Ce magazine conservateur britannique s’étonne de la méthode utilisée par la France pour compter les victimes du Covid-19, qui ne prend par exemple pas en compte les morts dans les maisons de retraite.
“On dit que la première victime dans une guerre, c’est la vérité”, rappelle un journaliste du Spectator, qui s’interroge : dans la bataille contre le Covid-19, pouvons-nous nous fier aux chiffres ? Et, en particulier, au nombre de personnes emportées par le virus ? “Pas vraiment”, admet le magazine conservateur. Cela s’explique notamment par la façon de comptabiliser les morts, qui diffère d’un pays à l’autre.
“Prenons l’exemple de la France. Chaque soir à 19 h 15, les chaînes d’information interrompent leurs émissions et le professeur Salomon, directeur général de la Santé, énonce gravement depuis son pupitre les chiffres du coronavirus pour la journée écoulée. Il le fait depuis plusieurs semaines.” D’abord le nombre de cas détectés, puis le nombre de morts.
“Ces chiffres sont très précis, comme les Français le sont admirablement dans tout ce qui touche aux mathématiques”, ironise The Spectator. Pas d’arrondi, pas d’estimation : “Pour les Français, les mathématiques sont une science, ce qui explique pourquoi ils ont plus de médailles Fields par habitant que n’importe quel autre pays.”
Les maisons de retraite oubliées
Il n’empêche, rapporte The Spectator, qu’il s’avère assez troublant de constater que Jérôme Salomon annonçait, au début de la crise, le “nombre total de décès en France” et que cela “s’est soudainement transformé en ‘nombre total de décès dans les hôpitaux’”. Quid des autres lieux, comme les maisons de retraite ?
À ce sujet, Jérôme Salomon, “imperturbable”, a expliqué “posément que la France ne recensait que les décès survenus dans les hôpitaux, car il était trop compliqué d’enregistrer les autres scientifiquement”. Ceux-ci seront ajoutés aux statistiques officielles ultérieurement, précise-t-on.
“Cetteinformation m’a sidéré ! poursuit le journaliste britannique, même si en France personne n’a eu l’air de s’en émouvoir.” Cela signifie que les chiffres pourraient être bien plus élevés, et que “le pays [pourrait être] le plus touché juste après l’Italie”.
Néanmoins, reconnaît le magazine, il reste fort probable que la France ne soit pas la seule à ne présenter chaque jour que des données partielles.
Un taux de mortalité artificiellement bas
Mais “une chose est sûre”, affirme The Spectactor, c’est que “ce procédé rend impossible la comparaison des chiffres entre différents pays”. Et “il en résulte aussi un taux de mortalité artificiellement bas”.
Mais après tout, comme le disait George Udny Yule, célèbre statisticien écossais :“Dans notre soif de mesures, nous mesurons souvent ce que nous pouvons mesurer et non ce que nous souhaitons mesurer… en oubliant que ce n’est pas la même chose.”
Courrier International