La colère est montée chez les pêcheurs de la Langue de Barbarie qui ont exprimé leur ras le bol général en protestant contre les exploitants du gaz à Saint-Louis, à savoir les multinationales Bp et Kosmos.
Réunis au sein de l’Association des pêcheurs artisanaux à la ligne de Saint-Louis, ces professionnels de la mer ont tenu un sit-in en face de la plateforme gazière appelée Grand Tortue Ahmeyim (GTA) pour exprimer leur désarroi et leur indignation face à la situation qu’ils vivent avec l’exploitation du gaz. Cette cinquantaine de capitaines et propriétaires de pirogues a fustigé le manque de communication de BP et Kosmos à son égard et exige la prise en compte de ses préoccupations pour sauver le secteur de la pêche qui est à l’agonie depuis quelques années. «C’est un sentiment de désarroi, d’injustice sociale qui nous anime, nous pêcheurs de Saint-Louis, par rapport à la situation que nous vivons. La pêche représente beaucoup pour nous et crée pas mal d’emplois. On a en face de nous une plateforme dont les opérateurs n’ont pas eu la courtoisie de venir communiquer avec nous. Tout le monde sait que l’exploitation du gaz à Saint-Louis a un impact réel et négatif sur l’activité de pêche. Elle a un impact sur nos vies. Notre seule source de revenus c’est la mer et le poisson, le gaz ne nous intéresse pas. Nous voyons des étrangers qui viennent chez nous, avec l’autorisation de l’Etat pour exploiter le gaz en polluant la mer. C’est une catastrophe écologique que Bp et Kosmos sont en train de provoquer au Sénégal, au vu et au su de tout le monde et pourtant personne n’en parle» a fustigé Mamadou Sarr, président de la commission Environnement de l’Association des pêcheurs artisanaux à la ligne de Saint-Louis. Ces acteurs demandent aux exploitants du gaz de respecter les pêcheurs et d’arrêter de jouer avec leur avenir. Crachant sur la RSE de Bp, ces pêcheurs demandent aux exploitants du gaz de les respecter davantage. Selon eux, l’opérateur qui exploite le gaz à la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie les a privés de tous les sites les plus poissonneux de la zone qui sont devenus inaccessibles depuis le début des travaux de la plateforme gazière. « Nos zones de pêche nous ont été retirées, on nous a même volé l’un des récifs les plus poissonneux du Sénégal» dénonce Mamadou Sarr qui fait état de manque à gagner et de préjudice énorme. Très déterminés, les pêcheurs de la Langue de Barbarie promettent de faire une sortie chaque mois, pour dénoncer ce qu’ils appellent une injustice.
Selon le président de la commission Environnement de l’Association des pêcheurs artisanaux à la ligne de Saint-Louis, Bp avait commandé des récifs artificiels, l’étude a été faite mais, depuis deux ans, le dossier est rangé dans les tiroirs. A défaut pour ses collègues et lui de pouvoir mener leurs activités dans les zones où ils pêchaient auparavant, Mamadou Sarr exige à Bp de créer des récifs pour eux . Ces pêcheurs saint-louisiens réclament également une compensation financière avant l’exploitation du premier baril de gaz. «Depuis trois ans, une étude d’impact environnemental a été faite mais elle a été rejetée par l’ensemble des scientifiques. Bp est entrain de polluer en silence les eaux à SaintLouis. Nos familles sont dans la précarité, le poisson se fait rare alors que nous sommes dans une zone frontalière. Sans ressources dans leur pays, nos collègues pêcheurs vont en territoire mauritanien où ils sont persécutés et leurs navires arraisonnés. C’est pourquoi nous lançons un appel au président de la République Bassirou Diomaye Faye qui a été élu pour réparer les injustices et faire régner la transparence « a ajouté M. Sarr.
Un mémorandum réclamé
Pour Mame Moussé Ndiaye, le secrétaire général de l’Association des pêcheurs artisanaux à la ligne de Saint-Louis, c’est la énième alerte des pêcheurs à l’opinion nationale et internationale sur la catastrophe écologique, économique que vit la population de la Langue de Barbarie. Il a accusé BP et Kosmos, qui exploitent le gisement de Grand Tortue Ahmeyim (GTA), d’être les seuls responsables des pêcheurs artisanaux à la ligne qu’ils sont. Selon lui, ces deux compagnies tuent à petit feu la pêche. «La faune et la flore qui étaient la richesse qui développait les récifs sont détruites. Après avoir pris Diatara (Ndlr, zone de pêche la plus poissonneuse de Saint-Louis), ils nous racontent des balivernes. Les ressources halieutiques sont les plus impactées par leurs activités. La Langue de barbarie est très impactée. Bp a déjà causé d’énormes problèmes tels que la pollution, les explosions et les marées noires dans d’autres pays. Nous risquons de déguerpir, c’est pourquoi nous demandons aux deux Etats, le Sénégal et la Mauritanie, mais aussi à Bp de tout faire pour que la cohabitation entre eux et les pêcheurs de la Langue de Barbarie puisse se faire sans dégâts» a déclaré Mame Moussé Ndiaye. Les pêcheurs de la Langue de Barbarie demandent une nouvelle étude transparente, avec un partenaire libre. Un mémorandum où ils exigent le Jub, Jubeul et Jubanti avec Bp et Kosmos est réclamé.
Le Témoin