Ce mercredi, le quai de pêche de Fass Boye, dans le département de Tivaouane, a été assiégé par les pêcheurs artisanaux qui étalent leur colère noire, suite à la destruction de trois de leurs pirogues par un navire étranger. Ils disent avoir vu leur matériel de pêche, d’un montant global de près de 20 millions de francs Cfa, être emporté par les propriétaires dudit bateau.
Au bord du quai de pêche, des pêcheurs artisanaux, des hommes, des femmes, des jeunes filles et garçons. Tous ou presque, arborant des foulards rouges, ont très tôt le matin pris d’assaut la plage de Fass Boye pour crier leur indignation et dire plus ‘’jamais ça !’’. Ils ruminent leur colère, suite au passage, dans la nuit du mardi à mercredi, d’un navire étranger qui a détruit trois de leurs pirogues accostées à quelques mètres du quai de pêche de la zone. Et comme si cela ne suffisait pas, les propriétaires du navire étranger ont, selon ces pêcheurs, emporté, ‘’de gré’’, un filet à tourner, un moteur et tout le matériel d’équipage d’une des pirogues, pour un montant de près de 20 millions de francs Cfa. Aussi, révèlent-ils que les pertes globales sont estimées à près de 100 millions de francs Cfa.
Propriétaire de l’une des pirogues détruites, Modou Boye Seck refuse de croire à la thèse de l’accident et soutient que le navire n’avait qu’un seul souhait : détruire leurs pirogues et ‘’voler’’ leur matériel de pêche.
‘’C’est ce mardi vers 21 h que le navire étranger a débarqué ici, à Fass Boye. Lors de son passage, celui-ci a emporté avec lui trois de nos pirogues. Dans un premier temps, le bateau prenait la direction de Mboro et Kayar. Quand les jeunes qui étaient sur la plage nous ont alertés, tout le monde s’est lancé dans une course-poursuite. Nous avons tenté de lui faire savoir qu’il emportait nos pirogues. Mais le bateau ne s’est pas arrêté. C’est ensuite que certaines pirogues commençaient à se détacher et jusqu’à présent on ne les a pas revues. Nous avons perdu des filets dans cette affaire. C’est le mien que les propriétaires du navire ont emporté. Nous les avons vus. Parce que nous étions à leur poursuite jusqu’à 00 h. Ce qui s’est passé hier (mardi), c’est du vol’’, fulmine-t-il.
Ainsi, dans cette affaire, Modou Boye Seck et Cie disent avoir saisi la marine nationale à partir de 21 h, mardi, pour qu’elle vienne à leur rescousse. Dans un premier temps, poursuit-il, celle-ci a dit sa disponibilité à prêter main-forte aux pêcheurs de Fass Boye pour les aider à rattraper le navire étranger. Mais, au final, il regrette l’inaction des ‘’soldats de la mer’’. De l’avis de Modou Boye Seck, la marine nationale ‘’a refusé de les aider’’ à arraisonner le bateau. ‘’Nous avons contacté les éléments de la marine nationale, entre 21 h et 4 h du matin. Ils ont promis de nous aider. Mais, par la suite, rien. Nous sommes restés au quai entre 21 h et 6 h du matin espérant les voir. Avec nos maigres moyens, nous avons tenté d’arrêter le bateau. Par contre, c’est en pleine mer qu’il a pris le dessus sur nous. Le navire a, par la suite, pris la direction de Saint-Louis. Ce qui s’est passé hier nuit (mardi) est très loin d’être un accident. C’est comme un agresseur qui a décidé d’en finir avec nous, en emportant tout notre matériel de pêche. C’est désolant et ça fait mal’’, regrette Modou Boye Seck, rappelant à l’État de mission régalienne de protéger ses concitoyens pêcheurs artisanaux.
L’appel à l’État
Tout comme Modou Boye, Abdou Karim Sarr se désole également de ce qui s’est passé dans ce village situé dans la commune de Darou Khoudoss. De l’avis du président de la commission sécurité en mer à Fass Boye, il appartient à l’État du Sénégal de prendre des dispositions nécessaires, afin que de pareilles situations ne puissent plus se reproduire. ‘’Nous sommes là depuis 21 h. Nous avons fait tout notre possible, en mobilisant 25 pirogues pour arrêter le bateau, mais on n’a pas pu. Nous avons seulement réussi à voir sa couleur ; le bateau est gris. C’est tout ce que nous savons, parce que les marins à bord ne nous ont même pas donné l’occasion de nous rapprocher du navire. Ils nous ont même aspergé de l’eau chaude. C’est inadmissible. Aujourd’hui (hier), personne n’est allé en mer. Et il faut savoir qu’une pirogue gâtée envoie 40 personnes au chômage. Donc, il faut que l’État sache que nous sommes dans une situation difficile. Nous avons perdu des pirogues et des filets’’, tempête M. Sarr.
De leur côté, le chargé de communication de l’Union nationale des pêcheurs artisanaux du Sénégal (Unapas), Madické Seck, et le coordonnateur du conseil local de pêche de Fass Boye, Moda Samb, expriment aussi regrets et craintes. Ils demandent au gouvernement du président Sall ‘’de protéger tous les pêcheurs artisanaux du Sénégal et surtout de faire en sorte que cela ne cela reproduise plus’’. Les deux responsables demandent aussi à l’État de mettre tout en œuvre pour déployer les moyens qu’il faut pour arraisonner ledit navire.
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