha. Je sens qu’une guerre va éclater. On dirait des kamikazes prêts à se faire exploser.
- Assalamou aleykoum, dit Mouha en tendant les deux mains à son beau-père qui lui répond à peine ; les autres ne parlent même pas. J’ai desserré ma cravate et enlevé mon costume car je commençais à avoir chaud.
- Va avec ton frère, il va descendre les valises, dit le père de Ndoumbé.
Cette dernière se leva mais fut stoppée par Mouha qui la retient par le bras.
- Beau papa, il faut qu’on parle. Tu ne peux pas venir ici et m’enlever ma femme pour une petite dispute, dit avec hésitation mon ami.
- Ne te ridiculise surtout pas, cette femme n’en vaut pas la peine. Tu devrais remercier Dieu…
- Tais-toi maman, je ne t’ai rien demandé, cria Mohamed sans le faire express.
- Comment oses-tu crier sur ta mère à cause d’une vaurienne…..
- Khame lâla wakhe, je ne veux pas entendre le son de ta voix. Tout ça, c’est à cause de toi…
Et c’était parti, comme je le craignais, les cris venaient de toute part dans le salon. Il fallait réagir et vite. La seule solution était de faire dégager les femmes avec leur langue de vipère. J’ai pris vigoureusement les deux poignets des sœurs de Mouha et les tirais de force vers l’intérieur. Elles ont essayé de se débattre mais comme elles ont toutes les deux un faible pour moi, elles n’ont pas trop insisté. Je leur ai fait mon charme avant de les laisser dans une chambre et de repartir rapidement au salon. Là-bas, il y a mon ami qui s’est pris la tête des deux mains en se balançant sur son fauteuil. Je voyais à quel point il était dépassé par la situation car il a toujours fait l’Autriche alors que sa maison volait en éclats. Comme beaucoup d’hommes au Sénégal, il n’a pas eu assez de cran pour tenir tête à sa mère et quitter la maison familiale. Il y a un moment où il faut couper le cordon ombilical, tourner une autre page sans pour autant déchirer l’autre. Comme disait mon père : « deux arbres ne peuvent pousser au même endroit ». Le son de la voix de Pa Ndour me coupa des réflexions.
- Pour rien au monde, je n’aurai voulu que ma fille divorce de toi parce que je sais à quel point tu es un homme bon. Seulement je n’ai pas donné en mariage Nboumbé à ta mère ni à tes sœurs. Que ce soit à la mairie ou à la mosquée, il n’a été écrit dans les papiers que vos deux noms. C’est déjà un challenge de construire une vie à deux mais à plusieurs c’est impossible.
Je t’ai donné une femme pleine de joie de vie avec un avenir brillant, mais aujourd’hui elle est comme une loque de terre. Je ne vais pas entrer dans les détails mais tout ce que je sais est qu’il est vraiment temps qu’elle arrête de souffrir. Toi comme elle, vous n’êtes plus heureux alors il est préférable que vous divorciez.
- Alhamdoulilakh rabil allamine, dit à haute voix la mère de Mouha en tapant les mains. J’ai envie de la gifler même. Pa Ndour se lève en même temps que son accompagnant en secouant la tête.
- Je t’appellerai pour les formalités du divorce et comment vous allez faire pour les enfants.
A cet instant Ndoumbé descendit avec une valise suivie par son frère qui tient une autre plus grande encore. Le visage dévasté, elle n’arrête pas de jeter des coups d’œil à Mohamed. Quant à ce dernier, il pleurait comme un bébé, moi-même j’étais surpris de le voir si attristé. Il se leva et vint prendre sa femme dans ses bras.
- S’il te plait, ne me quitte pas….
- Ne te ridiculises pas et laisses cette femme partir. Yawe hanaa do goor (n’es-tu pas un homme ?). shhhuuuuppppp. Pa Ndour prit le bras de sa fille et la tira vers la sortie.
- Empêches les de l’amener Malick. Pourquoi tu n’as rien dit, me cria-t-il ?
- Parce que je suis d’accord avec son père, si c’était ma sœur, je l’aurai fait depuis longtemps.
- Astahfiroula ! Moi aussi, on m’a fait voir de toutes les couleurs à la maison familiale et je suis restée, j’ai tenu bon….
