investissements dans les infrastructures au second plan. Enfin, les conflits politiques et l’instabilité chronique dans certaines régions ont gravement entravé les projets d’infrastructure.
Un apport non négligeable pour l’hôte
Face à cette situation, la CAF a durci le ton, n’hésitant plus à sanctionner les pays récalcitrants en les contraignant à jouer leurs matchs à l’extérieur. Une décision pragmatique mais aux lourdes conséquences pour les équipes concernées. Outre le désavantage évident de jouer loin de leur public, ces délocalisations engendrent des coûts logistiques supplémentaires que les fédérations peinent souvent à assumer.
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Le Maroc et l’Afrique du Sud, deux nations disposant d’infrastructures de qualité, sont ainsi devenues des destinations privilégiées pour accueillir ces rencontres «exilées». Un apport non négligeable pour l’économie locale, sans compter les retombées indirectes liées au tourisme et à la promotion de l’image de ces deux pays.
Le Maroc, une rampe de lancement pour le football africain
Parmi les destinations privilégiées par ces équipes en quête d’un terrain neutre, le Maroc se démarque comme un véritable havre. Dans le cadre des troisième et quatrième journées des éliminatoires africaines de la Coupe du monde 2026, les stades marocains accueilleront 9 matches internationaux du 5 au 11 juin 2024. Ainsi, huit équipes africaines ont décidé d’organiser leurs matches à domicile, au Maroc: Sierra Leone, République Centrafricaine, Gambie, Sao Tomé-et-Principe, Djibouti, Guinée, Tchad et Seychelles.
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Grâce à ses infrastructures modernes et son expertise reconnue dans l’organisation d’événements sportifs majeurs, le Royaume offre aux sélections africaines un cadre idéal pour disputer leurs rencontres. En effet, plusieurs stades du Maroc disposent d’enceintes modernes et de qualité, et sont surtout aux normes de la CAF.
Au-delà de ses infrastructures de qualité, le Maroc bénéficie d’un atout géographique non négligeable. Situé au carrefour de l’Afrique du Nord et de l’Afrique de l’Ouest, le pays représente une destination idoine pour les sélections de ces régions. Les déplacements sont ainsi facilités, réduisant les coûts logistiques et les efforts de préparation.
Cette position stratégique convainc d’ailleurs de nombreuses fédérations. Cependant, cet engouement soulève également des interrogations quant à la pérennité de ce modèle. En effet, si le Maroc se positionne aujourd’hui comme un refuge pour le football africain, cela souligne également les carences infrastructurelles qui persistent sur le continent. Un constat qui interpelle les instances dirigeantes et les gouvernements à accélérer les investissements dans ce domaine crucial pour le développement du sport.
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La CAF, en particulier, se doit de renforcer ses exigences et d’accompagner davantage les pays membres dans la mise aux normes de leurs installations sportives. Des efforts qui passent nécessairement par un soutien financier et technique accru, ainsi que par une volonté politique affirmée de valoriser le football comme vecteur de développement économique et social.
Pourquoi pas la Côte d’Ivoire?
Soulignons que parmi les huit équipes africaines qui ont décidé d’organiser leurs matches à domicile au Maroc, au moins trois sont géographiquement proches de la Côte d’Ivoire, notamment la Sierra Leone, la Gambie et la Guinée. Alors que la Côte d’Ivoire vient d’accueillir la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2023 et dispose donc d’infrastructures récentes et de qualité répondant aux normes de la CAF, on peut légitimement s’interroger sur les raisons qui poussent ces pays voisins à ne pas choisir la Côte d’Ivoire comme terrain neutre pour ces matchs importants. En effet, organiser ces rencontres en Côte d’Ivoire présenterait plusieurs avantages non négligeables, comme des conditions climatiques similaires et une moindre fatigue liée aux déplacements.
