Une fronde agite le milieu du notariat sénégalais. Dans un manifeste adressé aux hautes autorités de l’État, dont le Président de la République, le Président de l’Assemblée nationale, le Premier ministre et le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, une partie de la profession a dénoncé avec véhémence les pratiques de népotisme, de « parachutage » et de favoritisme qui minent l’accès à cette fonction essentielle.
Le texte, dont nous avons obtenu copie, retrace un historique complexe marqué par « une gestion opaque de l’accès à la profession par la Chambre des notaires avant l’instauration du concours en 2013 ».
Selon le document, durant cette période, l’accès était largement conditionné par « les liens familiaux ou la soumission aux titulaires de charges, privant de facto de nombreux Sénégalais méritants, mais sans « parrain », de toute perspective d’embrasser cette carrière ».
Un verrouillage de l’accès à la profession en dehors de la voie du concours.
Le manifeste salue l’organisation du premier concours en 2013 sous l’égide de Madame Aminata Mimi Touré, alors Ministre de la Justice, comme une avancée majeure offrant une chance aux talents issus de toutes les couches de la société.
Cependant, il déplore « la résistance farouche de certains membres de la Chambre des notaires qui ont tenté de contrecarrer cette réforme en refusant l’intégration de stagiaires issus du concours, voire en les renvoyant durant leur formation ».
Des actions qui avaient conduit à une vive contestation des stagiaires, allant jusqu’à des manifestations et des arrestations.
Le manifeste reconnaît également l’intervention du Président Macky SALL en 2020, qui avait permis « la nomination de quarante notaires, dont une majorité issue du concours, dans le but de résorber les problèmes du secteur ».
Cet acte était perçu comme un verrouillage de l’accès à la profession en dehors de la voie du concours.
Le document alerte sur les tentatives persistantes de certains notaires, y compris ceux ayant initialement combattu l’intégration des lauréats du concours, de favoriser l’accès à la profession à leurs « protégés » qui n’auraient pas réussi les épreuves.
Sont notamment pointées du doigt des « personnes ayant échoué au premier concours, ainsi que des titulaires du diplôme supérieur du Notariat (diplôme français), dont la reconnaissance fait débat au sein de la profession ».
Pratiques de népotisme, de « parachutage » et de favoritisme
Les signataires du manifeste s’inquiètent également de « manœuvres visant à amender le projet de loi portant statut des notaires afin de réintroduire des voies d’accès alternatives au concours, au mépris de la volonté majoritaire de la profession ».
Ils craignent que ces tentatives ne permettent « des nominations irrégulières avant une éventuelle abrogation de la loi », en invoquant la théorie des droits acquis.
Ils interpellent directement le Président de la République et le Premier ministre, rappelant une récente nomination controversée qui aurait contourné les conditions requises.
Ils les exhortent « à prendre en main le projet de loi et à y soustraire toute disposition permettant un accès à la profession autre que par le concours, garantissant ainsi l’égalité des chances et le respect de la loi ».
Liboire SAGNA