- Donc, si je comprends bien, parce que vous avez vécu l’enfer chez vos gendres, vous devez rendre la pareille à votre belle-fille. Qu’est-ce que votre fils n’a pas fait pour vous ? Elle ouvre la bouche mais je reprends. Non, laissez-moi finir. Si aujourd’hui vous pouvez prétendre à un quelconque statut c’est grâce à votre fils. Il vous a construit cette grande maison, vous a amenée à la Mecque, vous a acheté une voiture et tant d’autres choses et qu’est qu’il a en retour ? A cause de votre égoïste mal placé, vous avez gâché sa vie pour des histoires de race et d’héritage. Au Sénégal, on a l’habitude de fatiguer celui-là même qui est le plus aisé dans la famille. Vous avez deux autres fils qui ont eux aussi leurs familles mais vous ne vous souciez guère de leur vies. Non, vous êtes là à vouloir contrôler chacune de ces dépenses avec sa femme. Pire vous voulez lui imposer une cousine pour que l’héritage reste à la maison.
- N’insultes pas maman s’il te plaît, si elle vit avec moi c’est parce que mes autres frères sont pauvres et ne peuvent pas l’entretenir. Elle a toujours voulu bien faire…Je le coupe en lui criant dessus cette fois.
- Alors arrêtes de pleurer et va épouser ta cousine et ne nous emmerde plus avec tes « j’aime Ndoumbé ». Nous tous nous aimons nos mamans, mais ce n’est pas une raison pour qu’elles fassent ce qu’elles veulent. Tu crois que c’est normal que tes petites sœurs ne fassent aucun travail ménager dans cette maison et que c’est ta femme qui doit tout faire ? Elle n’a même pas de bonne avec cette grande maison. En plus de ça, elle doit supporter leurs caprices et leurs impolitesses. Ndoumbé a été rejetée, insultée et mal traitée pendant des années et tu n’as jamais osé prendre sa défense. Elle n’a pas été amenée ici pour servir d’esclave à tes sœurs ni à ta mère.
- J’en ai assez entendu, dit mère Safiétou en se levant. Elle n’ose pas me renvoyer ni m’insulter car je suis le patron de son fils après tout.
- Vous avez toujours cru que c’est Ndoumbé qui pompait tout l’argent que Mohamed gagnait et au fond c’est là que vient le problème : l’argent. Alors je vais vous révéler une chose : 60 % de son salaire est dépensé dans les hôtels et filles qu’il fréquente. Elle ouvre grand les yeux. Oui, vous m’avez bien entendu, à force de fuir vos histoires perpétuelles dans cette maison, votre fils se réfugie chez des mangeuses d’hommes histoire d’oublier ses malheurs. Sur ce je vous laisse.
Je quittais la maison sans regarder du côté de Mouha sachant qu’il allait me tuer le lendemain pour avoir révélé tout cela à sa mère. Mais je m’en fou, depuis le temps que j’ai envie de lui dire mes quatre vérités. En plus je n’aime vraiment pas la vie de débauche que Mouhamed est en train de mener. Avant, il était l’homme le plus fidèle au monde, toujours souriant, blagueur et qui avait toujours hâte de rentrer chez lui. Je leur enviais cet amour fou qu’ils se vouaient l’un à l’autre et surtout cette grande complicité. Aujourd’hui, Mouha n’est plus que l’ombre de lui-même parce qu’il n’est pas homme à tenir tête à personne. Cela me fait mal de voir mon frère dans cet état mais j’espère du fond de mon cœur, qu’il va se réveiller. La seule chose qu’il peut faire pour reprendre sa femme c’est de déménager. Je lui parlerais demain si possible.
Je rentre chez moi, abattu. L’image de Mouha en train de pleurer comme un enfant ne me quitte pas et je suis triste pour lui. Chez moi, je ne trouve personne. J’aurai voulu jouer avec les petits pour me changer les idées. J’aurai voulu parler à Abi mais je sais d’avance qu’on ne serait pas d’accord sur certains points. Mes pensées se tournent sur Aicha, si elle n’avait pas fui, on serait toujours en ce moment ensemble. Je prends mon portable et demande par texto son numéro à Suzanne. Elle me l’envoie de suite avec un lol. Dès que je lance l’appelle, mon cœur commence à battre. Pourquoi me fait-elle autant d’effet.
- Allo ?
- Pourquoi tu as fui Aicha ? Elle ne dit rien, alors je continue. As-tu peur de moi ?
- Qui n’a pas peur de vous. Je souris sans le faire exprès.
- Tu es bien arrivée ?
- Non je suis toujours dans le car, peut-être dans dix ou quinze minutes.
- Depuis ce temps ?
- Il y ‘avait un embouteillage fou comme chaque soir d’ailleurs.
- Promets-moi de trouver un appartement ce weekend s’il te plait. Je l’entends ricaner. Pourquoi tu ris ?
