La moisson est abondante, mais les producteurs n’arrivent pas à vendre leur production. Dans la Vallée du fleuve Sénégal d’importantes quantités d’oignons risquent de pourrir à la cause de la mévente due à l’importation massive d’oignons.
De l’oignon local cherche désespérément preneur. Des milliers de tonnes ont été récoltées, d’autres quantités importantes sont toujours dans les périmètres maraîchers et attendent d’être acheminées au niveau des zones d’exploitation de Boubé, Guiya, Ndiawar, Wouro Madiwou, Tarédji et Thillé Boubacar. Du coup, les producteurs sont, depuis plusieurs semaines, très inquiets. Leur importante production est en souffrance.
Mamoudou Sall, le président de l’association des producteurs d’oignons de la vallée, pointe un doigt accusateur sur l’Autorité de régulation du marché (Arm) et le ministère du Commerce. Il les accuse d’avoir failli à leur mission et d’être à l’origine de leurs déboires. D’après lui, malgré le gel des importations, depuis quelques mois, une forte quantité d’oignons importés a envahi le marché sénégalais. «Nous sommes au courant des grossistes qui ont été privilégiés et qui continuent à importer», dit-il ajoutant que les campagnes se suivent et se ressemblent depuis que le patron de l’Arm est à la tête de cette structure. D’après lui, ce dernier ne discute pas des problèmes de la filière avec les véritables producteurs. «Certes, l’Etat a beaucoup investi dans l’agriculture, mais, aujourd’hui, force est de constater que l’échec est bien palpable sur le terrain», indique Mamoudou Sall. Les producteurs exigent l’arrêt de l’importation prévue entre les mois de février et d’août
Plusieurs camions sont immobilisés avec leurs chargements au niveau du croisement de Boubé, dans la commune de Ndiayéne Pendaw. Leurs propriétaires et les acheteurs ne sont pas tombés d’accord sur le prix. Ces producteurs se disent très inquiets du prix proposé par les acheteurs. «Aujourd’hui, avec tout ce que nous avons dépensé dans nos périmètres, si nous ne pouvons vendre le kilogramme d’oignon qu’à 200 francs voire 300 francs, il y a un sérieux problème. Comment peut-on s’en sortir avec un tel prix dérisoire», pestent des producteurs de Boubé. Selon eux, le sac de 40 ou 50 kg qui était vendu dès les premières récoltes à 10 000 francs, est aujourd’hui vendu sur le marché à 6 000 francs. «Il se peut même que le sac descende jusqu’à 4 000 francs ; cela n’est pas exclu», expliquent ces producteurs.
L’autre phénomène qui inquiète les producteurs, c’est la forte canicule qui sévit dans la vallée. Elle pourrait être, sous peu, fatale, si la production n’est pas écoulée rapidement. «Certes, il y a des hangars dans la zone, mais pour protéger et écouler l’oignon, il va falloir mettre en place des unités de conservation dignes de ce nom, c’est-à-dire des chambres froides un peu partout dans les deux départements de Dagana et celui de Podor», souligne M. Guèye, producteur à Dagana. Cette exigence est aussi celle de ces milliers de producteurs.
Abou KANE