Dans un entretien avec Associated Press, Macky Sall a menacé de donner le pouvoir à des «forces organisées», en langage plus clair, à des militaires, si l’opposition ne répond pas à son dialogue pour valider sa rallonge de 10 mois.
«Mon rôle en tant que président de la République, le temps qu’il me reste à la tête de l’Etat, c’est de toujours tendre la main et de dire aux acteurs politiques: Faites attention ! Parce que nous ne sommes pas les seuls sur la scène. Et si les politiques ne sont pas capables de s’entendre sur l’essentiel, d’autres forces organisées le feront à leur place. Et là, ils perdront tous, le pays avec», a lancé Macky Sall. Une menace qui a suscité des réactions de la classe politique. «Lors de son interview avec Associated Press, j’ai entendu avec effarement l’évocation subliminale du Président Macky Sall de possibles bruits de bottes si les politiciens n’acceptaient pas sa rallonge illégale de 10 mois à la tête de l’Etat», signale l’ex Pm Mimi Touré. Selon elle, si ce n’est pas une menace ça y ressemble! «Le Sénégal est une démocratie solide qui n’a jamais connu de coup d’Etat en 64 ans d’existence comme Etat indépendant et il n’y a aucune raison pour qu’il ne continue pas d’en être ainsi», poursuit-elle sur X. Hier, lors de la conférence de presse de la coalition DiomayePrésident, elle martèle: «Il a fait savoir que si l’opposition ne répond pas à son dialogue, d’autres vont venir prendre le pouvoir. Cela veut dire qu’il encourage un coup d’Etat militaire. C’est ce que tout le monde a compris, à travers ses propos. Mais c’est inqualifiable. On lui a donné le pouvoir par la démocratie et il va nous le rendre par la démocratie. C’est vous président, Macky Sall qui devrait à faire attention. Le 02 avril 2024, votre mandat sera terminé».
Enseignant en sciences politiques, Jean Charles Biagui estime que les propos de Macky Sall correspondent aux discours habituels des dirigeants des régimes autoritaires de type dictatorial. «Ils se résument à travers une idée très simple: c’est moi où le déluge. Les propos de Macky Sall traduisent un culte de la personnalité assumé. Malheureusement pour lui, sa communication politique est de plus en plus inadéquate. Elle ne tient pas compte de la gravité du moment et des enjeux liés à son coup de force», explique Dr Biagui. Selon lui, ses propos confirment davantage qu’il n’avait nullement l’intention de renoncer à un troisième mandat. «Si Macky Sall persiste dans sa volonté de ne pas respecter la constitution et d’être maître du jeu par tous les moyens, il faut malheureusement s’attendre à une intensification de la crise. Celle-ci faut-il le rappeler est le produit de sa seule volonté et de sa boulimie du pouvoir», prévient-il. Pendant ce temps, le Sénégal compte ses morts.
Magib GAYE