Arrêté en 2014 alors qu’il était mineur (17 ans), Galaye Mbow n’a pu être jugé par la Chambre criminelle. Pour cause, le juge qui parle d’erreur judiciaire a invoqué sa minorité, mais le procureur conteste. L’affaire est finalement renvoyée au 11 juin pour y voir plus clair.
L’audience de la Chambre criminelle du 28 mai 2019 a baissé ses rideaux avec une passe d’armes entre le juge et le procureur. L’affaire impliquant Galaye Mbow, en détention provisoire depuis le 19 août 2014, est à l’origine de ces échanges de propos aigres-doux entre magistrats du siège et celui du parquet. En statuant sur les exceptions de nullité soulevées par la défense, le juge a déclaré avoir constaté que l’accusé était un mineur âgé de 17 ans lors de son arrestation. Du coup, son dossier ne devait pas être renvoyé devant la Chambre criminelle, mais plutôt au niveau du Tribunal pour enfant. «L’accusé est né en 1997. Il ne conteste pas. C’est mentionné dans l’ordonnance de renvoi et dans tous les procès-verbaux des enquêteurs. Il était âgé de 17 ans au moment de son arrestation», a déclaré le juge après lecture de l’ordonnance de renvoi par le greffier. Sur ces entrefaites, le juge se déclare incompétent et ordonne le renvoi de l’affaire devant la Chambre correctionnelle pour rétablir l’accusé dans ses droits. «C’est une erreur judiciaire. Il aurait pu être jugé depuis très longtemps devant le Tribunal correctionnel pour enfant. Il est resté 5 ans en prison», déplore le magistrat.
De son côté, le procureur de la République s’y oppose en réclamant des preuves attestant que Galaye Mbow était âgé de 17 ans au moment des faits. Même si, dit-il, cela est mentionné sur les procès-verbaux des enquêteurs. «Il n’y a aucun document joint sur son dossier pour confirmer ce que vous dites. La Chambre criminelle doit disposer de son extrait de naissance pour savoir son âge. Nous ne pouvons pas statuer sur son cas en tant que mineur», a rétorqué le représentant du ministère public. Le juge revient à la charge : «Ce n’est pas lui qui conteste sa minorité ou sa majorité, mais ce sont les procès-verbaux qui mentionnent qu’il était mineur». Interpellé sur le véritable âge de Galaye Mbow, pour permettre à la Chambre criminelle d’avoir une idée nette sur cette polémique, son grand frère, présent dans la salle d’audience, répond : «Il est né à Thiès, précisément à Médina Fall. Nous avons perdu très tôt nos deux parents. Quand ils décédaient, nous étions encore très petits. Nous n’avons pas d’extraits», une réponse qui a fini par prolonger la salle dans une tristesse assourdissante.
Pour régler la situation, le juge revient pour ainsi dire puisque le ministère public tient à la disposition de l’extrait, la Chambre criminelle va décider de l’affaire. «Le procureur a demandé à ce que l’extrait soit produit à l’audience prochaine. L’affaire est renvoyée au 11 juin», a décidé le juge. Ce, pour donner du temps à la défense afin qu’elle puisse produire un extrait de naissance pour l’accusé. Accusé de «vol avec usage de fausses clés, incendie volontaire d’un lieu servant d’habitation», l’accusé Galaye Mbow a bouclé 5 ans de détention sans procès.
Salif KA