La fête internationale du travail est célébrée, ce 1er Mai, un peu partout dans le monde.
Au Sénégal, sous l’ère Macky SALL, le Pacte national de stabilité social, qui prône « zéro grève», a réussi à éroder la hargne revendicative des syndicalistes plus politiciens et moins enclins à la défense des travailleurs.
Instituée dans de nombreux pays à la suite de l’éclatant triomphe des travailleurs américains qui ont poussé leurs employeurs et autres gouvernants à revoir le temps de travail exigé aux ouvriers, la Fête internationale du travail, célébrée chaque premier Mai, est plus qu’une simple journée commémorative. C’est aussi une occasion pour les travailleurs de partager avec les employeurs sur ce qui constitue l’essentiel de leurs difficultés. Au Sénégal, on ne déroge pas à la règle. Chaque année, les principales centrales syndicales, après avoir organisé leurs manifestations, sont reçues au palais présidentiel où le chef de l’Etat s’assure que leur cahier de doléances est bien ficelé. Et la comparaison s’arrête là. Les centrales syndicales les plus représentatives du pays n’ayant apparemment que cette journée pour manifester leur mécontentement, les 364 autres jours restants étant des plus tranquilles pour un gouvernement qui s’emploie à s’occuper plus de ceux qui sont au sommet des centrales syndicales que de ceux qui se trouvent à la base c’est-à-dire les travailleurs. La Cnts, la Cnts/Fc, l’Unsas, la Csa et l’Udts, c’est-à-dire près de 92% des travailleurs, demeurant réfractaires à la rue. Depuis 2008, les seules revendications portées hors des bureaux étant le fait de mouvements syndicaux, le plus souvent d’enseignants. Les centrales les plus représentatives donnant l’impression que les travailleurs sénégalais sont parmi les mieux lotis.
LES ANNEES SE SUIVENT ET SE RESSEMBLENT
Le 1er Mai 2013, alors que Macky SALL venait de boucler sa première année à la tête de l’Etat du Sénégal, les principales centrales syndicales avaient opté pour la présentation d’un unique cahier de doléances. S’étant retrouvés au stade Iba Mar DIOP, les travailleurs avaient alors estimé judicieux de s’unir pour mieux se faire entendre. Cette année ne va pas échapper à la tradition. Les responsables syndicaux ont brillamment sacrifié à la routine. Rassemblement le matin, remise de cahiers de doléances l’après-midi. Chaque étape, son tempo. Discours guerriers devants les travailleurs, chansonnette face au chef de l’Etat.
SYNDICALISME ET POLITIQUE
La primauté donnée au dialogue avait beaucoup participé à ancrer la CNTS dans le parti socialiste. Traumatisé par la crise de 68, le régime de Senghor tenait absolument à faire des travailleurs, sinon leurs délégués, ses partenaires privilégiés. Les responsables de la centrale syndicale la plus représentative au Sénégal, convaincus qu’en étant à l’intérieur du parti au pouvoir, pourraient mieux prendre en charge les préoccupations de leurs mandants, n’ont pas hésité à franchir le Rubicond. La principale force syndicale incluse dans la mouvance présidentielle, syndicalistes et gouvernants vont entonner la même mélodie psalmodiant le dialogue social. C’est ainsi qu’en 1993, quand le régime de Abdou Diouf, acculé par les institutions financières, décida de baisser de 15 % les salaires des fonctionnaires, la Cnts et la Csa ont longtemps « négocié », abandonnant la lutte à l’UNSAS et à l’Union des travailleurs démocrates du Sénégal (UDTS).
Arrivé au pouvoir, Abdoulaye Wade qui n’ignorait rien du rôle important que jouait la CNTS au sein du PS, va vouloir sa propre centrale syndicale. Et Cheikh Diop de pousser à l’éclatement de la CNTS dont une partie sera estampillée Force du changement (FC). Wade ne pas s’arrêter en si bon chemin. Il va, non seulement, inciter des responsables à s’émanciper de leur syndicat pour en créer d’autres ; mais, il va aussi ouvrir les portes de la présidence à des délégués très en vu. C’est le cas de Kalidou DIALLO. Ainsi, de quatre centrales syndicales avant 2000, le Sénégal va compter 20 organisations syndicales en 2010. Après la période des syndicalistes députés, c’est l’avènement des syndicalistes PCA et membres du Conseil économique social et environnemental (CESE). Tous les responsables des grandes centrales syndicales siègent aux côtés d’Aminata TALL et sont loin de faire dans le bénévolat.
Interpelés sur l’inertie notée dans les centrales syndicales, de nombreux travailleurs pointent d’un doigt accusateur leurs responsables qu’ils accusent d’être à la solde des gouvernants. Pour nombre d’entre eux, la posture actuelle des syndicats obéit plus à une volonté de contenter le gouvernement plutôt qu’à un souci d’améliorer les conditions des travailleurs.
Mame Birame WATHIE