Pour une surprise, cela en est une. Le président de la République a déjoué tous les pronostics en décidant de ne pas briguer un troisième mandat en 2024. «Ma décision longuement et mûrement réfléchie est de ne pas être candidat à la prochaine élection du 25 février 2024.Et cela, même si la constitution m’en donne le droit. En effet, depuis la révision constitutionnelle de 2016, le débat juridique a été définitivement tranché par la décision du Conseil constitutionnel n°1-C-2016 du 12 février 2016», a déclaré le chef de l’Etat.
Macky Sall affirme qu’il sait que cette décision surprendra tous ceux qui souhaitent le voir encore guider la construction du pays qui trouve de plus en plus ses marques. «Mais le Sénégal dépasse ma personne et il est rempli de leaders également capables de pousser le pays vers l’émergence», poursuit-il ajoutant qu’on a tant spéculé, commenté sur sa candidature à cette élection. Le chef de l’Etat affirme qu’il n’a jamais voulu être l’otage de cette injonction permanente à parler avant l’heure, car ses priorités portaient surtout sur la gestion d’un pays, d’une équipe gouvernementale cohérente et engagée dans l’action pour l’émergence, surtout dans un contexte socio-économique difficile et incertain.
«Contrairement donc aux rumeurs qui m’attribuaient une nouvelle ambition présidentielle, je voudrais dire que j’ai une claire conscience et mémoire de ce que j’ai dit, écrit et répété ici et ailleurs, c’est-à-dire que le mandat de 2019 était mon second et dernier mandat. C’est cela que j’avais dit et c’est cela que je réaffirme ce soir», insiste le président Macky Sall indiquant qu’ila un profond respect pour les Sénégalais qui l’ont lu et entendu. «J’ai un code d’honneur et un sens de la responsabilité historique qui me commandent de préserver ma dignité et ma parole», souligne Macky Sall qui rend ici un hommage à ses prédécesseurs, les présidents Léopold Sédar Senghor, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade dont les parcours sont, bien sûr, différents mais qui ont contribué chacun à construire l’image de ce Sénégal démocratique qu’il faut perpétuer. Il assure qu’il ne saurait faire moins.
Toutefois, Macky Sall garantit que d’ici la transmission du pouvoir au futur président de la République, le 2 avril 2024, il assumera avec «responsabilité et fermeté» toutes les charges qui incombent à sa fonction. «En vertu du mandat que vous m’avez confié et en étroite cohérence avec mon serment constitutionnel, je continuerai de consacrer toutes mes forces à défendre, sans failles, les institutions constitutionnelles de la République, le respect des décisions de justice, l’intégrité du territoire, la protection des personnes et des biens. Je resterai à vos côtés, à votre écoute et au service de la République et de la Nation. Nous avons des réalisations indéniables et un potentiel incroyable. Mais soyons vigilants et conscients des difficultés, des obstacles qui sont réels et de l’activisme des ennemis de l’intérieur et de l’extérieur», dit-il encore.
Une décision à contre-courant
Tous les actes qu’il a posés depuis sa réélection en 2019 militaient en faveur d’une troisième candidature. Tous ses partisans qui ont affirmé leur opposition au troisième mandat ont été limogés. C’est le cas de Moustapha Diakhaté, Sory Kaba, Moussa Diop, etc. Tout le contraire de ses partisans qui théorisent sa 3e candidature qui ne sont nullement inquiétés. Aujourd’hui, Macky Sall et ses partisans ne parlaient même plus de troisième mandat, mais de deuxième quinquennat. Même le ministre de la Justice Ismaëla Madior Fall qui avait dit que le chef de l’Etat ne peut pas briguer un troisième mandat est revenu sur ses propos. «Le troisième mandat est devenu un délit d’opinion à l’Apr», avait déclaré Abdoul Mbaye.
Pourtant, rappelle l’analyste politique Assane SAMB, en décidant d’opérer une limitation des mandats à deux dans la Constitution de 2001, le législateur sénégalais avait institué une barrière pour que tous ceux gèrent le pays soient contraints de quitter le pouvoir après deux mandats. Le référendum de 2016 n’a fait que confirmer cela. L’article 27, quelqu’en soit la lettre qui continue à faire polémique, est clair dans son esprit : la limitation des mandats à deux.
Charles Gaïky DIENE