- Je n’ai pas besoin d’un appartement à moi toute seule.
- Tu n’as qu’à vivre avec Menoumbé.
- Vous vous rappelez de lui ?
- Je me rappelle tout de toi surtout de tes lèvres. Silence. Allo
- C’est pour ça que je ne voulais pas entrer dans votre voiture, vous êtes trop…Elle se tait comme pour réfléchir au mot pour me qualifier.
- Quoi ? Directe. Je ne dis que ce que je pense, tu as des lèvres hyper douces.
- Qu’est-ce que vous me voulez exactement monsieur ?
- S’il te plaît arrête tes vouvoiements, ne serait-ce que pour ce soir. Et pour répondre à ta question, j’avais envie d’entendre le son de ta voix car je viens de passer un mauvais moment. J’entends une voiture qui se gare, c’est Abi.
- Il faut que je te laisse ma gazelle, on se voit demain.
- Je ne suis pas une gazelle.
- et je te préviens il faut vraiment que l’on se parle à coeur ouvert pour avancer. Bisou et avant qu’elle ne réplique, je coupe le téléphone en riant. A peine dix seconde parlé avec elle et je me sens beaucoup mieux. Je n’ai plus envie de me voiler la face, Aicha me plait beaucoup trop et j’ai comme l’impression que son passé n’a pas été facile. Plus les jours passent et plus je me dis que peut – être que je me suis trompée sur mon jugement. Je me lève du canapé et va accueillir la famille. D’ailleurs je me demande ou est ce qu’ils étaient allé ?
Aicha: suite pas fin
Je raccroche avec Malick, le sourire aux lèvres. Il t’appelle la gazelle et toi tu rigole, pauvre fille, me dit une voix intérieure. Je me sens vraiment perdue avec cet homme, je ne sais même pas comment le décourager. Il faut que j’en parle à quelqu’un et pourquoi pas à Menoumbé. Il est le seul qui connaisse mon passé fictif avec Malick.
Quand je descends du bus, mon frère m’attend comme d’habitude en manipulant son portable. Facebook et WhatsApp vont en finir avec cette génération, bilay. Tout l’argent de Menoumbé passe par les crédits pour se connecter. Il croit dur comme fer qu’il peut trouver le grand amour et passe son temps à vivre dans l’univers pittoresque et fictif de l’internet avec ces rencontres et autres.
- Salut ma petite sœur adorée.
- Bonsoir, monsieur net.
- Hi ces temps-ci, j’ai une belle canadienne qui est folle de moi. En même temps, il me montre une beauté époustouflante aux yeux bleus.
- Et qui te dis que c’est elle ? Tu es vraiment naïf toi.
- Je ne sais même pas pourquoi je te l’ai montré. Viens on rentre, sinon quoi de neuf ?
- Il faut que tu m’aides. Je vais aller droit au but : Malick est de retour.
- Qui ? Le blanc-là qui te faisait sourire comme un singe. Je lui tape l’épaule et il éclate de rire. Allhamdoulilah, ma prière est exaucée, voilà un homme qui va te faire réagir. Depuis le temps, finit-il en se frottant les mains.
- Regarde-moi celui-là rèk, Yaw dagua eupeul, dègue teule rek né damena (tu vas trop vite en besogne, au moindre bruit tu sautes). Ce n’est pas ce que tu crois.
- Ah bon, explique, tu l’as vu où, quand et comment ?
- Je te dirais tout quand j’aurais pris mon bain et diner….
- Moo jamais, tu me crois aussi patient que ça. C’est tout de suite ou jamais.
- Thièy, je ne sais pas ce qui m’a pris de t’en parler. Viens, on dit bonjour aux parents et on y va.
Cinq minutes plus tard, nous étions déjà dans ma chambre tellement ce mec m’avait pressé. Je lui racontais tout, du début jusqu’à aujourd’hui. J’ai juste sauté le passage au restau sinon il va commencer à jouer les frères jaloux comme autrefois. Il a été surpris de savoir que c’était lui mon patron et il ne comprenait pas pourquoi je le lui ai caché tout ce temps. Il me sermonna une demi-heure avant de revenir à de meilleurs sentiments.
- Maintenant c’est quoi ton problème ?
- Mon problème est que le mec me fait des avances et moi je ne sais pas comment le repousser. D’ailleurs aujourd’hui j’ai dû prendre la poudre d’escampette pour ne pas entrer dans sa voiture.
- Moi, ce que je veux savoir c’est, est ce qu’il te fait toujours de l’effet parce qu’il y a cinq ans tu étais complétement sous le charme de cet homme.
