Ministre d’Etat, directeur de cabinet du président de la République, Mahmoud Saleh est devenu l’ennemi public numéro un au sein de l’Apr. Comme par hasard, les premières salves sont parties du cabinet présidentiel. Et l’histoire du parti montre qu’il ne faut pas compter sur Macky Sall pour arrêter la bagarre.
C’est congénital à l’Apr et à la trajectoire de son fondateur qui, depuis son élection, s’est employé méthodiquement à faire de sa formation un navire avec un seul capitaine à bord. Un défaut de structuration interne du parti, fait à dessein, ramène tout à sa personne et ne laisse aucun espace à ses autres camarades.
La même formule jugée gagnante est appliquée à la classe politique où le chef s’applique, du mieux qu’il peut, à réduire toute velléité d’opposition. Le Pds est vidé de sa substance. Rewmi est dedans, pieds et poings liés. Hormis Ousmane Sonko et Khalifa Sall, les rares qui s’opposent sont issus du pouvoir ou de sa périphérie : Abdoul Mbaye et Thierno Alassane Sall, respectivement ancien Premier ministre et ancien ministre, entre autres, de l’Energie.
La conséquence de cette stratégie du vide étant que, faute d’adversaire, le parti au pouvoir s’en fabrique. Le dernier épisode en date, c’est ce tir groupé des apéristes contre Mahmout Saleh. A tort ou à raison, le ministre d’Etat, directeur de cabinet du président de la République, est accusé d’être à l’origine de tous les coups tordus qui ont eu effet d’écarter des caciques du parti, d’en neutraliser certains voire de transformer en zombies beaucoup parmi ceux qui étaient là quand il n’y avait rien à se partager. Dans une moindre mesure, certains lui reprochent d’avoir un profil sous-dimensionné pour occuper le poste de directeur de cabinet technique du président de la République que les textes organisant le cabinet présidentiel réservent aux fonctionnaires de la hiérarchie A, convoquant, au passage, la jurisprudence Babacar Gaye.
Dans ce cadre, les coups de menton de Mame Mbaye Niang sont partagés par des responsables apéristes qui pensent, messe basse, comme lui. La dernière trouvaille consistant à mettre en place une armée de trente fantassins, chargés d’envahir les plateaux des médias, de parasiter les réseaux sociaux et de torpiller le contre-discours des opposants pour défendre le président de la République n’a fait qu’exacerber les tensions et rendre le parti encore plus clivant. Et comme par hasard, c’est Mahmoud Saleh, encore lui, qui est derrière la cohorte de 30 «guerriers» qu’il est chargé de coacher. Il a, d’ailleurs, été aperçu à Saly aux côtés des futurs rhéteurs.
L’un dans l’autre, le théoricien, à une autre époque, des «coup d’Etat rampant» puis «debout» est devenu le plus grand diviseur commun. Et donc l’ennemi public numéro un dans un parti où le chef adore les duels internes. Ce n’est, en effet, pas Macky Sall qui va arrêter ces duels fratricides entre frères ennemis. Il les affectionne. Quelques illustrations suffisent. Dans le nord du pays, même s’il ne l’a pas suscité, le chef de file des apéristes a laissé faire la rivalité à mort entre Cheikh Oumar Anne et Abdoulaye Daouda Diallo. Laquelle rivalité a culminé avec la bataille rangée entre leurs gardes du corps respectifs devant des notables religieux, à Nianga Edy. Au sud du pays, Benoit Sambou et Doudou Kâ se sont, dès le départ, inscrits dans une stratégie de neutralisation réciproque. Idem à Louga où, entre Moustapha Diop et Mamadou Mamour Diallo, c’est «je t’aime, moi, non plus». Aujourd’hui, c’est à ses pieds et sous ses yeux que son chef de cabinet et son directeur de cabinet se crêpent le chignon. Et il ne faut pas compter sur Macky Sall pour mettre fin à la querelle. L’ancien militant d’Aj-Pads a fini de faire sienne la maxime marxiste qui veut que la lutte est le moteur de l’Histoire.
Ibrahima ANNE