Les autorités administratives et locales capitulent, l’indiscipline et l’anarchie s’installent dans le marché central de Rufisque. En effet, depuis ce fameux décret qui a délocalisé le marché central vers l’hippodrome Tanor Anta Mbakhar, les commerçants sont entrés en rébellion ouverte contre les autorités de la vieille ville. La plupart d’entre eux refusent, non seulement, de regagner le nouveau lieu de recasement, mais les affrontements sont devenus monnaies courantes entre agents de brigade de la mairie et commerçants. La semaine dernière, il y a eu deux blessés graves et une dizaine d’arrestations. C’est vraiment désolant tout ce désordre. Quand est-ce que notre cher pays aura des autorités véritablement responsables, qui font régner la loi dans toute sa rigueur, sans calcul. Tout ce qui se passe est la faute des autorités qui cautionnement le laisser aller au point que la population se plaise dans l’anormalité. Je croyais que la crise mondiale sanitaire aller nous faire changer nos mauvaises habitudes, mais en voyant ce genre de scènes, on se dit que ce n’est pas pour demain», se désole Ndèye Astou Ndiaye, une habitante de Rufisque.
Avec l’arrivée du Covid-19, des mesures ont été prises pour prévenir les populations dans les zones de grandes concentrations. C’est ainsi que le marché central de Rufisque fait l’objet d’un arrêté pour désengorger et sécuriser ceux qui le fréquentent. Ainsi, l’autorité y a installé, avec l’aide des scouts et éclaireurs, des laves-mains et fourni du matériel sanitaire qui n’a rien servi. Face aux nombreuses plaintes des populations sur le non respect des mesures barrière et l’indiscipline de certains commerçants, le préfet décide de délocaliser le commerce, en attendant. C’est ainsi que l’hippodrome Tanor Anta Mbakhar est choisi.
Dix arrestations, plusieurs blessés
Des cantines sont installées et les commerçants répartis en trois groupes. Trois couleurs vont les différencier. Et chaque groupe travaillera deux jours par semaine. Le dimanche étant jour de repos pour tous. Pour l’heure, les autorités décident du transfert unique du marché des légumes, en attendant les autres. Les commerçants protestent et refusent de suivre l’arrêté préfectoral et défie l’autorité. Mieux, ils organisent une réunion ouverte à tous les vendeurs pour, disent-ils, «manifester leur désaccord contre la décision du préfet» de délocaliser le très fréquenté marché aux légumes vers le Champ des courses. Ils assiègent la préfecture. «Force doit rester à la loi et le contrôle de l’application ne revient qu’à une seule autorité dans un département : C’est le Préfet. Ces images n’honorent pas du tout notre ville, les auteurs de ces actes barbares doivent être réprimés à la hauteur de leurs forfaits. L’autorité doit sévir pour mettre de l’ordre dans ce marché, force doit rester à la loi. L’intérêt général doit primer sur les intérêts particuliers. Plus jamais ça. Prompt rétablissement à toutes les victimes de ces violences, particulièrement à notre président de conseil de quartier Arona Diagne. Que justice soit faite», tonne Babacar Dieng, un autre habitant de Rufisque.
A l’époque, trois des responsables dont Pape Bâ, président des vendeurs du marché, ont été arrêtés et conduits à la Police. Ils seront ensuite déférés au parquet puis relâchés. Ces arrestations ne vont pas refroidir l’ardeur des commerçants qui reviennent à l’assaut quelques jours après.
Le préfet perd son autorité
Au lendemain du discours de Macky Sall, les commerçants sont revenus sur le marché instaurant les mêmes habitudes, irritant ainsi la brigade de la mairie de l’Est qui tenait à instaurer l’ordre. Des altercations s’en suivent. Les moyens humains très réduits de la Police ne parviennent pas à faire reculer les commerçants qui trouvent du renfort dans d’autres marchés. Ainsi, ceux de Thiaroye et de Keur Massar viennent en renfort à Rufisque et s’imposent. La nuit tombe et la situation se clame. Mais le lendemain, toutes les artères de la ville sont pris d’assaut par les commerçants qui installent leurs étals partout. Même aux abords de la route nationale. Pour cet autre Rufisquois du nom de Youssoupha Diagne, il urge de prendre des mesures afin d’éviter l’irréparable. «Jusqu’à la survenue d’une catastrophe. Et en ce moment-là toutes les autorités se précipiteront au chevet du marché et annonceront un chapelet de mesures tardives. Le médecin qui attend la mort du patient pour lui administrer le traitement».
Najib SAGNA