- Aujourd’hui encore plus, dis-je avant de le regretter.
Excité comme un enfant, il sursaute et vient s’asseoir à côté de moi.
- Alors qu’est-ce que tu attends Aicha, fonce et ne te retourne pas.
- Et tu prétends être mon frère.
- Pourquoi tu ne veux pas sortir avec lui ? Avant j’étais inquiet et jaloux parce que tu étais trop innocente mais aujourd’hui, tu es assez mature pour faire la différence entre le bien et le mal, le vrai du faux.
- Pas avec lui Menoumbé, Malick a beaucoup d’emprise sur moi. Quand je suis avec lui, je suis faible, je ne réfléchis plus.
- Pour moi, ce n’est pas fortuite si le destin vous a encore réunis. Il y a mille endroits sur terre et toi tu te retrouves comme par enchantement à travailler avec lui. Ecoute petite sœur, nous n’avons jamais parlé de ton mariage forcé et peut – être parce que j’en avais trop honte mais si la chance te donne l’opportunité de tourner la page alors fais le. Tu t’es trop recroquevillée sur toi-même en fermant complétement la porte de ton cœur aux hommes. Malick est le seul qui réussit à faire battre ton cœur alors essaye de sortir avec lui.
- Je ne sais pas pourquoi mais il croit dur comme fer que je suis une fille facile, qui s’est mariée avec le maire par intérêt. Tu sais le fameux jour où on a voulu me violer, Malick était là. On s’est parlé à un moment et j’ai compris qu’il croyait que je m’étais mariée par intérêt. Aujourd’hui encore, il me traite comme si j’étais une fille facile. Je suis sûre qu’il a lu l’article qui m’incriminait à cette époque sur la mort du maire.
- A toi de lui montrer qu’il fait erreur.
- Je ne veux rien prouver à personne Menoumbé, encore moins à Malick.
- Laisse ton orgueil de côté et parle avec lui sincèrement. Tu ne peux pas démarrer une relation sans d’abord éclaircir les zones d’ombre. Sinon vous allez tout droit à la catastrophe.
- Je ne veux pas me ridiculiser. Mon passé est trop lourd et je ne veux pas le partager avec lui d’autant que je ne connais pas ses réelles intentions.
- Arrêtes de trop réfléchir Aicha, parles avec lui sincèrement. Poses-lui les questions qui te préoccupent sincèrement. Si tu es là à me demander des conseils c’est parce que tu tiens vraiment à cet homme alors fonce.
- Et s’il ne veut que coucher avec moi parce que j’ai l’impression qu’i n’y a que ça qui l’intéresse ?
- Alors tu laisses tomber et tu tournes la page. C’est facile de connaitre les intentions d’un homme. Premièrement n’acceptes jamais de rendez – vous dans un hôtel, maison ou appartement, juste les places publiques (restaurant, cinéma…). Deuxièmement, après deux rendez – vous, amène le à la maison. S’il te sort le discours toubab là, tu lui dis que ton père refuse que tu sortes avec un homme qu’il ne connait pas. Sois catégorique là-dessus même s’il te menace de laisser tomber. Par contre, il y a des hommes qui peuvent faire tout ça pour montrer leur bonne foi et te faire baisser la garde. Certains peuvent aller jusqu’à demander ta main et te promettre monts et merveilles. Et dès qu’ils auront ce qu’ils veulent c’est fini, tu ne les verras plus.
- Je ne veux pas souffrir Menoumbé, si je sors avec lui et que je m’attache alors qu’il ne voulait que me mettre dans son lit. Je risque après de souffrir.
- En amour, il n’y a pas de demi-mesure, on ne peut pas tricher. Malheureusement, c’est un risque à prendre. Ça passe ou ça casse mais pour l’instant le plus urgent c’est d’abord de régler vos petits malentendus.
- Wa les enfants, venez manger. On attend que vous, crie ma mère dans le salon.
- Tu n’as rien à perdre. Ecoute ton cœur et suis mes conseils, finit Menoumbé en me faisant un clin d’œil avant de sortir.
Au diner, l’ambiance est au rendez-vous, avec mon frère et ses habituelles anecdotes, nous sommes morts de rire. A un moment, il me dit :
- Girl, combien tu vas me payer pour mon rôle de garde du corps. Parce que ce n’est pas facile de faire ces allers-retours pour aller te prendre à l’arrêt bus.
- Regarde-moi ce gigolo, tu ne recevras rien du tout shuup, réplique ma mère.