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Il faut savoir qu’au Maroc, les pays contraints de choisir des terrains neutres bénéficient d’un certain nombre de services qui leur sont offert à titre gracieux, hors-mis les frais d’hébergement. Cependant, cette décision de privilégier le Maroc ne doit pas être interprétée uniquement comme le résultat d’un «lobbying» du Royaume. Le Maroc bénéficie certes d’une expérience reconnue dans l’organisation d’événements sportifs majeurs, mais son choix repose également sur des critères objectifs, comme la répartition géographique de ses stades modernes dans plusieurs villes, offrant ainsi plus d’options aux équipes. De plus, le Royaume dispose d’infrastructures hôtelières et de transports adaptées pour accueillir ces compétitions dans les meilleures conditions.
Il convient donc de nuancer l’affirmation selon laquelle ces choix seraient uniquement dictés par un « lobbying » marocain. Les pays concernés ont probablement pris en compte une multitude de facteurs logistiques, financiers et organisationnels avant d’opter pour le Maroc comme terrain neutre.
Loin d’être une fatalité
Loin d’être une fatalité, cette situation pourrait être l’occasion pour ces pays de se mobiliser et de relever le défi. En effet, plusieurs nations ont déjà entamé des travaux pour mettre leurs installations aux normes. C’est le cas de l’Ouganda, qui espérait en Avril 2024 obtenir le feu vert de la CAF après avoir entrepris des travaux de rénovation. Le Soudan du Sud, quant à lui, devrait mettre fin à un long exil en inaugurant un nouveau stade à Juba, lui permettant d’accueillir son voisin soudanais pour un derby très attendu le 11 juin 2024. Ainsi, cette liste rouge de pays contraints de choisir des terrains neutres connait régulièrement des révisions.
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De 22 pays à 20, puis à 17. Quelques semaines plus tôt, la liste des 20 pays contraints de choisir des terrains neutres comprenait le Burkina Faso, la Guinée, la Gambie, le Niger, la République centrafricaine, le Soudan, la Sierra Leone, l’Ethiopie, le Botswana, le Burundi, l’Eswatini, la Guinée-Bissau, le Kenya, le Lesotho, le Libéria, la Namibie, le Soudan du Sud, Sao Tomé, l’Ouganda, et le Zimbabwe.
Ces exemples illustrent la détermination de certains pays à sortir de la «liste rouge» et à se doter d’infrastructures dignes des compétitions internationales. Cependant, le chemin reste long et semé d’embûches, notamment en termes de financement et de délais de construction.
Il est important de souligner que cette situation n’est pas seulement une question de prestige sportif, mais aussi un enjeu de développement économique et social. Des infrastructures modernes et fonctionnelles peuvent attirer des investissements, stimuler le tourisme et favoriser la pratique sportive au sein des populations locales.
La carotte et le bâton
Les instances dirigeantes du football africain sont donc face à un défi de taille: accompagner les pays les plus défavorisés dans la modernisation de leurs infrastructures, tout en maintenant une pression suffisante pour garantir le respect des normes internationales. Un équilibre délicat à trouver, mais indispensable pour assurer un développement harmonieux et durable du football sur le continent.
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Car au-delà des enjeux sportifs, le manque d’infrastructures adéquates a également un impact économique et social considérable. Les stades sont des vecteurs de fierté nationale, des moteurs de développement touristique et des outils de cohésion sociale. Leur absence prive les populations locales de lieux de rassemblement et de divertissement, et freine l’essor d’une véritable industrie du sport.
Il est donc crucial que les autorités africaines, épaulées par la FIFA et les organisations internationales, fassent de la construction et de la rénovation des stades une priorité. Des investissements massifs, assortis d’une véritable stratégie de développement à long terme, sont nécessaires pour combler ce retard infrastructurel chronique.
Seule une telle mobilisation permettra au football africain de se hisser au niveau des autres continents et d’offrir à ses populations des infrastructures dignes des plus grandes compétitions internationales. Un défi de taille, mais qui en vaut la peine, tant le football est un vecteur de passion, d’unité et de développement pour le continent africain.
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