Sicap-Baobabs, Koungueul, Sacré-Cœur, Agnam… Ces localités, géographiquement éloignées, ont en commun d’avoir été le théâtre d’affrontements entre militants de l’opposition et ceux du parti au pouvoir. Alors que la campagne venait à peine de démarrer, des violences ont, en effet, été notées ça et là, mettant aux prises trois des quatre plus grandes coalitions que sont Pastef, Takku-Wallu, Samm sa Kaddu et Jamm ak Njerin. Des coalitions donc où la moyenne d’âge et/ou le parcours politique devraient logiquement penser qu’elles se démarqueraient des arguments du passé, basées sur la force des biceps, pour embrasser la force des arguments. Que nenni ! A Pastef, on ne veut pas changer une méthode qui gagne, celle d’instaurer la terreur partout où il y a débat jusqu’à neutraliser l’adversaire. Samm Sa Kaddu dont l’essentiel est constitué d’anciens «amis» ou alliés de Ousmane Sonko veut, apparemment, utiliser les mêmes méthodes pour contrôler certains leviers de pouvoir. Conséquence : on est dans le «tibb tank» (ton pied, mon pied). A Takku-Wallu, on veut rendre à Pastef la monnaie de sa pièce. Un jeu de mano a mano violent où les méthodes fortes constituent les seuls arguments pour convaincre les électeurs. Dans les premiers jours de campagne, on a assisté, tour à tour, à des échanges de propos aigres-doux qui ont, malheureusement, viré à l’affrontement physique. Les ouailles de Barthélémy Dias ont été les premières à ouvrir les hostilités contre la caravane de Abass Fall, député sortant et candidat de Pastef à Dakar. En riposte, ce dernier a publiquement et sans cagoule, appelé ses partisans à se munir de machettes, couteaux et coupe-coupe, bref toutes armes destinées à faire mal. La suite est connue de tous : aucune conséquence, si ce n’est deux communiqués des ministères de l’Intérieur et de la Justice appelant les uns et les autres au calme alors que des faits flagrants de violences ou d’apologie de la violence sont notées. L’intéressé a fait son mea culpa, sorte d’aveu, qui devrait, au moins, lui valoir une convocation à la gendarmerie. Rien, absolument rien jusque-là. A Koungheul, théâtre d’affrontements violents entre Pastef et la coalition Takku-Wallu, deux commissaires de police ont été mutés. Des «sanctions» que la presse a vite fait de lier aux dits affrontements. Si ce lien est avéré, cela voudrait accréditer le sentiment d’une justice à deux bras : l’un suffisamment long pour frapper les opposants et leurs présumés complices, où qu’ils se trouvent sur le territoire national, et l’autre, plus court, trop court pour atteindre le pouvoir et ses protégés. Une telle vision manichéenne installe le doute dans la tête des citoyens, leur donnant le vague sentiment que, pour se protéger, il leur faut appliquer la loi du talion : œil pour œil, dent pour dent. Au grand dam de la paix civile régulièrement perturbée par les gladiateurs de la politique qui ont acquis la conviction que plus on est violent, plus on est virulent, mieux ça passe dans l’électorat. Hélas !
Et pourtant, à la veille de la campagne électorale, le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a appelé les uns et les autres à cultiver la paix, à mener une campagne civilisée pour que celle-ci soit un moment de fête plutôt que de deuil. Cet appel, il l’a réitéré au retour de son voyage en Arabie Saoudite et en Turquie puis au dernier conseil des ministres. Malheureusement, son appel a été pas ou peu entendu par ces protagonistes, déterminés à user de tous les moyens à portée de main pour siéger à l’Assemblée nationale. Qu’attendre d’un député qui aura été élu sur la base des seuls arguments physiques ? Rien, si ce n’est le spectacle désolant que nous a offert la 14ème législature avec des députés «faits-diversiers» et au bilan sans étoffe ni relief.