- Mo comme si vous alliez le savoir hein Aicha, on éclate de dire et c’est à cet instant que je me rappelle de mon chèque. Avec ma course folle et toutes les pensées qui en ont suivi, je l’avais complétement oublié. Je me lève avec précipitation et cours prendre mon sac.
- Eh tu vas où ? questionne mon père. Mais je ne lui réponds pas. Quand j’ouvre le sac et prends le chèque, je tombe des nues : cinq cent cinquante mille. C’est quoi cette histoire.
- Aicha vient ici, criait Papa, confuse je les rejoins avec le chèque. Qu’est – ce qu’il y a ? Gawé gnou bok (fait vite) tu nous fais peur avec ta tête de déterrée. Voyant tous qu’ils étaient apeurés, je leur souris avant de venir m’asseoir.
- C’est rien, je viens de me rappeler qu’on m’avait payé mes heures supplémentaires.
- Ah bon combien et pourquoi plutôt que ça ?
- Ma patronne m’a dit qu’elle s’inquiétait de savoir que j’arrivais toujours tard chez moi et que les allers-retours étaient trop durs pour moi. Donc, elle voudrait que j’essaye de déménager ce weekend.
- Et c’est combien le chèque ? demande en premier Menoumbé. Je le lui donne et il écarte grandement les yeux avant de crier.
- Téqui nagnou (nous sommes riches), allahou akbar liii.
- Ne te réjouis pas vite car pour moi elle s’est trompée, c’est plus que mon salaire. Il faut d’abord que je lui demande demain avant de l’encaisser.
- Chi petite sœur, tu es trop compliqué…
- Menoumbé n’insiste pas, je sais ce que je te dis. On se parle à langage muet avant qu’il n’acquiesce de la tête.
- Qu’est – ce que vous nous cachez depuis tout à l’heure ? interroge maman, les femmes avec leurs sixièmes sens.
- Rien, disons-nous en même temps.
- Nous ne sommes pas bêtes mais c’est comme vous voulez. Règle ce problème et dès demain tu payes ta caution comme ça nous t’aiderons pour le déménagement le weekend.
- On verra maman parce que je ne suis plus sûre de vouloir déménager.
- Ah bon pourquoi mon enfant, demande papa.
- A partir de lundi, je vais descendre à 17 h car j’ai presque fini mes dossiers. Je commence à m’habituer à ce rythme et l’idée de rester seule dans cette chambre ne m’enchante pas alors….
- D’accord réfléchis bien, nous sommes avec toi.
C’est sur ces mots que je pris congé et partis prendre ma douche. Toute la nuit, j’ai pensé à ce que mon frère m’avait dit et plus les heures passaient plus je me disais qu’il avait peut – être raison et qu’il était temps pour moi de baisser un peu la garde.
Le lendemain, je pars au boulot avec un peu de retard. Mais depuis que j’ai décidé d’accepter ce que mon frère avait dit, j’ai le cœur plus léger. Il va falloir que je prenne mon courage à deux mains et que je lui parle sérieusement.
Quand j’arrive au bureau, il est neuf heures passé car il y a eu un grave accident au niveau de la corniche. Devant l’immeuble, mon portable sonne, c’est Malick.
- Allo.
- Tu es où ma gazelle, dit – il d’une voix mielleuse.
- Arrêtes avec ce surnom bizarre.
- D’accord antilope.
- Shhhiiiipppp, il fallait bien que j’échappe au lion qui voulait me dévorer. Il éclate de rire avant d’ajouter.
- Blague à part, tu es où ? Je m’inquiétais. A ces mots, je souris
- Devant l’immeuble, j’arrive.
- Ok à tout de suite mon chaton.
- Tu es myope ou quoi ? Je ne suis pas un animal : gazelle, ensuite tigresse, aujourd’hui antilope et chaton. A tout de suite. Dans l’ascenseur, mon cœur bat très vite et quand les portes s’ouvrent et que nos regards se croisent, le rythme s’accélère. C’est la première fois que je le vois en tenue traditionnelle et ça lui va merveilleusement bien. Menoumbé a raison de dire qu’il serait plus intelligent de ne jamais rester seul avec lui. Ki khadioul si mane (impossible de lui résister). Rien que le regard appuyé qu’il est en train de me faire à cet instant me fait défaillir.
Hum hum. Vous allez rester longtemps à vous jauger comme si vous étiez perdus ? Ici c’est un lieu de travail, ne l’oubliez surtout pas dit Mme Coulibaly d’un ton hyper menaçant avant de tourner les talons et de partir. Au moment où je dépasse Malick, il me prend la main m’obligeant à m’arrêter.
