Alors que la procédure judiciaire annoncée pour situer les coupables de la mort de 14 personnes en mars 2021 ne semble plus avancer, trois personnes dont un policier ont perdu la vie lundi à Dakar et Ziguinchor dans le cadre du procès opposant Ousmane Sonko à Adjir Sarr.
Le régime de Macky Sall va-t-il battre le record du régime de Abdoulaye Wade (2000-2012) en nombre de morts dans des manifestations politico-judiciaires ? A moins de quelques mois de l’élection présidentielle du 25 février 2025, le nombre de morts sous le régime de Macky Sall ne cesse de grimper. Rien qu’entre mars 2021 et mai 2023, 17 personnes ont perdu la vie dans des manifestations liées au procès opposant le leader de Pastef, Ousmane Sonko à Adji Sarr, une ancienne employée de salon de beauté. Sans compter les personnes qui ont perdu la vie dans d’autres manifestations ou dans des lieux de privations de liberté. A la suite de l’accession de Macky Sall au pouvoir en 2012, Amnesty international avait annoncé, dans l’un de ses rapports, un bilan de 22 Sénégalais tués par les forces de l’ordre dont sept lors des manifestations contre une troisième candidature de Abdoulaye Wade à l’élection présidentielle de 2012, en plus des centaines de blessés. A l’époque, l’actuel chef de l’Etat sénégalais était la figure de proue de l’opposition.
A présent, les rôles ont changé. Les ambitions aussi. De nombreux Sénégalais manifestent contre le régime de Macky Sall. Ils disent notamment revendiquer leurs droits et libertés civiques. Et cela n’est pas sans conséquence. Une vingtaine de personnes y ont laissé leur vie.
Des enquêtes annoncées, mais presque sans effet
Ce qui était critiqué du temps de Abdoulaye Wade semble avoir de beaux jours sous le règne de Macky Sall. Sous le régime libéral, Amnesty dénonçait «la répression érigée en mode de gouvernance par le régime d’Abdoulaye Wade». La même caricature pourrait également être faite de l’actuel régime. Surtout que la commission d’enquête annoncée aux lendemains des événements de mars 2021 n’a toujours pas donné les effets escomptés, à savoir rendre justice aux victimes. Cela reviendrait d’abord à identifier leurs «bourreaux».
En tout cas, en avril 2012, lors d’une conférence de presse, le gouvernement, par le biais de Sidiki Kaba, ministre des Forces armées, avait annoncé l’ouverture d’une commission d’enquête pour établir les circonstances des incidents de mars 2021, dans l’objectif de situer les responsabilités et le cas échéant sanctionner les coupables. Mais aucune information n’a été donnée sur la mise en place de cette commission d’enquête et au mois de décembre 2021, le président de la République Macky Sall a annoncé qu’elle n’était plus à l’ordre du jour, et qu’une procédure judiciaire avec des enquêtes sur ces incidents était en cours. «La commission d’enquête est mise en place, nous avons engagé une procédure judiciaire interne, avec des enquêtes internes, elle attendra que l’enquête nationale se fasse et que les conclusions soient connues», avait dit Macky Sall dans une interview à Rfi en décembre 2021. Depuis lors, d’autres morts se sont ajoutées aux 14 victimes de mars 2021. Jusqu’à présent, aucun coupable n’a été désigné. Des familles endeuillées continuent de réclamer justice.
Baba MBALLO