Le Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) a mis, hier, sur le marché de l’emploi, 33 nouveaux journalistes dont 13 en Presse écrite, 8 en Radio et 12 Télévision. Un moment solennel mis à profit par la direction de l’Institut, et les étudiants pour étaler leurs in- quiétudes mais aussi réaffirmer la volonté de l’école de garder son étiquette panafricaine.
Du haut du présidium, Alassane Souleymane, président de l’Amicale des maliens du Cesti (Amacesti), large banane au vi- sage, est tout émoustillé d’être parmi ses anciens encadreurs, ses anciens camarades d’école du Cesti. Une joie qui a ponctué tout le long de son discours. Etreint par l’émotion, il dira qu’«il n’est pas exagéré de dire un Cesti du Mali». Une raison qui est à chercher dans le fait, qu’à ses yeux, de sa création à nos jours, rares sont les promotions où il n’y a pas eu de Maliens. «Exceptionnelle, riche, fraternelle, hyper dynamique, ainsi se résume la coopération Cesti-Mali qu’elle perdure encore et encore», émet Alassane Souleymane. Un souhait qui n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Puisque, sou- ligne le directeur du Cesti, Mamadou Ndiaye, c’est pour renforcer son ancrage africain que le Mali a été choisi comme invité d’honneur à la cérémonie de sortie de la 50 ème promotion de l’un des prestigieux instituts de l’université de Dakar. Même s’il faut admettre que la vocation panafricaine du Cesti s’est un peu étiolée, avec le retrait des pays comme le Gabon qui envoyait régulièrement une bonne brochette d’étudiants, Mamadou Ndiaye indique que son institut peut s’enorgueillir d’avoir formé de nombreux journalistes africains ; et ces derniers ont aidé leurs pays à mettre en place des écoles de formation en journalisme. «C’est le cas en Côte d’Ivoire, en Guinée, au Burkina Faso, au Bénin et au Mali», a-t-il listé, hier, lors de la cérémonie de sortie de la 50 ème promotion. Cette dernière a pour parrain l’éminent journaliste feu Jean Meïssa Diop, ancien rédacteur en chef de Walf- Quotidien et formateur au Cesti. Ainsi, les qualités humaines et professionnelles du parrain ont rythmé les différents discours, dont celui plein d’émotion de son épouse, Mme Diariétou Ndiaye Diop.
A l’endroit des récipiendaires, le Pr Ama- dou Bachir Niang, après avoir rapporté «les félicitations» et «les encouragements» de la communauté universitaire, a exhorté les 33 récipiendaires à avoir en bandoulière les valeurs cardinales de l’université de Dakar, à savoir «l’attachement à la science et à la vérité, l’acceptation de la contradiction, le respect des libertés d’expression et d’opinion». «Le journaliste doit une part se contraindre à la vérité, à la rigueur, à l’exactitude, d’autre part à l’intégrité, l’équité dans le traitement de l’information. L’éthique et la déontologie doivent guider son action de tous les jours», renchérit, pour sa part, Racky Noelle Wane de la 27 ème promotion du Cesti, revenue à l’institut panafricain en tant qu’enseignante. Invitée à livrer un viatique en direction des nouveaux diplômés, Mme Wane explique que la responsabilité et la transparence sont les principes essentiels du journalisme en ce qu’elle renforce la confiance du public. «Si des erreurs sont commises, il est important de les reconnaître rapidement, de les rectifier et de présenter des excuses si nécessaires», a- t-elle estimé. «Autoroute de la désinformation…»
Un faux-pas que peuvent éviter les étudiants, selon Mamadou Ndiaye, le directeur du Cesti. Selon lui, l’institut à vocation panafricaine continue de remplir vaillamment sa mission en fournissant sur le marché de l’emploi des journalistes de qualité. Néanmoins, il n’a pas manqué de faire part de ses inquiétudes. «Reconnaissons-le, au moment où de nombreuses initiatives sont prises pour améliorer l’environnement socio- économique des médias et renforcer les capacités professionnelles des journalistes, la profession subit une crise multiforme. Avec la radicalisation toxique et partisane du climat politique, associé au sensationnisme de certains médias, aux réseaux sociaux débridés, aux algorithmes programmés pour la virilité, la vérité est attaquée de toutes parts. Internet et les réseaux sociaux, naguère considérés comme les supports technologiques qui consacraient une certaine forme de liberté d’expression, sont devenus une autoroute de la désinformation», se désole-t-il.
Malgré tout, a espéré Mamadou Ndiaye, en dignes produits du Cesti, ces 33 nouveaux diplômés seront restés professionnels. «Vous ne devez pas perdre de vue que le journalisme est un métier qui répond à des normes de collecte et de traitement de l’information qui ne souffrent d’aucune improvisation, dans le respect des principes éthiques et des règles déontologiques», a déclaré le directeur du Cesti. Créé en 1965, le Centre d’études des sciences et tech- niques de l’information, un des 12 instituts de l’université de Dakar, a été fermé en rai- son des événements de mai 1968 après seulement trois ans d’existence. Rouvert en 1970, il a formé 1 332 journalistes dont 722 Sénégalais et 610 non Sénégalais.
Ndèye Maguette SEYE