Le dialogue national initié par le président de la République, Macky Sall, ne règlera aucun problème de société. C’est l’avis de Mame Less Camara, journaliste-formateur au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti). Selon lui, c’est une rencontre entre «politiciens bavards avec des formules creuses». Il s’exprimait en marge d’un panel organisé, ce week-end, à Dakar, par l’Action pour les droits humains et l’amitié (Adha).
Le leader de Pastef/Les patriotes, Ousmane Sonko, qui avait qualifié le dialogue national convoqué par le président de la République du Sénégal, Macky Sall, de cirque, a un soutien de taille en la personne de Mame Less Camara, journaliste-formateur au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti). Selon ce dernier, le dialogue dit national n’est rien d’autre qu’une rencontre entre politiciens bavards avec des formules creuses. «C’est un dialogue ridicule qui met en scène des personnages dont les Sénégalais ont assez, à force de les voir depuis des décennies dire les mêmes choses sans absolument avancer en rien de quelque côté. Tous ces appels à un dialogue national, c’est entre des politiciens bavards qui vont essayer de s’illustrer par des formules creuses. Si on est prêt à nous consacrer un temps à des discussions, discutons de la formation des jeunes, de leur employabilité, qui doit être un élément central », a souligné, ce week-end, Mame Less Camara. C’était en marge d’un panel organisé, ce week-end, à Dakar,
par l’Action pour les droits humains et l’amitié (Adha). Le journaliste d’ajouter : «Il n’y a qu’au Sénégal où des politiques se rencontrent pour discuter de la politique. Et on appelle cela dialogue national. Les problèmes d’éducation méritent qu’on leur consacre du temps.» Selon l’analyste politique, la problématique de l’enseignement, la formation des jeunes, l’émigration clandestine sont, entre autres, des questions de l’heure qui méritent d’être étudiées. En lieu et place de convoquer des partis politiques composés de deux voire trois personnes, l’idéal serait d’inviter le bas peuple pour un diagnostic de leurs problèmes. «J’ai arrêté de suivre les péripéties de ce dialogue quand je me suis rendu compte que les politiques se bousculent, se bagarrent pour être admis. On laisse de côté les associations de jeunes agriculteurs, tous les mécaniciens que l’on retrouve dans les garages, qui sont soumis à une véritable formation, c’est-à-dire un processus d’acquisition de connaissances. Alors que ce sont ces dignes citoyens qui mériteraient de faire l’objet d’un dialogue national et non pas les turpitudes de politiciens experts qui, pour beaucoup d’entre eux, n’ont pas vocation à servir la nation, mais plutôt à s’en servir. Ils ne font que se signaler pour compter sur les médias pour exister, se donner un nom sur la scène politique», déplore-t- il. A l’en croire, l’enseignement sénégalais qui se trouve, en permanence, dans une zone de turbulences devrait être parmi les premiers points à être évoqués. Malheureusement, ce sont des questions qui ont trait à l’agenda des politiques qui sont privilégiées. «Puisqu’on est en face d’un problème général, il serait bon qu’il soit soumis une à appréciation et que l’on s’entende sur les gens qui seront désignés pour travailler sur sa résolution, en relation avec les académies et les enseignants. C’est cela qui pourrait faire avancer les choses et donner du vrai contenu à ce dialogue national. L’enseignement est trop sérieux pour qu’on le laisse entre les mains des seuls enseignants. On doit savoir que toute politique doit être politique de quelque chose», insiste- t-il. Selon le premier directeur de Walf Fm, tout cela se passe au vu et au su de tout le monde, notamment la presse qui ne joue pas son rôle de filtre et de régulateur. « La presse ne joue plus son rôle de filtre et d’éveil. Je suis dans la presse depuis 35 ans. Je peux citer des gens qui, depuis trente-cinq ans, restent sur la scène politique et prétendent pouvoir travailler pour notre futur», souligne Mame Less Camara.
A l’en croire, la presse copte des soi-disant politiques qui, en fait, ne parlent au nom de rien, n’ont aucun projet, aucune base populaire, sinon des gesticulations. «Ils ont un certain sens de la formulation qui dérange. Il faut rompre avec ces pratiques. Les associations des droits de l’homme méritent d’être soutenues pour, au moins, faire l’objet de notre attention. Une association de défense de droits de l’homme ne doit pas se promener dans tous les espaces où on ne parle que de politique », recommande-t-il.
Salif KA