Comme commande de l’Exécutif, la loi portant amnistie générale est passée comme lettre à la poste. Malgré l’opposition de députés de Taxawu, de Pastef et de certains du groupe parlementaire des non-inscrits, la loi a été adoptée par les parlementaires. Malgré leur position ambiguë en Conseil des présidents, les députés de Pastef ont finalement dit «non» au projet de loi relatif à l’amnistie. A l’issue du vote, 94 députés ont voté «pour», contre 48 «non» et deux abstentions. Ayant pour portée de promouvoir la paix, instaurer le dialogue et la réconciliation nationale pour reprendre les mots du ministre de la Justice et de certains parlementaires de la majorité présidentielle, la loi en lieu et place d’unir les députés les a plutôt divisés. Une division notée aussi bien dans les groupes parlementaires que dans le même camp de Pastef où des députés du même parti ont pris des positions divergentes. Président du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi, Birame Soulèye Diop ne dit pas non à la loi d’amnistie, mais il a émis un certain nombre de zones d’ombre dans cette loi. «Il nous faut savoir la quintessence de cette loi. Je ne dirai pas non à la loi d’amnistie. C’est le président Macky Sall qui vient nous faire cette proposition. Pourquoi la rejeter ! D’autant plus que si nous sommes édifiés, nous verrons cependant, la conduite à tenir», tonne l’administrateur de l’ex Pastef. Quant au député Cheikh Thioro Mbacké, «Pastef n’a jamais été demandeur». Idem Ismaïla Diallo qui a insisté sur le fait que «Pastef a payé le plus lourd tribu durant les manifestations de 2021 à 2024». Ce n’est pas le cas pour TAS des non inscrits. Pour lui, «cette loi montre que le Président Macky Sall a failli à sa mission pour faire la lumière sur tout ce qui s’est passé. Cette amnistie entre dans le cadre de ce coup d’Etat constitutionnel que nous a servi le Président Macky Sall. C’est un deal politique pour rebattre les cartes et se projeter vers de nouvelles élections», estime Thierno Alassane Sall. Cependant, dans sa réponse Mme le Garde des Sceaux a disserté sur le champ d’application de la loi d’amnistie. Laquelle, selon Me Tall, «est fixé par l’article 1 qui dit sont amnistiés de plein droit tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d’infractions criminelles ou correctionnelles tenus entre le 1erfévrier 2021 et le 25 février 2024 tant au Sénégal qu’à l’étranger se rapportant à des manifestations en lien avec des motivations politiques y compris par celles faites par tous supports de communication de leurs auteurs». La réponse fait suite aux interrogations des députés de l’ex-Pastef demandant si les crimes de sang seront pris en compte par la loi d’amnistie. 240 millions débloqués par Pastef dans l’assistance des victimes Pastef ou l’ex Pastef n’a jamais abandonné les victimes et ses détenus «politiques». Sonko et ses camarades les ont assistés à chaque fois que le besoin se faisait sentir. La révélation est du député Ayib Daffé. Selon lui, «Plus de 240 millions dépensés en frais d’assistance pour les détenus et les victimes des manifestations». Selon lui, malgré la vague de libérations de détenus politiques enregistrée, 400 détenus politiques sont toujours dans les prisons. Les homicides, il les évalue à 60 victimes. Saisine de la Cpi En plus d’interpeller Mme le Garde des Sceaux sur l’opportunité de la loi, certains députés sont allés plus loin se demandant s’il ne s’agissait avec cette loi d’une échappatoire pour le régime face à la plainte devant la Cour pénale internationale. Après avoir disserté de long en large sur les possibilités de saisine de la Cpi, elle dit être prête à répondre à la Cpi. «Mais il faut savoir de quoi on parle. Qui peut aller à la Cpi, et pourquoi doit-on aller à la Cpi ? Celui qui peut aller, c’est un Etat-partie signataire, et le Sénégal est signataire. Sinon, c’est le procureur, lui-même, de la Cour pénale… qui peut ouvrir une enquête et le diligenter. Sinon, ce sont les Nations Unies qui peuvent le faire. Voilà les trois personnes qui peuvent déclencher une procédure : L’Etat qui a signé, le Procureur de la Cpi ou alors l’Assemblée générale des Nations Unies», a développé Me Aïssata Tall Sall. Magib GAYE