Le phénomène des grossesses en milieu scolaire prend de plus en plus de l’ampleur au Sénégal. Hier, lors de la Journée de lancement de la campagne de la «stratégie zéro grossesse à l’école», Pr Babacar Fall, coordonnateur du Groupe pour l’étude et l’enseignement de la population (Geep) a révélé que 1 075 cas en milieu scolaire ont été recensés en 2020.
La question des grossesses en milieu scolaire est un phénomène préoccupant. La preuve, en 2019, 1 321 cas ont été dénombrés au niveau national. En 2020, selon Pr Babacar Fall, coordonnateur du Groupe pour l’étude et l’enseignement de la population (Geep), 1 075 grossesses ont été identifiées dans les écoles. Pis, précise Pr Fall, depuis 2013, il y a au moins mille cas de grossesses en milieu scolaire recensés chaque année. Et ces derniers cas se répartissent, dit-il, sur l’ensemble du territoire national. Aucune région n’est épargnée. Seulement l’on constate un nombre relativement limité de cas de grossesses dans certaines contrées du pays. «Il y a des zones où le phénomène persiste beaucoup notamment dans le sud du pays que ça soit dans les régions de Sédhiou, à Ziguinchor et Kolda. Et récemment nous avons constaté que ce phénomène réapparait nettement au niveau de la région de Kaffrine, dans la zone rurale de Thiès et même au niveau de la banlieue de Dakar. Ce phénomène est devenu très grave. Parce que, nous l’avons remarqué au niveau des classes de premier cycle notamment de la 6ème à la 3ème qui correspond à l’étape de l’adolescence», alerte le coordonnateur du Geep.
Lequel estime que si les autorités du pays ne créent pas un environnement sécurisé, d’information et de protection, on risque de voir ce phénomène s’amplifier. C’est la raison pour laquelle il pense que c’est très important que l’ensemble des acteurs des ministères de l’Education nationale, de la Jeunesse, de la Santé mais également l’ensemble des structures et associations puissent contribuer à limiter les effets des grossesses des jeunes filles en milieu scolaire. Sinon prévient-il, tous les investissements qui sont faits pour assurer le maintien des filles à l’école pour développer les capacités de leadership des jeunes filles sont voués à l’échec.
«50 % des grossesses en milieu scolaire concernent des mariages précoces»
C’est pourquoi, dit-il, il est important qu’il y ait une synergie nationale. Cela appelle plusieurs missions d’informations, des activités de sensibilisation et d’informations des jeunes filles sur leur corps à l’étape de l’adolescence. Mais aussi une prise de conscience de la société avec la mobilisation des parents d’élèves, des autorités scolaires pour qu’on puisse déployer des leçons de vie, mesurer le phénomène avec l’observatoire sur les grossesses en milieu scolaire, sensibiliser l’opinion nationale et internationale. Et par la même occasion créer l’ensemble des conditions pour que les jeunes filles soient préservées et qu’elles puissent poursuivre leur scolarité sans être victimes des grossesses en milieu scolaire.
Pr Babacar Fall affirme que le phénomène des grossesses en milieu scolaire est dû en grande partie à des mariages précoces. Parce que, pour une bonne partie des parents, le seul moyen de prévenir la sexualité précoce, c’est de marier la fille très tôt. «Si on regarde le nombre de cas de grossesses précoces que nous avons dénombrés en milieu scolaire, 50 % concernent des mariages précoces. Et c’est un phénomène très récurrent dans les régions sud du pays. Nous constatons la même chose aussi dans la banlieue dakaroise, dans les zones rurales de Tivaouane, de Thiès, de Mbour, Kaffrine et de Kaolack», détaille Pr Fall.
Chef de la division du contrôle médical scolaire au niveau du ministère de l’Education nationale, Dr Aliou Dia dira pour sa part que c’est une stratégie qui est très importante pour le ministère de l’Education nationale. Parce que, même si toutes les adolescentes ne sont pas à l’école, une grande partie y est. Et une des priorités du ministère de l’Education nationale, c’est la protection des enfants et des adolescents pour qu’ils puissent réussir dans leurs enseignements et apprentissages. «Nous ne sommes pas en reste dans ce combat contre les grossesses précoces en milieu scolaire. Il y a beaucoup de stratégies qui ont été mises en place par le ministère de l’Education nationale. Certainement, avec l’apport de tous les partenaires, nous allons y arriver pour une année avec zéro grossesse à l’école. Et cela va améliorer la santé globale des adolescentes mais aussi leur santé sexuelle», déclare Dr Dia.
A note que l’objectif visé dans cette stratégie est de réduire les grossesses à l’école au moins 15 % par an.
Samba BARRY