Le Conseil des ministres, d’avant-hier, a délibéré et adopté un projet de loi portant révision de la constitution, notamment la suppression du poste de Premier ministre. Une initiative unilatérale sans concertation avec la classe politique. Un véritable paradoxe, car au même moment, il appelle l’opposition à des concertations.
Il y a quelque chose de paradoxale et même contradictoire dans la démarche du président de la République. En effet, c’est au moment où il invite l’opposition à s’asseoir autour d’une table pour discuter des questions nationales, qu’il initie, de manière unilatérale, des réformes institutionnelles en profondeur, des réformes qui vont changer l’architecture institutionnelle du Sénégal. Sans avoir, au préalable, consulté l’opposition radicale et même ses alliés des coalitions Macky2012 et Benno Bokk Yaakaar, le président de la République a décidé de supprimer le poste de Premier ministre. Même les Sénégalais qui ont voté pour lui le 24 février dernier pour lui permettre d’avoir un second mandat ont été floués. Ce projet de suppression du poste de Premier ministre ne figurait pas dans son programme de campagne électorale. Et jamais, il ne s’est engagé, en cas de réélection à le faire. C’est dire donc que cette réforme majeure a été décidée en catimini et par lui. Parce qu’il se dit que même ses plus proches collaborateurs n’étaient pas informés du projet. Peu importe, le poste de Premier ministre sera supprimé de la constitution, d’ailleurs, le projet de loi a été approuvé, hier, en réunion du Conseil des ministres. Et il sera soumis à l’Assemblée nationale pour son adoption définitive. «Au titre de l’examen des textes législatifs et règlementaires, le conseil a délibéré et adopté un projet de loi portant révision de la Constitution», lit-on dans le communiqué du Conseil des ministres. Qui ajoute que le président de la République a affirmé sa volonté de poursuivre la dynamique de réduction du train de vie de l’Etat, en signalant les résultats satisfaisants concernant la rationalisation des charges locatives de l’Etat. Mais en agissant ainsi, le président de la République vide de sa quintessence un éventuel dialogue politique avec l’opposition. On se demande maintenant sur quoi va porter un dialogue politique.
Lors de sa première déclaration après la proclamation des résultats définitifs de la présidentiel du 24 février dernier, par le Conseil constitutionnel, Macky Sall avait appelé l’opposition au dialogue. Lors de sa prestation de serment le 2 avril dernier pour un second mandat, le président Macky Sall avait réitéré son appel à un dialogue «sans exclusive, constructif et ouvert» à toutes les forces vives de la nation. «Je renouvelle, par conséquent, mon appel au dialogue sans exclusive, un dialogue constructif et ouvert à toutes les forces vives du pays, forces politiques, économiques et sociales», avait-il déclaré. C’est vrai que les quatre candidats malheureux à l’élection présidentielle: Idrissa Seck, Ousmane Sonko, Issa Sall et Madické Niang avaient unanimement décliné cet offre. Mais le Pds et les partisans de Khalifa Sall se disaient favorables à certaines conditions, notamment l’amnistie de Karim Wade et Khalifa Sall.
Charles Gaiky DIENE