- Est – ce que je peux te parler une minute.
- Et si on attendait l’heure de pause, tu as entendu Mme Coulibaly.
- Laisse cette folle parler et viens dans mon bureau.
- S’il te plaît Malick ! Il s’approche de moi avec un sourire moqueur
- D’accord avec toi, je n’insiste plus sinon tu te transformes de suite en….Je lui fais une pince. Aie cria t – il. Sauvageonne va. Il tourne les talons et entre dans son bureau.
C’est avec beaucoup de gêne que j’entre dans le bureau de Mme Coulibaly. Avant que je ne ferme la porte elle attaque encore.
- Ma fille, je te croyais plus intelligente, franchement tu me déçois, ah.
- Qu’est-ce que j’ai fait ?
- Tu ne le sais pas. Si je n’avais pas intervenue, vous alliez vous sauter dessus dans ce couloir.
De quoi je me mêle, ai-je failli lui dire mais je me retiens. Je sors le chèque et le pose sur la table pour couper courts à la conversation.
- Vous vous êtes trompés sur le montant du chèque hier.
- Non le compte est bon Fanta, j’ai bien calculé.
- Moi aussi j’ai fait le calcul et c’est au moins trois fois ce…
- Ecoute, tu ne vas pas m’apprendre mon métier. Depuis que tu es là, tu as fait un boulot de trois personnes. Dans notre cabinet, nous récompensons toujours ceux qui ont du mérite. Avant toi, nous payions des millions à l’agence et ce chèque ne représente que le dixième. Cet argent tu le mérites alors prends le avant que je ne change d’avis.
- D’accord dis – je en reprenant le chèque. Merci. Je tourne les talons mais avant de sortir je lui dis. Heu, vous savez, Malick me plait alors je voudrais essayer avec lui et je vous assure que cela n’entachera pas mon travail. Elle ouvre grand les yeux avant d’éclater de rire jusqu’à me vexer. Pourquoi vous vous moquez de moi ?
- Parce que je connais mon patron mieux que toi. Il est comme l’eau, il va profiter de la petite fissure que tu viens d’ouvrir pour t’inonder avant même que tu ne t’en rendes compte.
- Alors je nagerais jusqu’à la rive. Wait and see. Elle éclate encore de rire avant de décrocher son portable qui sonnait.
- En tout cas, fais attention à toi, à tout à l’heure.
Il me fallut du temps pour me concentrer sur mon boulot. J’ai dû me faire violence pour arrêter de penser à lui et à ce que j’allais lui dire. Quand l’heure de la pause arriva, je fermais mon ordinateur pour aller au restaurant et c’est à ce moment que Malik entra. Il s’adossa sur la porte et me fit son sourire charmeur.
- C’est l’heure de la pause. Alors ?
- Alors quoi ?
- Pourquoi tu as fuis comme si j’étais un monstre hier ?
- Parce que pour moi tu en es un. Il fait une mimique avant de s’approcher doucement de moi. Assieds-toi s’il te plait, il faut qu’on parle.
- Moi je n’ai pas envie de parler Aicha.
- Arrêtes Malick, criais – je quand il commença à contourner la table.
Il recula d’un pas et me regarda bizarrement. Je continuais d’un ton virulent
- Je ne veux pas que tu me touches, c’est à cause de ça que je n’ai pas voulu entrer dans ta voiture hier. Tu te comportes comme si je t’appartenais déjà alors arrêtes. Je veux d’abord que l’on mette les points sur les i
- D’accord Aicha, il alla s’asseoir sur la chaise « visiteur » et croisa les jambes. Je t’écoute, dit – il avec sérieux.
Par où commencer ? Maintenant qu’il est réceptif, je ne sais plus quoi lui dire. J’avais oublié à quel point cet homme était si intimidant.
- Voilà, tu n’as pas arrêté de me traiter de fille facile depuis que l’on se connait et c’est peut – être pour ça que tu te comportes de cette manière avec moi. Je ne serais jamais réceptive avec toi tant que je sais que tu as cette image de moi. Alors avant de commencer quoi que ce soit je voudrais d’abord que l’on éclaircisse les choses. Donc pose-moi les questions que tu veux et j’essayerais de répondre de mon mieux.
