Ça sent le début de la fin pour Macky 2. Au vu de l’incohérence de ce système, de la chasse à l’homme qui y fait rage et de l’hypertrophie de Sall, seul homme au centre de tout, qui décide de tout, sur tout et pour tous, on fonce vers l’autodestruction du régime. Et pendant ce temps, l’opposition est aux abris et sous la table, salivant sur un prétendu biscuit qu’un invité surprise venu du Qatar risque de lui ôter de la bouche.
Fin d’un règne à peine commencé ? Le pouvoir de Macky Sall a été certes reconduit avec une majorité confortable au lendemain du 24 février dernier, mais, à peine débuté, le second mandat vire au cauchemar. Entamé avec le méga-scandale de l’affaire Petro-Tim, mis au goût du jour par la chaîne britannique Bbc avec son panorama : «Affaire Petro-Tim, un scandale à 10 milliards de dollars», la gouvernance sobre et vertueuse a été douchée en fast-track. Et depuis lors, les choses ne s’arrangent pas. Les ministres se tirent dessus avec des contradictions indescriptibles, se jettent des peaux de banane ou se cognent dessus comme Maxime Jean Simon Ndiaye et Oumar Samba Bâ.
Mais tout cela est la faute à l’hyper-présidentialisme érigé en mode de gouvernance depuis le mois d’avril dernier. Ce, notamment avec le pouvoir personnel de Macky. Une tambouille qui écœure le système. Car, malgré le fast-track annoncé en grande pompe, les Sénégalais sentent que les choses ne tournent pas rond. L’articulation des politiques inquiète les spécialistes de l’administration. En effet, à chaque jour sa peine avec Macky 2. La suppression du poste de Premier ministre pour accélérer la cadence n’a jusqu’ici accouché que d’un hyper-présidentialisme aux allures d’un impérialisme qui ne dit pas son nom et qui a perdu, en France un certain Nicolas Sarkozy à l’époque. Aujourd’hui, tout est entre les mains d’un seul homme, inaccessible pour nombre de ses hommes, qui peut se mettre même d’enjamber un ministre pour parler à son directeur. Nombre d’entre ses ministres sont plus des exécutants et ne sont au courant de rien. Ce qui les a empêchés de le défendre dans l’affaire Petro-Tim dont ils ne maîtrisent pas les tenants et les aboutissants. Le seul qui s’est aventuré à le défendre dans ce dossier dont il ne connaît rien est son ex-ministre-conseiller en Communication, El Hadji Kassé. Et il s’y est cassé les dents.
Hyper présidentialisme
Pour ce quinquennat, Macky Sall se montre assez spécial dans ses approches, puisqu’il a ridiculisé les institutions avec d’anciens ministres qui acceptent aussi facilement des postes de directions générales comme à La Poste, à la Sonacos, au Patrimoine bâti de l’Etat… Mais que reprocher à Abdoulaye Bibi Baldé ou à Modou Diagne Fada si l’ancien Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye est totalement satisfait d’être recasé comme Pca d’Air Sénégal Sa ?
Pourtant, c’est dans ce moment où l’opposition se renforce avec Karim, Sonko, Khalifa et les autres, que les transhumants ont montré qu’ils sont des poids-plume, que Macky aurait surtout besoin de renforcer ses hommes. En effet, avec un Khalifa Sall élargi de prison, un Karim remis dans le jeu ou encore un Ousmane Sonko plus en verve que jamais, personne ne voit comment Macky Sall va tenir d’ici la présidentielle de 2024. Surtout lorsqu’on voit qu’il casse ses hommes les uns après les autres. Car, pas plus tard que la semaine d’avant, c’est Aminata Touré, Mimi, qui cristallisait toutes les attaques de son parti après sa sortie dans le magazine Jeune Afrique. Ce, au point d’être snobée même par Macky Sall lors du dernier Secrétariat exécutif de l’Apr où, nous souffle-t-on, il avait demandé de ranger les armes pour la guerre de succession. Il a fallu que la présidente du Conseil économique, social et environnemental (Cese) aille chercher de l’aide au niveau de Touba auprès du khalife général Serigne Mountakha Mbacké, qui a rappelé les relations avec son père et que l’ancienne Pm est une femme droite, pour que les faucons de l’Apr lèvent le pied avant, semble-t-il, de se diriger vers Amadou Bâ. Et au rythme où vont les attaques, on peut se dire que Macky a lâché, de façon affichée, sa meute sur son ministre des Affaires étrangères. Et il semble profiter de cette belle occasion que lui offre Sory Kaba. Puisque la plupart des Sénégalais pensent que dès lors qu’il travaille au ministère des Affaires étrangères, c’est la voix de son patron. Et non de son maître qui l’a toujours défendu contre presque tous les ministres qui sont passés à «La Place de l’Indépendance» et qui ont voulu le dégager. Ainsi, il y a de forts soupçons qu’il ne soit qu’un fusil éjecté avant son ministre, et qu’il sera réhabilité plus tard.
En tout état de cause, casser ses lieutenants dans ce contexte ferait très mal au pouvoir. Même si les ambitions de certains agacent, Macky Sall n’a pas intérêt à s’en séparer au moment de sa réconciliation avec son ex-mentor, Abdoulaye Wade. Ce serait un très mauvais signal envoyé à ses troupes déjà démotivées et démoralisées. Et si son régime perd Dakar en 2021 et en 2022, ce sera la défaite annoncée en 2024. Car, comme en 2009, Khalifa va retrouver sa base et sera renforcé par Idy et d’autres qui vont mettre leurs forces sur un proche de l’ex-maire de Dakar qui fera très mal. Ce qui signifierait la perte de Dakar et tournera déjà une page du régime Faye-Sall. Le cas échéant, même pour former un gouvernement, il ne pourra compter que sur des technocrates. Seyni DIOP