Le président Macky Sall et son principal opposant Ousmane Sonko se livrent une bataille à distance pour la victoire de leurs candidats à la présidentielle de dimanche prochain.
Le duel entre les deux titans de la scène politique sénégalaise que sont Ousmane Sonko, leader de l’opposition, et son ex-plus farouche adversaire, le président de la République sortant Macky Sall, n’aura pas lieu. Le premier n’ayant pas réussi à participer à la présidentielle pour cause de condamnation pénale invalidante, et le second empêché constitutionnellement de le faire, ils sont tout de même parvenus à placer chacun leur cheval pour la compétition électorale qui se tiendra ce dimanche. On assistera donc, pour l’essentiel, à un duel par procuration entre leurs poulains. Toutefois, si le leader de Pastef soutient résolument son candidat, Bassirou Diomaye Faye, l’actuel locataire du Palais, lui, a donné tout au début, et jusqu’au milieu de la campagne électorale, l’impression de ne pas souhaiter la victoire du sien. Pour l’heure, les deux grands favoris pour la victoire finale ont investi le terrain à la rencontre des électeurs des grandes villes et des bourgades reculées. Bassirou Diomaye Faye a, à ses côtés son leader, Ousmane Sonko, alors que Amadou Ba est sans son mentor, Macky Sall, et ne peut pas compter non plus sur le soutien e plusieurs cadres de l’APR.
Sonko, soutien indéfectible de Diomaye…
C’est une image que beaucoup de personnes rêvaient de voir. Sonko aux côtés de Bassirou Diomaye Faye, debout sur leur véhicule au milieu d’une foule déchaînée, les mains levées en signe de victoire, les deux hommes, ex-prisonniers libérés le même jour, battant ensemble compagne. C’est devenu réalité depuis leur libération dans la nuit de jeudi dernier. Ainsi, dès que leur sortie de prison a été annoncée, des foules immenses avaient envahi les rues de Dakar et de sa banlieue. Des milliers de militants et sympathisants ont convergé devant le domicile de leur idole politique Ousmane Sonko à la cité Keur Gorgui. Durant toute cette procession carnavalesque qui avançait à un rythme de caméléon, le nom de Ousmane Sonko était chanté par des militants pressés de revoir leur leader. C’est arrivé à la mythique place Soweto que le candidat Bassirou Diomaye Faye a fait son apparition pour s’adresser à la foule contrairement à son leader qui tout le long du parcours s’est éclipsé. Ceci a été interprété par un choix délibéré de Ousmane Sonko qui voulait lancer un message fort à ceux qui doutaient de sa constance dans son choix. C’est pourquoi il a agi de la sorte pour permettre à Bassirou Diomaye Faye, candidat de la coalition «Diomaye Président, d’être en contact direct avec les militants du Pastef. Cette confiance a été renouvelée dès le lendemain à travers une conférence de presse. Au cours de cette rencontre, les deux hommes ont accordé leurs violons pour s’exprimer sur leur situation carcérale, apporter des éclaircissements sur les discussions avec le régime, et dégager les principaux axes de leur programme… Chacun des deux en a profité pour faire des témoignages très appréciés par l’assistance l’un sur l’autre. Depuis samedi donc, en compagnie des leaders de la coalition, ils sont à l’intérieur du pays pour rencontrer leurs militants. Autant dire qu’entre les deux hommes le slogan «Sonko Moy Diomaye, Diomaye Moy Sonko» est plus qu’une réalité.
Macky/ Amadou : mieux vaut tard que jamais…
C’est un secret de Polichinelle de dire que l’APR a traversé une zone de turbulences depuis que le chef de l’État Macky Sall, qui en est le chef, a dévoilé le nom de Amadou Ba comme étant son choix pour lui succéder. Aussitôt, trois responsables de premier plan de la formation ont décidé de faire acte de candidature à l’élection présidentielle. Ensuite, on a assisté à des tirs groupés contre l’ex-Premier ministre et venant de grands responsables pour exprimer leur désaccord sur le choix porté sur lui. On a assisté alors à une guerre interne pro et anti-Amadou Ba, sous les yeux du chef de l’Etat qui semblait l’encourager. Mieux, son candidat était tellement chahuté par des gens qui lui sont très proches que d’aucuns l’ont soupçonné de vouloir se débarrasser de Amadou Ba au profit d’un autre candidat. D’ailleurs, c’est ce qui constituerait la véritable raison du report de l’élection présidentielle et non pas comme annoncé la crise institutionnelle entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel. A l’origine de cette crise, des accusations d’avoir corrompu deux membres de ce Conseil pour invalider la candidature de Karim Wade portées contre Amadou Ba. Mais, malgré tous ces coups bas, l’exPremier ministre est resté debout et résilient face à ses détracteurs. Une des preuves c’est sa position déclarée lors du dernier dialogue national où il a exprimé, contre toute attente, sa préférence pour la tenue de l’élection présidentielle avant le 2 avril. C’est dans ce climat très confus et compliqué que le candidat de la mouvance présidentielle a débuté sa campagne alors qu’il était lâché par la plupart de ses camarades de parti. Lesquels ont brillé par leur absence lors de la réunion de son directoire de campagne convoquée la veille du démarrage de la campagne. Comme si cela ne suffisait pas, il a été limogé de son poste de Premier ministre en même temps qu’étaient virés du gouvernement ses plus proches souteneurs comme les ministres Lat Diop, Doudou Ka, Cheikhou Oumar Anne et Fatou Diané. Ce n’est que quatre jours après me début de la campagne qu’il s’est entretenu avec Macky Sall pour arrondir les angles. Lequel a finalement accepté de revenir à de meilleurs sentiments pour lui exprimer son soutien et a demandé à tous les responsables de son parti et de la coalition d’accompagner le candidat Amadou Ba.
On parle même du déblocage de gros moyens financiers qui seraient mis à sa disposition pour les dépenses liées à la campagne, des fonds qui étaient jusque-là indisponibles. Peut-être que d’ici la fin de la campagne, prévue ce vendredi, le Président Macky Sall descendra sur le terrain aux côtés de Amadou Ba. Ne serait-ce que pour rassurer son camp et mettre fin à toute suspicion sur les relations entre lui et son cheval.
Le Témoin