Alioune Tine, président d’Africa Jom Center, Birahime Seck, Coordonnateurs du Forum civil et leurs amis de la Société civile ne sont pas en phase avec les chefs d’Etat de la Cedeao dans la gestion des crises qui secouent la sous-région notamment le Mali, la Côte d’Ivoire et la Guinée.
Ils soulignent que c’est le moment pour la Société civile de créer la «Cedeao des peuples» pour influencer les décisions (les intérêts) des chefs d’Etat. Ils ont préconisé aussi l’abrogation des lois attentatoires aux libertés des personnes notamment l’arrêté Ousmane Ngom.
Ce qui se passe dans la sous-région notamment la crise malienne et les velléités du troisième mandat qui engendrent des violences sur les populations préoccupent la Société civile. Estimant que les chefs d’Etat ne prennent pas en compte les voix des populations dans leurs décisions, les acteurs de la Société civile, pensent qu’il est temps qu’ils mouillent davantage le maillot pour se faire entendre. C’était, hier, lors du débat en format Webinaire, organisé par la Cocidev dont le président Amadou Kanouté est le modérateur du thème : «Espace civique sénégalais : enjeux, défis et solutions.» Donnant le ton, le président de Afrika Jom Center, Alioune Tine allume déjà les chefs d’Etat de l’instance sous régionale qui dit-il, n’écoutent plus la Société civile et ne prennent que des décisions qui les arrangent. «Comment nous pouvons nous organiser pour que notre voix compte ? Sur tout ce qui se passe pratiquement au Mali, nous sommes presque out. La Cedeao, c’est tout simplement aujourd’hui l’affaire des chefs d’Etat. La Société civile a une responsabilité dans cette crise. L’enjeu actuel dans le cadre du renforcement de l’espace civique, c’est comment nous pouvons unir nos voix ? Notre voix est devenue faible, notre influence est faible au niveau de la Cedeao où presque notre voix n’existe plus. On doit s’organiser en créant une Cedeao des peuples avec une société civile forte qui va influencer les décisions de la Cedeao», a souligné Alioune Tine. Qui ne manque pas dénoncer ce qui se passe en Côte d’Ivoire avec les répressions des manifestations contre le troisième mandat de Alassane Ouattara. A en croire M. Tine, dans ce pays, des activistes des droits humains, des membres de l’opposition en prison ont été tués pour avoir manifesté. «En Côte d’Ivoire, si on est universitaire et qu’on n’est pas d’accord sur le 3ème mandat, vous pouvez perdre votre liberté de circuler ou être menacé de mort. En Guinée, depuis le référendum jusqu’à maintenant, il y a plus de 90 morts, des centaines de personnes en prison», affirme Alioune Tine. «Les acteurs devront travailler sur le pouvoir et ses effets, surtout quand on devient accro au pouvoir, travailler également sur les typologies des coups d’Etat», se désole Alioune Tine. Qui estime que les acteurs la Société civile doivent voir comment avoir des alliances pour accentuer les pressions sur les Etats, sur les autorités de manière à faire bouger les lignes.
Son avis est partagé par le Secrétaire général de la Raddho, Sadikh Niass. Ce dernier souligne que les Sociétés civiles doivent bâtir des alliances solides pour se protéger mutuellement avec des réseaux au niveau communautaire. «C’est important de bâtir la Cedeao des peuples. C’est le moment de s’unir car, les chefs d’Etat doivent aussi entendre les populations», souligne-t-il
Lui emboitant le pas, le coordonnateur du Forum civil, Birahime Seck, lui se focalise spécifiquement sur le Sénégal. Il affirme que «l’enjeu majeur, c’est la globalisation de l’espace civique. Donc l’enjeu majeur ici, c’est une sorte de multilatéralisme des actions en faveur de la protection de l’espace civique, la remise en cause de l’intérêt général. On sent qu’il y a une certaine patrimonialisation des ressources de l’Etat. La mal gouvernance, des pratiques inciviques de l’élite, les menaces sécuritaires et écologiques, tous ces aspects également entrent dans le champ des enjeux par rapport à l’espace civique sénégalais». Les autres panélistes, Fatou Jagne Senghor, Directrice régionale d’Article 19 Afrique de l’Ouest, Fatou Sarr Sow, coordinatrice du Caucus des femmes leaders pour la parité, Elimane Kane, président de Legs Africa, et Maïmouna Dieng, directrice exécutive de la Plateforme des acteurs non étatiques ont été presque unanimes sur la mise en place d’un réseau et la nécessité de transmission à la nouvelle génération et préviennent l’Etat sur les risques d’amalgame qu’il y a entre défenseurs des droits de l’Homme et terrorisme. Ils demandent d’abroger les dispositions qui sont attentatoires aux libertés fondamentales, en citant l’arrêté Ousmane Ngom qui interdit toute manifestation de l’avenue Malick Sy au Cap Manuel de Dakar mais aussi l’article 80 relatif à l’offense au chef de l’Etat.
Mamadou GACKO