Si les talibés (disciples des écoles coraniques) ne comprennent pas les mesures prises par les autorités, leurs marabouts, eux, bien qu’ayant eu écho des ravages du Covid-19, disent s’en remettent en Dieu. Trouvé derrière le marché de Grand-Yoff, Seydou Sy tient son daara, depuis 2002, à côté de la grande mosquée. Originaire de Médina Gounass, il l’a hérité de son père. Malgré les faibles moyens, il tient de son mieux des règles d’hygiènes. «Nous n’avons rien reçu des autorités pour la protection des enfants qui sont toujours dans les rues. Néanmoins, nous avons mis devant la porte, une bassine d’eau mélangée avec du savon et du javel. Chaque individu qui rentre à l’intérieur est invité à essuyer ses mains. Cette règle s’applique sur tout le monde depuis l’annonce des mesures du président de la République. Nous privilégions les prières sur Dieu, parce que c’est lui qui a descendu cette maladie», fait-il savoir.
Cap sur le daara Elhadji Dramé niché quelque part à Grand-Yoff. Situé sur la route menant vers le camp de la gendarmerie du Front de terre, à 50 mètres du centre Talibou Dabo, cette école coranique est fréquentée par la majeure partie des enfants venus du centre du pays. Il est installé dans un local délabré, des ordures par ci et par là, des eaux stagnantes de l’autre côté. A l’entrée, des talibés revenant de la rue font le décompte de leurs avoirs. Les autres sont en train de nettoyer pour aménager une sorte de chemin. Le marabout est à l’intérieur. Il faut patienter un instant. «Nous avons tout laissé entre les mains de Dieu. Nous formulons chaque matin des prières parce que nous ne sommes pas capables de respecter les mesures d’hygiène préconisées par les autorités sanitaires. Nous éduquons des enfants qui sont vulnérables», confie Seybarou Dramé, responsable du daara.
N’empêche, on prête une attention particulière à l’épidémie malgré leur impuissance face au respect des règles d’hygiènes édictées. «Nous n’avons pas les moyens. L’Etat devrait nous accompagner. Nous essuyons les mains avec l’eau de javel parce que les gels antiseptiques sont chers. Nous ne pouvons pas les empêcher aux talibés de descendre sur le terrain pour quémander. C’est avec cet argent et autres dons que nous leur préparons des repas. Nous n’avons que des enfants qui viennent de la campagne. Nous n’avons pas encore reçu des dons de kits de gels et autres. C’est difficile et risqué, mais on est obligé», informe Seybarou Dramé, la quarantaine dépassée.
Salif KA