La gloire, il en a connu. Mais, depuis sa disparition le 7 mai 2012, Jules François Bertrand Bocandé est en train de tomber dans l’oubli. Ceci, à cause de l’amnésie collective d’un Peuple qui se caractérise par son manque de culture mémorielle.
(Correspondance). «Bocardé est mort doublement». Ce constat d’un supporter du Casa Sports traduit le destin d’un homme qui aura marqué l’histoire du football sénégalais, mais qui est en train de tomber dans l’oubli. Ceci, à cause d’une amnésie collective. En effet, à Ziguinchor, seul le stade de Néma qui porte son nom, perpétue la mémoire de ce premier footballeur africain, meilleur buteur du championnat de France. A sa mort pourtant, la Casamance avait réservé un accueil digne de ce nom à son défunt fils et sa fierté, «Esaamaay».
De la cathédrale Saint Antoine de Padoue au cimetière de Santhiaba, des milliers de personnes ont accompagné la dépouille de Bocardé sur fond des sonorités locales magistralement exécutées par la chorale de «Allez-Casa». Depuis ce jour, Jules François Bertrand Bocandé a réellement disparu de la mémoire collective des Ziguinchorois qui ne se rappellent même plus de la date de son décès. Hier, jour anniversaire de son rappel à Dieu, il a fallu le rappel des médias pour que l’opinion se souvienne de celui qui a exhibé devant le monde, les qualités du footballeur sénégalais. «C’est inadmissible», a pesté le professeur Nouha Cissé. «Nous avons tous péché, mais surtout le Casa Sports», reconnaît l’ancien président de l’équipe fanion du sud et ami du défunt. Qui fait constater pour le déplorer le fait que même «les dirigeants du Casa sports oublient la date anniversaire de la mort de Bocandé». Et Nouha Cissé regrette cette attitude qui serait caractéristique, selon lui, de la culture locale. «Nous avons peu ou pas de culture mémorielle. Ce qui fait qu’on enterre nos morts avec tout ce qu’ils ont incarné».
Cette situation de mort physique doublée d’une mort symbolique, semble être le destin des héros en Casamance. Ce que déplore l’ancien président du Casa Sports. Ce sentiment, il le partage avec le chef de station de Sud Fm Ziguinchor. Ignace Ndèye se dit même choqué de constater le sort que ses compatriotes du sud réservent à cet homme qui a tout donné au Casa, fortement fouetté et valorisé la fibre régionaliste des Casamançais, mais aussi, donné une envie aux jeunes footballeurs d’aller monnayer leur talent à l’extérieur. «Boc était notre fierté. Nous devons honorer sa mémoire pour tout ce qu’il a représenté pour le football sénégalais».
Mais, au lieu de cela, le journaliste sportif constate que «Esaamaay» est en train d’être jeté dans l’oubli total et même plongé dans les abysses de l’anonymat. «Seuls les sportifs des autres régions se souviennent de Jules François Bocandé, une fois de passage à Ziguinchor. Un exemple que les sportifs de cette région sud sont invités à suivre à travers des actes qui vont perpétuer la mémoire de Boc. Pour cela, Ignace Ndèye recommande aux dirigeants du Casa Sports d’organiser chaque année un tournoi international de football qui va regrouper des équipes de la sous-région pour perpétuer l’œuvre de Bocandé et d’ériger un siège qui portera le nom du défunt, entre autres mesures. Mieux, Nouha Cissé invite les Sénégalais à changer d’approche dans les célébrations, en honorant les gens de leur vivant.
Mamadou Papo MANE