La situation économique des médias au Sénégal est catastrophique. Si on respectait la loi ; 99 % des organes de presse devaient mettre la clé sous le paillasson. Un diagnostic fait, hier, par Bakary Domingo Mané, Président du Comité d’observation des règles d’éthique et de déontologie (Cored).
C’était en marge d’un séminaire sur l’environnement des médias au Sénégal. Pour M. Mané, beaucoup de journalistes traversent des difficultés avec des accumulations d’arriérés de salaires. Il ajoute que certains des confrères restent deux voire trois mois sans percevoir leurs émoluments. Pis d’autres ont connu des traversées de désert durant 7 ans. Cela signifie résume-t-il, que les acteurs des médias vivent un véritable drame social. Selon lui, des journalistes formés à bonne école et qui ont les mêmes diplômes que des magistrats ou autres corps peinent toujours à vivre de leur métier. Et pourtant ils ont choisi cette profession par amour alors qu’ils pouvaient faire autre chose.
C’est cette situation d’ailleurs, dit-il, qui pousse certains journalistes de tenter à chercher d’autres moyens de survie qui les exposent à toutes les dérives. «Il y a des journalistes qui n’ont même pas de statut. Ils travaillent pendant des années dans des rédactions sans contrat de travail. Pourtant c’est des confrères qui font un excellent travail. Ce qui fait qu’ils deviennent vulnérables aux lobbyings qui cherchent à les corrompre avec de petits billets de 5 mille ou 10 mille F Cfa soit disant pour un remboursement après un reportage. Bien vrai qu’il arrive que des confrères ou des consœurs résistent à cette tentative de corruption mais les corrupteurs passent par d’autres voies pour avoir le journaliste. Et à force de résister, ils tombent finalement dans le piège», indique Bakary Domingo Mané. Qui considère cette situation comme la conséquence de cette précarité dans le milieu de la presse sénégalaise. De son avis tout cela est lié au mauvais environnement que connaissent les médias au Sénégal.
Sur ce, le président du Cored pointe un doigt accusateur à l’Etat qui à l’en croire, est responsable de tout ce désordre. Car, d’après lui, le gouvernement n’a aucune raison d’avoir une presse responsable. Parce que tout simplement, il a besoin d’avoir des journalistes qui lui tressent des lauriers. Résultat des courses : d’excellents confrères ont abandonné le métier pour aller faire autre chose.
…Et fait son autocritique
«Aujourd’hui, n’importe qui se réclame journaliste. Des hommes et des femmes sont entrés dans ce métier sans aucune formation de base. Certains sont partis se former alors que d’autres n’ont même pas pensé à cela. Même s’ils ont l’occasion de le faire, la formation ne les intéresse pas. Nous avons des bouffons dans les rédactions avec des gens qui sont entrés accidentellement dans ce métier avec des genres rédactionnels que personne ne comprend, il y a une façon de faire de la revue de presse au Sénégal qui n’honore pas ce métier», martèle le président du Cored.
Le défaut d’encadrement dans les rédactions a occupé aussi le débat lors de cette rencontre. Comme tout métier qui se respecte, il y a des règles auxquels les journalistes doivent se soumettre. Mais le constat est que ces règles sont foulées aux pieds. La course poursuite à l’information sans recoupement conduit certains confrères à tomber dans le panneau.
Samba BARRY