- Hum, écoutes Aicha, je ne suis pas un enfant et comme tu veux jouer la maline, je vais te dire la vérité. Je t’ai vu quand tu entrais dans la chambre d’hôtel du maire. Ce dernier m’avait prévenu que vous entreteniez une relation et que tu ne faisais que te payer de ma tête. Au début je ne l’ai pas cru et il m’a dit qu’il t’avait donné rendez – vous à quinze heures dans sa suite. J’avais décidé de venir t’en parler carrément jusqu’à ce que je te vois m’éviter. J’ai fait semblant de ne pas te voir et après je t’ai suivie jusqu’à ce que tu entres dans cette fameuse chambre. J’étais bouche bée avec ce qu’il venait de dire. Ecoute, tu m’attires vraiment et j’ai envie d’essayer quelque chose avec toi mais ne joues pas aux saintes nitouches avec moi car je ne suis pas né de la dernière pluie.
- Non, il a fait tout ça, mon Dieu. Tu sais le maire était un manipulateur de premier degré et il a réussi à te piéger comme il l’a fait avec mon père et d’autres. Tu peux me prêter ton portable car le mien n’a pas de crédit.
Il me le temps et j’appelle Menoumbé qui décroche à la première sonnerie.
- Oui petite sœur ? J’appuis sur haut-parleur et le pose devant Malick
- Salut toi, écoutes, tu te rappelles de la réunion des cultivateurs et éleveurs à l’hôtel avec Malick ?
- Oui je me rappelle très bien. Pourquoi ?
- A la fin de la réunion, que s’est-il passé après.
- Pourquoi ces questions Aicha ? Je…
- S’il te plaît réponds juste. Je t’expliquerais après.
- Ban, tu es venue me voir en pleurs parce que Malick t’avait invité dans sa chambre et que, dès que tu as refusé, il t’a envoyé balader.
- Ensuite ? Je regarde Malick, le visage impassible mais très concentré à l’écoute.
- Ensuite, il y a cette garce qui est venue confirmer nos soupçons par rapport à lui en nous disant qu’elle avait passé une nuit merveilleuse dans ses bras. Cette fois Malick réagit en clignant les yeux.
- Et après ?
- Comment ça et après, je ne comprends rien à tes questions ? Qu’est – ce que tu veux savoir exactement.
- Après cela où est ce qu’on est allé.
- Tu le sais très bien, s’énerva-t-il
- Oui mais dis-le.
- Nous sommes allés à la réunion de ce pédophile de maire qui voulait faire le bilan de la journée.
- C’était dans sa suite et j’ai été parmi les derniers à arriver, n’est – ce pas ?
- Oui exactement c’est ça. Je peux savoir maintenant pourquoi toutes ces questions.
- Je te le dirais une fois rentrée. Merci et je raccroche. Je regarde Malick qui continue de fixer son portable comme si il n’en croyait pas ses oreilles.
- Voilà ! Maintenant tu connais l’histoire, je n’étais pas seule dans cette suite, il y avait les autres. Je comprends pourquoi cette folle m’avait retenue quand j’ai voulu y aller avec mon frère et pourquoi en milieu de route, elle a rebroussé chemin. Sûrement qu’elle était la complice du maire et voulait que j’arrive exactement à trois heures tapante devant la chambre comme il te l’avait dit.
- Mais bien sûr car ce qu’elle a raconté sur moi est faux. Elle m’a fait du rentre dedans mais je l’ai repoussé en le menaçant d’ailleurs. Il se prend le visage. Non de Dieu, quel salaud. Pourquoi tu t’es mariée avec lui alors ?
Je lui raconte l’incendie du champ de mon père, ses dettes à la banque, comment le maire l’a payé obligeant ainsi mon père à me marier.
- Tu veux dire que que….
- Oui j’ai été mariée de force.
- Pourquoi ton père t’a vendue comme ça. Il y a toujours une solution Aicha dit – il avec colère.
- Comme toi, mon père avait été manipulé. Papa avait une dette de cinq millions à la banque et avec son champ qui venait d’être détruit, nous risquions la rue. Le maire a payé à la banque la totalité de la somme. Quand il a demandé ma main, papa n’a pas pu dire non.
- Mais tu pouvais t’enfuir, refuser…sa voix se casse
- Je n’avais pas le choix Malick, il m’avait dit que si je n’abdiquais pas, il allait amener papa en prison alors je l’ai laissé me toucher.
