Les prix du courant électrocutent le peuple, les affaires d’immoralité faussent la gestion sobre et vertueuse, le bilan éthique de ses hommes est loin d’être reluisant, la guerre des clans pour la succession fait rage…
Tous les ingrédients de la fin de règne de Wade sont aujourd’hui visibles dans le régime de son successeur. Un cocktail explosif pour le «Patron» dont les partisans font entamer les premiers jours du reste du quinquennat.
Le pouvoir actuel traverse une très mauvaise passe. Depuis sa reconduction, les emmerdes s’accumulent au point de donner des cheveux blancs à Macky. Presque chaque jour avec sa surprise depuis l’éclatement du scandale de l’affaire Petro-tim sur les richesses naturelles du Sénégal avec le frère cadet du chef de l’Etat, Aliou, finalement emporté par la marée noire du pétrole et du gaz. Et certains caciques du Yonou Yokkuté jouent avec les allumettes. Ce qui n’est pas sans rappeler les derniers jours du régime d’Abdoulaye Wade que Macky Sall a remplacé à la tête du Sénégal. En effet, avant l’alternance de 2012, certains adversaires du Président Abdoulaye Wade disaient qu’il avait un bilan économique défendable. Parce que le budget ne cessait de grimper, qu’il avait construit beaucoup d’infrastructures, routières notamment, mais que son bilan éthique et moral était exécrable. Car, il y avait dans son système des gens qui faisaient une accumulation de richesses extraordinaires, à côté d’une indiscipline et d’une impunité.
Mais, aujourd’hui, on retrouve terme pour terme la même situation, avec les mêmes signaux. Macky Sall a réalisé des choses défendables sur le plan économique et social. Il a des programmes importants comme la Couverture maladie universelle (Cmu), même si elle ne marche pas comme elle devait, les bourses familiales ou encore le Programme d’urgence de développement communautaire (Pudc), l’un des meilleurs depuis que le Sénégal est Sénégal à notre avis. Mais en face, on a un sentiment d’impunité avec un long cortège de scandales, comme l’affaire des 94 milliards, des 29 milliards du Prodac, des cartes d’identité, le Coud, la réfection du Bulding, l’affaire Bictogo, entre autres, mais aussi sa femme que d’aucuns semblent presque consacrer en une sorte de vice-président.
Le crépuscule des dieux
A côté de cela, on a une assemblée nationale qui est devenue une fore d’empoignes, un repère de «bandits» qui s’insultent au moment du «partage du butin» comme disait l’autre. Ce, à côté du député arrêté pour faux monnayage, des histoires de drogues qui tendent à donner au pays une image très négative de terre bénite pour les narcotrafiquants. Quid des insultes du président du Parlement de la Cedeao, Cissé Lô, écouté par toute la planète, injure à la bouche, faire un règlement de comptes éhontée à l’Assemblée nationale sur fond d’accusations graves sur des maisons construites avec l’argent de la drogue, des ministres qui font des affaires et qui devraient être chassés par des gourdins ou autres déclarations hallucinantes les unes les autres. Mais que dire de la réplique du sniper Yakham. Tout porte à croire qu’ils veulent entraîner Macky Sall dans une fin de règne avant l’heure.
Et pour ne rien arranger dans ce tohu-bohu, l’Etat est rattrapé par la dure réalité des choses : le gouvernement doit arrêter sa subvention annuelle de 250 milliards à Senelec et la pousser à appliquer la vérité des prix, après la hausse de ceux de l’essence. Et hop, à peine les factures d’électricité arrivées dans les ménages, le prix du courant commence à faire des étincelles aux bords de ce cocktail explosif.
Pourtant, dans la symbolique, l’électricité était ce qui a fait dégager Abdoulaye Wade du pouvoir, avec notamment les émeutes de l’électricité. Ce qui avait poussé son régime à inventer le plan Takkal avec Karim Wade. Et aujourd’hui aussi, le courant risque d’électrocuter le Macky. Cela, parce que les Sénégalais ne vont pas pouvoir supporter le coût de ces factures brûlantes. Parce qu’à côté le pouvoir d’achat n’a pas augmenté. Donc, si l’Etat augmente un poste de charge à concurrence de plus du tiers de leurs revenus, forcément cela va créer un sentiment de révolte. Parce que les Sénégalais peuvent laisser passer des scandales tant qu’ils continuent de s’acquitter correctement de leurs factures et de la popote. Mais quand on commence à toucher à leur portefeuille, ils ne badinent pas avec.
En tout état de cause, cette situation qui prévaut dans le système de Macky Sall indispose plus d’un dans son propre camp. Pis, elle commence à créer une panique à bord. Laquelle semble justifier la bankeurisation du domicile du «Patron» à Mermoz où des deux côtés de la rue principale, qui est maintenant bloquée, un dispositif sécuritaire impressionnant est de mise. Ce, avec notamment des chars anti-émeutes pour parer à toutes les éventualités de ce cocktail explosif.
Seyni DIOP