Au moins 1,6 million de Français pourraient avoir contracté le coronavirus depuis le début du confinement. Le syndicat de généralistes MG France a publié ce mardi les résultats d’un sondage effectué auprès de 2.000 médecins de ville, qui ont déclaré avoir pris en charge 56.000 patients présentant des symptômes du Covid-19 entre le 17 mars et le 3 avril. En extrapolant ces résultats aux 60.000 généralistes du pays, le syndicat calcule que 1,6 million de patients ont consulté pour des symptômes équivalents. Pendant l’épidémie saisonnière de grippe, qui dure généralement six à sept semaines, 2 à 6 millions de personnes se rendent chez leur médecin chaque hiver pour suspicion de grippe, compare MG France.
Ces données de terrain complètent celles du réseau de surveillance en ville Sentinelles , publiées chaque semaine par la Direction générale de la santé depuis quinze jours. Elles font état de 90.600 consultations de généralistes ou de pédiatres en ville pour suspicion de Covid du 23 au 29 mars, soit 51.100 consultations de plus que la semaine précédente.
Si les projections de MG France sont justes, cela signifie que 9 % de la population pourrait avoir déjà contracté le virus… sans compter les porteurs sains, dont on ne connaît pas la proportion. Ce sont des informations importantes pour mesurer l’immunité collective. Les scientifiques estiment que 50 % à 70 % de la population devront être immunisés pour que tous les autres soient protégés.
Le rôle des médecins de ville
Pour les médecins généralistes, ce million et demi de patients montre surtout, à ce stade, que les professionnels du soin en ville jouent un rôle clé dans la gestion de l’épidémie. Et ce rôle est un peu trop passé sous silence à leur goût. « Jusqu’à présent, on a braqué le projecteur sur les malades les plus atteints, qui vont à l’hôpital, mais il faut aussi s’occuper du reste de la population », rappelle Jacques Battistoni, le président de MG France. Le déplacement d’Emmanuel Macron en Seine-Saint-Denis, ce mardi, durant lequel il devait rencontrer un généraliste, permettra, espère-t-il, de rééquilibrer les choses.
Aujourd’hui, l’enjeu numéro un est d’éviter une deuxième vague. Pour cela, il faut dépister massivement et poursuivre les mesures de prévention. « Nous voulons être les effecteurs de cette politique. Il faut nous donner accès aux tests pour que nous puissions collaborer au dépistage. C’est à nous de prodiguer des conseils à nos patients, et ce n’est pas à l’hôpital d’organiser la prise en charge en ville », estime Jacques Battistoni.
Selon lui, cette crise met en lumière l’utilité des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) créées par des médecins libéraux, infirmiers, kinés, etc. « Dans les départements les mieux maillés en CPTS, comme l’Indre ou l’Allier, de nombreux centres dédiés au Covid-19 ont été ouverts, afin de différencier les flux de patients et de mettre en place des coopérations médecins-infirmiers », explique-t-il. Enfin, autre preuve de leur réactivité, les médecins de ville se sont très rapidement convertis à la téléconsultation , libéralisée pour cause d’épidémie.
Les Echos