Je me tais et regardais en bas parce que mes larmes commençaient à couler. C’est bizarre mais j’ai tout d’un coup honte de moi. Les larmes commencent à couler à flots et je me rends compte que la cicatrice est toujours là et qu’il me faudra des années pour qu’elle disparaisse. Je ne me suis même pas rendu compte que Malick s’était approché de moi, jusqu’à ce qu’il me touche. Je sursaute et quand nos regards se croisent, je vois toute ma peine dans ses yeux. Il me prend la main et m’oblige à me lever, mes larmes coulaient de plus en plus comme si on avait ouvert une fontaine au fond de moi. Il m’enlace dans ses bras et me serre très fort
- Je suis si désolé, mon Dieu, je m’en veux tellement d’avoir été si bête. Heureusement qu’il est mort sinon je l’aurai tué de mes propres mains, ce salaud. Pardonne moi de t’avoir si mal jugé, finit – il en me serrant encore plus fort dans ses bras.
- Si tu continues, tu vas m’étouffer. Il recule d’un pas et me sourit.
- Ça va ? Il essuie mes larmes et me donne une bise sensuelle. Je te promets de te faire oublier toutes les peines et douleurs qu’il t’a infligées. Tu seras ma muse, mon hirondelle, ma princesse. Chaque mot était accompagné de petite bise qui me procurait des picotements. Ses lèvres sont si douces. J’ai commandé un bon repas chez Joe. Viens, on va y aller avant que cela ne refroidisse. Et après le boulot, je t’amène dans un endroit magnifique. Je te dirais tout ce que tu veux savoir sur moi. Tout en parlant, il me guida vers la sortie. Heureusement pour moi, il y’avait plus quelqu’un dans le couloir avec mes yeux rouges là. Malick avait installé le repas sur le petit salon en cuire à droite de son bureau. Nous nous installons en silence pour manger. C’était très bon mais lui, mangeait à peine et me regardait avec tristesse.
- Je ne veux pas que tu es pitié de moi, cette histoire est derrière moi depuis longtemps. J’ai repris ma vie en main et aujourd’hui je m’en sors bien.
- Oui j’ai vu. Est – ce à cause de ce que l’on a raconté dans les journaux que vous avez quitté Fatick.
- Langzame (doucement) Malick, on va y aller petit à petit alors ne me coupe pas l’appétit. Surtout que ce repas est délicieux
- Tu as raison. Alors on déménage quand ? demande t – il d’un ton malicieux.
- J’ai entendu On ? Et qui t’a dit que je déménageai, laisse-moi deviner Mme Coulibaly. Il acquiesce de la tête en me souriant malicieusement. Je crois que je vais rester chez mes parents.
- Quoi ? Jamais !
- En voilà un qui croyait qu’il allait se trouver un endroit bien au chaud pour s’évader. Tu peux toujours rêver Malick, n’y compte même pas.
- Et où va-t-on se retrouver pour faire nos petits câlins.
- Mauyène et puis quoi encore ? Les petits câlins entrainent les gros câlins alors je t’avertis tout de suite, avec moi ça ne va pas se faire.
- Qu’est ce qui ne va pas se faire, dit- il en s’approchant un peu plus de moi et en regardant ma bouche avec gourmandise. Je ne suis pas ta petite amie de CM2 Aicha.
- Ne t’approche pas sinon…
- Sinon quoi, sourit – il avant de prendre une crevette et de le mettre dans ma bouche. Ensuite, il mit son doigt dans sa bouche en me regardant sensuellement. Il est dangereux ce mec.
D’un coup, la porte s’ouvrit grandement sur une femme d’une beauté à couper le souffle. Elle est très élancée, de teint clair, les cheveux lui tombent sur les épaules. Elle porte un ensemble noir très chic avec une jupe un peu courte, dévoilant ainsi ses longues jambes galbées. La beauté de cette femme est époustouflante. Elle me jette à peine un regard avant de se rapprocher de Malick qui s’était déjà levé. Elle a de l’assurance dans sa démarche, ses gestes et surtout beaucoup de classe.
- Tu pourrais au moins frapper avant d’entrer, dit Malick en bégayant.
- Je viens direct de l’aéroport bébé alors ne me cherche pas, je suis trop fatiguée.
Elle vient de dire bébé, mon cœur bat de plus en plus vite. Je voudrais me lever et partir mais mes jambes n’arrivent pas à bouger. Elle lui donne une bise sur la bouche même, Walaahi. Et le gars ne bouge pas d’un iota, j’étais choquée, atterrée. Je me rends compte que j’ai à faire à un dragueur de première league. Je m’empresse de me lever et de sortir avant qu’il ne voit mes larmes. Le temps de refermer la porte, j’entends à peine le son de sa voix m’appeler : Aicha. Dire que je viens juste de lui déballer ma vie, quelle conne je suis. Plus jamais il ne m’aura.
A lire tous les lundis…
Par Madame Ndèye Marème DIOP
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