La Conférence des leaders du Congrès de la renaissance démocratique dit avoir appris, «avec beaucoup de préoccupations et d’inquiétudes», le «revirement spectaculaire» du Président sortant de Côte d’Ivoire Alassane Ouattara.
«Ce dernier, après deux mandats effectifs, soutient devoir, comme par nécessité, se présenter, en violation de l’esprit de la constitution, à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020 pour briguer un troisième mandat ; plus grave encore, reniant toutes ses proclamations antérieures, plusieurs fois réitérées, consistant à passer le relais à la jeune génération», indiquent Abdoul Mbaye, Mamadou Lamine Diallo et Cie qui observent pour s’en désoler «cette récurrente propension des chefs d’Etat de notre sous-région à banaliser leur parole, à se dédire, et de la sorte, à jeter le discrédit sur tous les engagements qu’ils prennent à l’égard de leurs peuples ; ce fut le cas de Macky Sall sur la réduction de son premier mandat de sept à cinq ans ou, avant lui, de Abdoulaye Wade sur sa troisième et malheureuse candidature en 2012, avec de nombreuses pertes en vies humaines qui auraient dû être évitées».
Le Congrès de la renaissance démocratique condamne ainsi «le stratagème devenu récurrent en Afrique de l’Ouest : une réforme constitutionnelle menée lors de leur premier mandat qui laisse toujours la possibilité d’une interprétation équivoque de cette loi fondamentale par un Conseil constitutionnel corrompu ouvrant la perspective d’un possible troisième mandat : Abdoulaye Wade, Alpha Condé, Alassane Ouattara y en ont eu recours ; Macky Sall a accompli le premier pas du même stratagème partagé par une réforme constitutionnelle qu’il livre aujourd’hui à des interprétations tout aussi équivoques par des éléments de son entourage, connus pour une subordination maladive à sa propre personne et qu’il instrumentalise lui-même, manifestement à sa guise. L’histoire édifiera sous peu sur ses intentions réelles, qu’il tente de camoufler, de prendre ou non le risque du mandat de trop, dont il a lui-même proclamé, en toute liberté, l’impossibilité de par l’esprit de la loi».
En tout état de cause, le Crd dit réaffirmer avec force sa position de principe fondée sur les conclusions des Assises nationales de deux mandats de cinq ans au maximum quels que puissent être les gymnastiques et manœuvres juridiques, indécences éthiques et morales. Le Crd considère que Alassane Ouattara a effectué deux mandats successifs de président de la République de Côte d’Ivoire. «Nul n’étant indispensable et conformément à l’impérieuse nécessité de s’en tenir aux deux mandats constitutionnellement limités, il doit respecter sa parole, en laissant plus jeune que lui, dans son propre parti ou venant d’ailleurs, et donner à la Côte d’Ivoire une autre perspective de son choix dans la continuité ou dans la rupture», affirment les leaders du Crd qui appellent solennellement le Président Ouattara «à éviter absolument, pendant qu’il est encore temps, d’engager son pays, la Côte d’Ivoire qui lui a tout donné, dans une voie aux lendemains à la fois sombres et incertains pour ses intérêts privés, ceux de ses partisans et de ses alliés». Ces opposants sénégalais en appellent à la solidarité et au soutien de tous pour une mobilisation agissante des démocrates et patriotes africains, notamment de la sous-région, en faveur du peuple ivoirien de nouvel exposé à toutes les aventures possibles face à l’actualité de l’élection présidentielle prévue le 31 octobre 2020. «De même, les mêmes causes produisant les mêmes effets, la Conférence des leaders du Congrès de la renaissance démocratique exhorte toutes les forces démocratiques et citoyennes de la sous-région à s’organiser et à se mettre en ordre de bataille légitime pour exiger, avec courage et détermination, y compris par tous les moyens, le respect de la loi fondamentale dans nos différents pays respectifs», ajoutent-ils.
Mieux, le Crd milite intensément pour un amendement au Protocole additionnel de la Cedeao en vue d’ériger en «principe juridique communautaire» la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux au maximum ; une limitation assortie d’une clause d’éternité. Pour le Crd, cette condition est absolument nécessaire pour barrer la route aux «aventuriers à la tête de nos Etats se prêtant au jeu du mandat de trop et qui, à la veille de chaque élection, exposent comme des irresponsables, nos pauvres et fragiles pays à la déstabilisation avec toujours de nombreuses pertes en vies humaines et des dégâts matériels qu’il était pourtant raisonnable d’éviter».
Georges Nesta DIOP