Depuis qu’il a accédé à la magistrature suprême, rien de ce qui a été entrepris par le Président Bassirou Diomaye Faye ne déroge à la règle qui nourrit ce que nous nommons, la poitrine bombée, «l’exception sénégalaise» : la bonne entente entre le temporel et le spirituel. Le nouveau Président s’inscrit dans la lignée de ses quatre prédécesseurs que sont Léopold Sédar Senghor, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et Macky Sall. Sitôt élu, il s’est rendu successivement à Touba, Tivaouane et au Daaka de Madina Gounass, effectué sa prière de l’Aïd El Fitr à la Grande mosquée de Dakar, a rendu une visite de courtoisie au chef de l’église catholique et revient fraîchement de Bignona où il a marqué de sa présence le Gamou annuel de la localité. Ce qui tranche d’avec les prévisions des spécialistes de la météo politique qui avaient alerté contre de fortes turbulences à fort potentiel salafiste au cas où le «Projet» accédait au pouvoir. Touchons du bois, aucune mosquée ou autre lieu de culte n’a reçu la visite d’une pelle mécanique comme ce fut le cas au nord Mali quand les occupants barbus, assimilant les édifices de Tombouctou à des lieux d’adoration de Satan, les ont tout simplement réduits en gravats. Au contraire, Bassirou Diomaye Faye a promis la perpétuation de l’œuvre de modernisation des édifices et cités religieux, dans le sillage de son prédécesseur. Le tout sur fond d’un grand respect pour les enseignements de nos guides.
Que l’on ne se méprenne guère : le Sénégal n’est pas la France où un simple bout de tissu appelé «voile islamique» crée des lignes de fracture telle que le pays attise un sentiment de haine et devient, du coup, la cible de terroristes qui disent combattre au nom de l’Islam. Le Sénégal n’est pas la France où la caricature du Prophète de l’Islam (Psl) est tolérée au nom de la liberté d’expression. Le Sénégal de El Hadj Omar, Seydi Elhadj Malick Sy, Cheikh Ahmadou Bamba, Mame Baye Niass et autres saints est loin de ce pays où le Président peut se lever, par un beau matin de printemps, dissoudre le Conseil du culte musulman et faire l’apologie des dessins du Prophète de l’Islam. Le Sénégal, c’est une majorité de musulmans, affiliés ou non, selon leur choix, à des confréries qui donnent à notre pratique islamique toute son originalité, que dis-je, sa beauté. Au Sénégal, on est libre de croire ou d’être agnostique. On est libre de croire à la religion de son choix, d’en pratiquer les préceptes ou pas sans que le glaive de la damnation ne vous tombe dessus. C’est tout cela que le salafisme veut détruire. Heureusement que, jusque-là, les fruits n’ont pas tenu la promesse des mauvaises fleurs. Pourvu que ça dure !
Post-scriptum : Rts, le virage dangereux
Un journaliste de la Rts, Ousmane Ngary Faye en l’occurrence, a cru bon débiter une chronique pour se plaindre de ce que des citoyens…se plaignent de certaines mesures prises par les nouvelles autorités. Parce que, selon notre confrère qui aurait l’exclusivité du droit de critique, c’est détourner les nouveaux gouvernants de l’essentiel. Soit Ousmane Ngary Faye est de mauvaise foi, soit il est dans une logique de reptation pour plaire aux nouveaux «maitres» du pays. Dans les deux cas, c’est ignoble. Et cela l’est davantage pour le premier scénario vu que, pour le second, nous lui reconnaissons l’absolu droit de se placer du «bon» côté du vent. Cependant, nous pensions que, avec la troisième alternance réalisée par le Sénégal le 24 mars dernier, était enterrée six pieds sous terre cette pratique du caméléon consistant à prendre les couleurs de la majorité du moment, pour reprendre la malheureuse formule d’un ancien ministre de la Communication. Celui-ci, interrogé à l’Assemblée nationale sur la non-couverture du retour historique de Me Abdoulaye Wade à Dakar, à la veille de la Présidentielle de 2000, par la Rts qui a préféré braquer ses caméras sur une manifestation des socialistes à la Foire de Dakar, avait dit que la couverture était «verte» parce que, vue de ses binocles, ce jour-là, «l’actualité était verte». Une curieuse et daltonienne façon de voir les choses selon la manière qui vous arrange, mais qui devient toxique quand vous cherchez à l’imposer à des milliers de Sénégalais par rapport auxquels vous n’êtes ni plus intelligents ni mieux formés. Les nouvelles autorités de la République gagneraient à faire attention à cette catégorie de propagandistes qui leur rendent un mauvais service. Conseil gratuit !